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Yann L. sélection décembre
2003
Il se présente à vous.
Te rencontrerai-je en hiver ?
(poème inédit)
Il a fait si chaud, cet été, que pour la première
depuis que je ne crois plus au père noël, j’ai guetté
sa venue. Et de loin. Certains Marchands de Glaces n’avaient pas même
commencé leur exode pour le grand Sud et les marrons ne grillaient
pas encore dans les cabanons des gardiens de l’hiver.
Hélas l’hiver s’annonce en tons de gris, fidèle à
lui-même dans cet ici qui me sert de quotidien. Les passionnés
de nuages avaient pourtant promis une revanche du froid avec air glacial
et glaçons au bout du nez. J’avais même osé espérer
la neige. A faire ressusciter mon père noël, autant l’accueillir
avec ses couleurs. Mais jusque là, je suis déçu. Il
ne neige pas. Il ne fait même pas froid. Et je ne te connais toujours
pas. Les météorologues sont des cons.
L’automne n’a fait que passer, emportant avec lui sa palette de couleurs
et ma garde-robe aux manches courtes. Ne reste plus que du gris, rien que
du gris. Un monde plat comme un écran d’ordinateur, sans même
Internet pour lui donner une illusion de profondeur. Pas de relief. Pas
d’odeur. Pas même de temps. Immatériel. Je n’ose même
pas écouter de la musique de peur qu’elle se taise. Respectueuse
amie.
Et à tant avoir souhaité l’hiver, je me retrouve maintenant
tout penaud d’avoir été exaucé. Je ne sais pas quoi
en faire. Pourquoi passer l’hiver si c’est pour le faire tout seul ? Sous
nos latitudes, c’est presque vulgaire, de vivre pour vivre. Et ne viens
pas me dire que c’est pour voir un nouveau printemps. Soyons réaliste.
Le printemps doit être une consécration. Si à l’automne
les feuilles tombent si délicatement, c’est pour rappeler aux amoureux
que les nuits s’allongent en même temps que les jupes et que le bonheur
se cache dans le terrier dès les premières neiges. Ou sous
la couette. Tout le monde sait ça.
Moi, j’ai une très belle couette. Très légère.
Très chouette. Je crois qu’elle est en plume d’anges. Elle couvre
toutes mes aventures depuis des années. Un vrai petit journaliste
de mon intimité. Et je crois que le jour où elle te rencontrera,
elle rougira. Je saurai alors que tu n’es pas un simple passe-nuit. Nous
pourrons alors faire l’amour au salon, devant la cheminée, étendus
sur le duvet rouge de mon passé. Et puis nous passerons l'hiver à
parler du printemps en attendant l’été. Car les amoureux
font la pluie et le beau temps, tous les météorologues savent
cela.
***
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