Il pleut. L'eau s'infiltre et gagne, Noël est un cœur en éponge.

L'atmosphère océanique de la maison, les souvenirs embarqués, abandonnés dans les entrepôts de l'amour dérivent de courant en courant, remontent par paliers d'impressions.

Je me souviens d'un cadeau disparu sans enchantement.

Il pleut doucement. Sans neige et sans bruit. L'orage n'existe plus.
Nous l'avions appelé pour allumer les couleurs, nous connaître dans l'éclair d'une bougie d'eau.

Il pleut. Et s'imbibe notre cœur en éponge avec ce soir son inventaire de Noël. Un petit tas de fièvre. Il pleut quelques gouttes de joies, deux enfants serrés l'un contre l'autre. Ces mots de Ferré puis un conte d'Andersen se tenant droit le cœur. Mille pétales de regards qui ne s'ouvriront pas. Une lettre chantée, aimée, noyée au fond d'une corbeille où l'on n'a pas pied, depuis des mois. Cette feuille de route couleur or, pour envelopper les départs, l'enfance, les perdus, les lointains, les absents, comme des présents. Cadeaux.
Ils portent le masque de la lumière couvée par l'hiver.
La pluie. La pluie... L'oreille de l'ami usée par tant de temps.
Quelques chocolats belges, d'Aix ou bien d'ailleurs. Une poignée de poussière bordant l'éternité, le lit des hommes seuls. Les bras du jardin dans le froid. L'amour tremblé. L'amour vibrant. Le cœur des abeilles. Notre maman qui nous prend par la main puis s'en va faire sa nuit. Notre mère qui nous imagine oiseaux... envolés, adultes. La pluie. Aucun cri. Les magasins du monde. Notre cœur en éponge qui grandit, prend l'eau et se bat. Le temps joueur qui nous taille dans la pierre.

Il pleut. Noël est un cœur en éponge. Et l'enfance posée sur un décor doux-tendre, comme un cadeau.