La perfection est bien de ce monde 
Elle se cache à ce qu'il paraît mais ouvrez l'oeil intérieur 
Ouvrez-le bien 
Regardez le jeune Africain qui passe sur le trottoir d'en face 
Qui passe passe devant les échoppes débordant de fruits juteux 
Les vitres merveilleuses de transparence 
Les murs de brique qui soutiennent des étages de vies quotidiennes 
Regardez le grain de sa peau remarquez sa démarche 
Le ballet de ses pas 
Approchez-vous et observez dans ses yeux les pensées qui s'agitent 
Une multitude de petites feuilles vertes et rouges vibrant au vent de l'esprit 
Et on peut même aller plus loin jusqu'au souvenir de la grand-mère 
Au souvenir du dernier repas le jour de sa mort et de son sourire au moment 
De rendre le dernier souffle sur le lit de bois ciselé 
Jusqu'au souvenir de l'amour qui est encore l'amour 
Regardez comme il se détourne vers cette jeune fille du quartier 
Qu'on croirait timide sous son foulard de soie bien ajusté 
Elle vous rappelle Mona Lisa sur fond de murs taggés 
En mieux 
Ses poignets sont des brindilles ses joues de lait 
C'est juste une fille et un gars du quartier 
Mais réchauffée par le regard la timidité devient invitation 
L'invitation plaisir et le plaisir 
Partage 
Passez et volez à travers les rues de la grande ville 
Croisez le chien sans son maître les rails brillants du tramway 
Les discours de l'épicier et du coiffeur d'à côté 
Prenez de la hauteur un instant 
Elevez-vous 
D'en haut la perspective n'est pas très différente 
Les buildings les rues les vies en mouvement perpétuel 
Un organisme 
Tout comme l'une des cellules sur la peau fraîche du jeune homme 
C'est juste un changement d'échelle 
Revenez quelques temps plus tard 
C'est l'été à présent 
Les arbres regorgent de feuilles regorgent de vert un vert presque noir 
Les oiseaux palabrent à contre-jour 
Notre couple est attablé à une petite terrasse 
Pas loin du coiffeur et de l'épicier 
Casquette vissée il tient son portable à la main et de l'autre la main de la fille 
La fille devenue femme 
Des avions dessinent des sillages de vapeur au dessus de leur tête 
Des étoiles filent dans ses yeux 
Elle se tait 
Il caresse la rondeur naissante de son ventre 
Et vous qui osiez me dire que la perfection n'est pas de ce monde.