de Alexandre Amprimoz
, sélection septembre 2004
du Canada, sur
la rive ontarienne, tout près des Chutes du Niagara
Il se présente
à vous.
Le serveur secoue les miettes de son tablier gris ; il l’agite lentement
comme un drapeau Mais pour se rendre il faut au moins connaître la
taverne de l’ennemi. Le serveur vit seul et songe déjà à
accorder son lit comme d’autres accordent leur violoncelle.
Si séniles sont ces chaises qu’elles dorment à l'envers
comme des chauves-souris ; elles se reposent sur ces marbres vulnérables.
Ecouter des mensonges à longueur de journée, ces chaises songent
aussi à en finir.
L'esprit atteint la caverne platonique ; le banquet de lune. La lampe
de chevet, la bouteille d’Evian et le livre vespéral, serveur de
tous nos rêves.
Une bonne borgne, sans carte verte, pousse des collines de sciure vers
leur destin. Comme tous les soirs le serveur la considère. Il se
dit qu’il aime autant la veuve musculaire, la concierge des âmes solitaires.
Les chats, ces rois de la ruelle, ces rois de la nuit cabriolent de
poubelle en poubelle. Ces cris déchirants qu’ils poussent à
longueur de nuit font penser au lapin pris à la gorge par le furet.
Ils se régalent des viandes froides accrochées aux cintres
des ordures. Il paraît que l’âme est déjà présente
au moment de la conception. Le serveur se dit que Dieu doit être un
peu voyeur.
Il se demande s’il ne vaudrait pas mieux se suicider car il rentrera
tard, fera un brin de causette avec l’homme invisible, montera à
sa chambre et fermera tout à clé.
Plus tard il se réveille la gorge en feu, saisit la bouteille
d’Evian, constate qu’elle est vide. Mais qui pourrait boire à son
insu, dans cette chambre si bien fermée?
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