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Archives : Terra incognita

 

Nouvelle rubrique depuis 2019 : découverte…

 

Novembre-décembre 2023

 

 Camille Demory, lauréate du prix Marie Noël des lycéens 2023

 

Les fioritures fleuries et autres poèmes

 

(*)

 

 

Présentation du prix bourguignon Marie Noël par Marie-Pierre Verjat, membre du jury

 

Le prix Marie Noël a été créé en 1963, nous avons fêté ses 60 ans cette année. Signalons qu’un grand nom de la poésie en fut le lauréat en 1965, il s’ agit de Léopold Sédar Senghor. A la demande de la poétesse auxerroise Marie Noël (dont l’œuvre fut remarquée à l’époque par Aragon et Montherlant, la citant comme la plus grande poétesse de son temps), ce prix restera bourguignon. Il récompense un poète, voire deux parfois, pour l’un de ses recueils, un ou deux lycéens pour deux de leurs poèmes ; plus récemment a été créé le prix d’éloquence des écoliers. Ces prix sont remis chaque année à Santenay depuis vingt-cinq ans après avoir été décernés successivement à Dijon puis à Beaune en Côte-d’Or. Sont remis en cadeau aux adultes des bouteilles de vin de Bourgogne et aux lycéens et écoliers divers livres et bons d’achat ainsi que des diplômes pour chacun des récipiendaires.

 

(*)

 

 

LES FIORITURES FLEURIES

(avec 3 illustrations de l’auteure)

 

 

-I-

Les oiseaux de l'aube

 

Les oiseaux de l'aube

Entonnent sans effroi

 

Un chant que l'ombre

Absorbe sans émoi

 

Les mélodies picotent, tournicotent

puis tourbillonnent…

 

C'est le matin en éclosion

Qui se donne

 

***

 

-II-

Où les étoiles s'effleurent

 

Des larmes sèchent contre la noirceur de l'air éteint

Des meubles s'y plongent aussi, durs, d'étain,

 

Il y a l'odeur de la poussière d'argent fané.

Il y a les cris, se heurtant sans bruit aux murs brisés

 

Fleur qui s'ouvre

Fleur qui boit le noir

        qui broie du noir

 

Fleur de peau, à fleur de tête, c'est la fleur de la paupière...

Broussailleuse un peu, à ses orées,

Elle abrite quelques étoiles fraîchement tombées

 

Ce soir,

Minuit n'a sonné nulle part d'autre

que dans les cœurs.

 

 

***

 

-III-

L'invitation

 

Ouvre les yeux,

J'aimerais ajouter deux soleils à l'autre

 

Dis-moi ton monde

J'aimerais que la merveille saute

 

Rêvons nous deux

Allons donc aux lueurs, tout au bout du chemin...

 

***

 

-IV-

Chrysalide

 

Une image contenant dessin, peinture, Dessin d’enfant, fleur





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Voir le corps se mouvoir

Voir le corps s'émouvoir

Il se tord dans tous les sens

Il se tord de tous ses sens

Des sensations nouvelles

Des idées neuves, ensommeillées

Des idées fleuves, ensoleillées,

Je laisse ma vie pousser.

 

***

 

-V-

Éclosion

 

Une image contenant dessin, croquis, peinture, illustration





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Je suis née dans une fleur

dans une peur     

dans le cœur

d'une idée

Je suis née puis je meurs

                                         je mourrai     

     je pleurerai

 J'arroserai des journées

  Je suis née par erreur

  par bonheur

À cette heure,

Je veux fleurir de trop vivre, vivre de trop fleurir...

Et rire, aussi.

 

Ma naissance est couleur.

 

 

***

 

-VI-

Le gouffre

 

Je me prends de grandes rasades de larmes

Dans de longs verres au verre rayé

Je me prends de belles claques dans la gueule

Jusqu'à brisure de joues mouillées

J'aime, parmi mes rires, vagabonder seule

Parfois, je m’isole aux éclats du soleil bas

- Bateau de pensées en pâture –

Et qui me noient, et qui me noient

Dans des sanglots embouteillés

 

***

 

-VII-

Trio

 

Une image contenant croquis, dessin, illustration, Gravure





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Dans les rues grouille le bruit

   grouille l’ennui

De gris visages grisés de nuits

Des gens passent, se dépassent puis trépassent

Mais la vie, ce n’est pas ça

Je pense à toi

 

Dans les rues, ça roule, ça file

  ça déroule, ça défoule, ça défile

Les gens s’affichent, s’en fichent, s’empiffrent

Ils triment. ils trichent : quelle friche !

Mais la vie, ce n’est pas ça

Je pense à toi

 

Une brume brûle et fume partout et consume tout

Toujours des plumes fusent comme espoirs doux

Des lumières se grignotent, elles clignotent, elles s’emmêlent

Des rêves s’émiettent, ils empiètent sur mes ailes,

Mais la vie, ce n’est pas toi

Je pense à ça

 

Dans les rues, on découvre

     on se couvre

      on couve des idées

Les regards courts courent, coulent, étoilés

Mais la vie, ce n’est pas ça

Je pense à toi

 

Les ciels sont tagués de nuages

Au Très-Bas, on drague, on clashe – et ça encage

Nos âmes comme de profonds marécages

Nos yeux comme des galaxies

Car la vie, ce n’est pas vide – c’est juste rapide

Je pense à toi

 

Dans les rues, le temps s’écoule

  le temps s’écrit

   les foules crient

Les foules marchent, arrachent, détachent : quelle démarche !

Et moi, je pense à toi

 

Je pense à toi

Je pense à trois

 

 

***

 

-VIII-

Autoportrait

 

J’ai sur moi des parfums qui enivrent

De longs bras qui enlacent puis délivrent

Dans mes poches des livres

Dans mon rire des mots

 

J’ai sur moi des rêves un peu lourds

Des souliers las et lacés qui accourent

Dans mon cœur de l’amour

Dans mes yeux de l’eau

 

J’ai sur moi des papillons d’idées

Des ailes qui gigotent et se sont emmêlées

Dans ma tête des pensées

Dans ma voix un ruisseau

 

J’ai en moi une âme libre qui respire

Des cris qui s’évadent en soupirs ou sourires

Dans mon être, du plaisir

A vivre comme un oiseau

 

***

 

-IX-

La méduse

 

Elle glisse sous mes paupières

quand la nuit fait des siennes

Elle danse dans mes pensées

Et son nom étincelle

comme l’orage un jour de pluie

 

Mes rêves sont debout, autour d’elle allongée

Mes espoirs sont doux, durs et... brisés

 

*

 

Le sortilège doit se rompre

car je suis malade

Le sortilège me corrompt :

voici ma noyade

 

***

 

-X-

Ma gaieté

 

J’avais les genoux couverts de bleus verts

J’avais les mains arrangées de roses rouges

Que je tenais bien droites, bien droites

Et elles m’ensanglantaient les doigts

 

J’avais le cœur battant, battu et bas

J’avais demain léger qui chantait jusqu’à moi

Et qui courait, courait, courait

Comme le temps passe – et dévore tout

 

J’avais une chansonnette qui gratte à la tête

Qui tintait comme une jolie tirelire

Et tirait sur le fil des beaux, des beaux sourires

Ô soleils dérangés de franges oranges !

 

J’avais les pas claquant leur tempo jeune et jaune

J’avais, dans un verre vert, des violettes fanées

Qu’elles ont pleuré, pleuré, pleuré

Quand jadis je les ai arrosées

 

J’avais plein de mots qui gigotent en démons

J’avais de la peinture bleue blottie sur mon nez

Car je m’effraie, m’effraie, m’enfuie

Et je colore mes monstres dorés, détruits

 

***

 

FRAGMENTS

 

-I-

Luminescence

 

Le soleil s'est levé

Formant dans l'immensité

Un espoir de lumière

 

-II-

Joie blottie

 

Petit bout de soleil

Petit bout qui sommeille

Sur la cime de mon cœur

 

-III-

Ce monde

 

Ce monde fuit

Ce monde luit

Ce monde gris

Tout en clameurs

 

-IV-

L'âme

 

Si l'âme est un ciel

Qu'elle m'enrobe, qu'elle m'étreigne, qu'elle m'imprègne

De ses tissus d'encre mouillés

 

-V-

Biscornu

 

Embranchements dans l'âme

Arborescences des veines

Espoir à pas de faon

  à pas d'enfant

 

 

(*)

 

 

AUTRES POÈMES

 

 

C’est une amie

 

C’est une amie au nom majestueux

Dorée, brillante, elle peut

Prétendre être un soleil

Car sa beauté donne presque sommeil

Elle enchante dans un songe lointain

Et elle, elle rit, me tend la main

 

Et ses yeux sont ceux d’un chat

Son sourire est un rayon

Quand s’éclaire mon cœur las

C’est de son être, c’est de son nom.

 

*

 

La pensée furtive

 

Tout se passe sous mes paupières,

Sur ma rétine se brûle le ciel

Sous mon regard des larmes de pierre

Sur mes cils, des étincelles

 

Je n’ai plus sommeil

J’ai juste rêve

Rêve d’un monde juste,

ou bien je crève

 

*

 

Autrefois la guerre

 

Un ciel à l’odeur de groseille

Du miel collant, vermeil

 

Un soleil acide moisit les corps

Le sommeil fuit, encore et encore

 

J’ai peur

J’écoute les coups qui coulent dans ma tête

S’arc-boutent

Coûte que coûte

 

Je pleure

J’essuie et essaye, je saigne

suie et sel sans cesse

 

Je baigne dans mes souvenirs,

Je peigne à en vomir

Mes chevelures de souffrances

 

*

 

Loin

 

Ferme les yeux, je t’emmène

les cieux s’entremêlent, où les rêves se réveillent

et les cœurs s’aimerveillent

 

*

 

Nota bene

 

J’aime les gens qui regardent par la fenêtre. Ils ont tout compris à la vie.

 

©Camille Demory

 

 

(*)

 

Présentation de Camille Demory par Marie-Pierre Verjat

 

Camille Demory est élève en 1ère au lycée Mathias de Chalon-sur-Saône. L’envie d’écrire lui est venue très jeune avec cette ambition de devenir écrivain. Elle s’adonne à l’écriture de poèmes mais aussi de romans et de nouvelles, elle en a rédigé six. Certains de ses romans ont eu un suivi éditorial, dont une participation au prix Gallimard Jeunesse avec obtention d’une mention spéciale. Elle a notamment obtenu trois prix au Salon du livre d’Autun. Ne doutons pas que d’autres récompenses viendront émailler son parcours. Son autre passion, le dessin. Camille a pour objectif de s’orienter vers une école d’art après le Bac.

 

 

Autobiographie de Camille Demory

 

Je suis née à Chalon-sur-Saône le 8 novembre 2007, en étant la benjamine d'une famille nombreuse. Pour autant, j'ai eu une enfance assez solitaire que j'ai remplie à l'aide des couleurs de mon imagination. J'ai toujours aimé raconter des histoires, ce que je faisais toute petite à travers des dessins ; je pliais des feuilles entre elles pour leur donner la forme d'un livre et dictais à mes frères et sœurs ce qu'il fallait écrire au-dessus de chaque illustration. Mais dès que je fus moi-même en capacité d'écrire, je le fis et dès que je connus l'existence du métier d'écrivain, j'ai décrété que ce serait le mien. Encore aujourd'hui, j'ai du mal à dissocier l'écriture de l'art plastique, et même si cela me créé des embêtements, je considère que c'est une richesse. 

L'art et l'écriture sont avant tout pour moi des moyens d'expression qui contournent ma timidité pathologique. Je vois souvent mes écrits comme des hurlements qui ne font pas de bruit. J'ai pour but en écrivant de consoler des personnes et d'en réveiller d'autres. J'aimerais surtout que mes créations aient une utilité plus grande et autrement plus vaste que personnelle. L'acte de créer n'a rien d'un loisir pour moi. Par ailleurs, si mes écrits permettent à des gens de s'émerveiller, de se comprendre (et de me comprendre), je suis ravie. 

Je suis inspirée par les univers oniriques et féériques, parfois horrifiques. Côté poésie, j'aime particulièrement les poètes proches du surréalisme, comme Prévert ou Aragon. 

Je suis en ce moment scolarisée au lycée Mathias de Chalon, et envisage pour la suite d'intégrer une école d'arts ou une fac de lettres ou de philosophie. J'espère un jour vivre de mes créations. 

 

 

Camille Demory

Francopolis novembre-décembre 2023

Recherche Éric Chassefière

 

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