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  Thomas PONTILLO 
   
  Textes retenus
  par le comité de lecture 
    
  1
  Mais qu’il pleuve ou qu’il vente tu te tenais sur la
  pointe 
  de tes seins ivres du sel de mes larmes tes hanches chaviraient 
  c’était le naufrage imprévu nous sombrions dans des temps suspendus 
  au-dessus du monde des racines du ciel j’implorais mon cœur 
  de battre à la mesure de tes cris je laissais descendre 
  sur ma bouche tout l’or de tes rires j’implorais encore 
  les ténèbres de me draper dans leur suaire et la sueur 
  de nos corps à corps avait l’arôme d’une mer nouvelle 
  nous embarquions et ne voulions plus amarrer c’était pour toujours 
  disions-nous oui mon amour la mort c’est pour toujours 
  et cette morsure à ton bras le temps te saisit et c’en est terminé 
  des vœux de ces pièces de malheur jetées dans les fontaines sédentaires de
  notre pays tu me demandais est-il toujours trop tard?  
    
  * 
    
  2
  Mais qu’il pleuve ou qu’il vente ce soir j’évoque 
  ta voix et ne pouvant l’entendre telle qu’elle fut entendue 
  avant moi par tous inquiète vibration mais belle c’est 
  l’horizon qui chante et les oiseaux en leur éternité 
  de notes sont le chœur du monde qui n’a pas commencé 
  et tu chantes à jamais c’est pourquoi le monde t’attend 
  une clairière tâchée d’un soleil neuf qui mugit 
  ouvrant le pas tu vas houle déliée relier tous les 
  morceaux du paradis échoués sur la terre invisibles 
  aux hommes mais les hommes vivent échoués hagards 
  ils déplient d’obscures cartes de géographie 
  et plantent leurs tentes dans la chair meurtrie du sol 
  pourtant ils ne reconnaissent rien tournent sur eux-mêmes 
  mais rien n’appelle pas une voix pas un seul pays 
  pour se frayer un chemin de vie et toi qui es absente 
  de la chambre parmi eux tu chantes mais personne ne t’entend 
  est-il toujours trop tard?  
    
  * 
    
  3
  Mais qu’il pleuve ou qu’il vente tu étais postée 
  comme une sentinelle qui attend l’aurore c’est-à-dire Dieu 
  silencieuse tu avais les yeux fixés et le feu la fureur 
  passaient devant toi tu n’avais pas peur tu les appelais 
  tu épelais leur vie leurs croyances tu cherchais la réponse 
  devant cet océan depuis le rivage tu désirais la grande clarté des arbres
  dans notre chambre j’y étais allongé dans ces draps défaits 
  la mort dans la bouche tu venais après que l’étoile nous eut permis d’espérer
  souffler ton vent magique entre mes lèvres mes poumons revigorés mes poumons
  de cendres et de sable avaient de l’air pour cent ans tu étais l’oreille de
  mon poème le mauve le malheur l’orage 
  de mes jours interminables et ce cortège de murmures qui me déshabillaient
  pour ça est-il toujours trop tard?  
    
  * 
    
  4
  Mais qu’il pleuve ou qu’il vente je rêve de toi encore 
  qui ne m’es pas revenue je rêve de ton odeur qui a 
  rencontré le vent et ses doigts se sont mêlés aux tiens 
  où es-tu je ne sais plus marcher je marche en noctambule 
  dans le jour qui effraie les nouveau-nés j’ai perdu 
  jusqu’au sens de la vie mes mots sont une indécise 
  exactitude dans le doute de mes nuits j’ai peur 
  de l’intérieur des mots de l’effarant 
  paysage des seins parfumés c’est juste un homme 
  qui tend la main avec une ombre et ne rencontre que le 
  silence de cet espace infini la chambre aux volets clos qui semblent raconter
  ton absence les draps défaits qui délirent les paupières au ciel est-ce donc
  vrai 
  pour le chant du mourir est-il toujours trop tard?  
    
  * 
    
  5
  Mais qu’il pleuve ou qu’il vente lâchez tous les chiens 
  de la rancune de l’amertume à la mer 
  jetez vos besaces vos cadavres intimes libérez-vous 
  sautez au-dessus de l’aube jusqu’à l’épaule du soir 
  ses paupières sucrées d’orange soleil rêve coupé 
  hallucinez la langue du rêve parlons-en ouvrez-moi ce songe 
  devant lequel je pleure il y avait cette jeune femme 
  belle qui labourait épelait les nuages elle séparait 
  les eaux du ciel et y traçait des sillons 
  parfumés elle a des arbres en feu au fond des yeux 
  des mots pour embraser sa bouche elle me prenait la 
  main et me murmurait un cantique nous 
  courions sur la vie car elle est courte paraît-il 
  sur le vent qui nous prenait dans ses bras et tu connaissais son 
  âge noue tes mains derrière ma nuque renverse-moi je rêve 
  encore de ce rêve où d’un geste fatigué tu passes 
  ta main dans mes cheveux de ce geste je pouvais en mourir 
  est-il toujours trop tard?  
    
  *** 
    
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  décembre 2016 
   
   
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