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elle se présente à vous.
Au
poète inconnu.
J’ai dans la tête battant des ailes l’oiseau blanc au large bec avalant ses entrailles, l’oiseau gigantesque crachant ses flammes. Ma solitude dans la bourrasque du départ, envolé l’oiseau majestueux sans âme, emportant le poète, par-dessus les forêts, par-dessus les mers, plus loin que le jour. En pointes de couteaux le soleil couchant ses rayons dans l’obscurité de mes yeux, à le voir partir et mourir un peu. A l’heure du départ, l’attente déjà. Si lourd est le silence du soir, plus loin que la nuit. Je n’oublie rien. Ni les souvenirs poussiéreux entre chants et baroud d’honneur, ni les cascades de douceur, d’eau fraîche, et de lauriers roses, autour de leurs petites chevilles tatouées de fibules. Déjà si femmes dans leurs besognes. Toutes les femmes du levant au couchant. Demain à renaître pour elles, comme un astre de lumière, dans la brillance de leurs yeux. A la chandelle vacillante, du froid de mille dangers, des parfums fiers de l’écorce et de la résine déposés sur les terres spoliées. Ni les puits taris, ni les caravanes du sud remontant vers la source du poème, ni les caravanes du nord labourant les réticences du désert, ni les promesses neuves des villes mensongères, ni mon premier jet d’encre, âpre défaite. Reviens, j’ai le mal de tes mots, le mal de tes rimes, le mal de toi, O poète inconnu. Dans l’attente du retour, la nausée du verbe muet, penchant le regard sur les mains écorchées des fillettes, sans illusion, leurs cédraies miennes, notre patrie en deuil. Reviens, le poème a perdu sa mesure les cigognes leurs plumages, pages blanches et stériles sans tes encres en berne ou en espoirs. Sans ta cadence, sans tes révoltes, sans tes rêves égarés jeunes, dans les tempêtes de sable des zéphyrs des orages. Reviens, redresser les torts. Reviens, relever les dignités agenouillées rampant comme des reptiles à la tête tranchée. Reviens, à nous perdre entre tes lignes charnelles dénudées, à nous égarer dans l’essence des étreintes. J’ai encore dans la tête l’oiseau au ventre blanc piaillant la douleur, ma douleur de te voir partir dans un geste lent de la main, sans te retenir ni de cris ni de larmes. J’ai compris la mort si tu t’en allais plus loin encore, à te perdre demain. J’ai compris l’agonie de notre terre, si tu venais à périr dans l’exil. Reviens, j’ai le mal de toi, ce soir, et le silence des vers est lourd à porter seule. Reviens, pour la chrysalide du poème mené à la dérive. Et si tu ne puis rebrousser chemin, de ton âme, j’irais en quête. Jusqu’au bout de l’enfer retirer tes os des flammes, fragile de mes doutes combien forte de tes mots, pour que recommence le rêve au chevet du sommeil. Profonds, le creux des sillons, dans nos cœurs, fougueux et tendres, de rosées matinales à panser les blessures de l’enfant, à sécher ses larmes au buvard de tes refrains. ********
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Créé le 1 mars 2002
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