Vague à l’âme
Nous
sommes attablés au premier étage,
Heureux
avantage,
De
ce restaurant, du centre-ville,
Et
par la fenêtre, sur un fil,
Sans
y prêter trop attention
J’aperçois
les boules de décoration
Tendues
au travers de la rue, qui avec ostentation
Se
dandinent, au gré du vent,
Comme
mes sentiments
Au
gré de mes émotions
Une
vague romantique envahit mes pensées,
Je
deviens nostalgique, une foule de souvenirs,
Assaillent
mon cœur, un léger creux vient ravir,
Mon
trouble et les larmes montent, sincérité.
Je
parcours les endroits de ma jeunesse,
Les
premiers souvenirs notre adresse,
Rue
Paul Albert près de la Place des Abbesses
Qu’il
était doux le temps des matins de tendresse.
La
rudesse des temps me priva de cette allégresse
Je
devais comme un enfant de mon âge rejoindre
La
classe, avec les camarades de ma jeunesse,
Et
peut-être d’en éprouver de la tristesse.
Même
si les afflictions commençaient à poindre.
Même
un père malade ne peut vous garder
À
la maison, de la vie à affronter.
Même
dans le cas d’être séparé de ses proches
Le
destin vous attend et le futur s’approche.
J’ai
ces souvenirs en tête, à cause des photos peut-être.
Ma
mère, veste en peau d’ours à Montmartre, pour un verre
À
une terrasse, mon Père et une amie Nadia, Place du tertre
Ce
restaurant « le petit caporal » où nous déjeunions le dimanche,
À
Mantes la jolie, la déception de Papa suant sur la planche
Une
pièce de théâtre qui ne serait jamais jouée
Sûrement
un de ses plus grands regrets.
Les
pique-nique au bois de verrière avec la table pliante,
Maman
préparant les sandwiches, bien méritante,
Mon
père me coursant autour de la table de salle à manger.
Et
mes plaisirs de randonnée à la « Rambo », fier de ressembler
A
Un vrai Chevallier avec Ivanhoé, comme un aventurier,
Lancé
dans les bois pour sauver les mères et les nouveau-nés.
Ou
mes jeudis passés à travailler les mathématiques en cours privé,
Pendant
que j’entendais le feuilleton « Zorro » à la télé dans la pièce à côté.
C’est
un ange, son visage est féminin
Mais
les anges ont cela en commun.
Il
faut vous dire la chose, l’ange en question est né
Voilà
une vingtaine d’années.
Elle passait devant nous, croisait notre chemin,
C’était sans doute un cadeau
du ciel.
Sur
notre question en quête de la rue de l’exposition,
Elle
change sa destination et nous accompagne jusqu’au perron
Et
nous suit dans la maison de Marina Tsvetaieva sur notre invitation
Elle
admire avec nous les gravures et peintures installées
Sur
le brun des murs, dont notre amie Ludmila fait un
éloge appuyé.
Avec
son petit minois, son allure juvénile et sa façon de dire « oh ! »
En
soulevant les sourcils à chaque fois qu’on lui adresse un mot,
En
apprenant qu’elle est artiste
Autour
de nous chacun s’émeut d’aborder la concertiste
Pour
solliciter un petit « oh ! »
Puis
dans le petit salon elle nous confie qu’elle est clarinettiste
Et
le plus simplement du monde elle sort un petit pipeau
Long
d’une trentaine de centimètres et entonne un morceau
D’une
mélodie médiévale qu’elle étudie,
Et
puis nous sourit :
«
Samedi prochain je serai en concert avec l’orchestre de
Mon
université,
Vous
viendrez ? »
Quelle
joie, quel bonheur, instantané, presque irréel, divin,
Nous
nous quittons en la remerciant et enfin,
Sur
le perron,
«
Oui, nous viendrons ».
C’est
l’histoire de mon copain
Qui
mangeait une glace derrière
Une
glace sans teint
Il
devait avoir rudement faim
Et
c’est une histoire sans fin.
Il
avait peur d’être vu
De
jouer les matuvu
Mais
il est tellement farfelu
Qu’avec
lui rien n’est jamais perdu.
Une
glace à cent balles
C’est
pas trop mal
Parce
qu’a travers les Halles
J’ai
beau chercher dans les balles
J’
trouve rien, je mange que dalle.
La
glace derrière une glace, c’est bien
Mais
il préférerait manger à sa faim
Ne
pas devoir toujours tendre la main
Ou
se faire chiper pour un larcin
C’est
pas une vie, traîner ses guêtres
Toute
la sainte journée, des kilomètres
Trouver
un job, ou parler au prêtre
Marcher
dans les rues au pifomètre.
Quand
je vois Arlette près de la buvette
J’voudrais
bien lui faire un brin de causette
Ou
bien l’inviter à la prochaine fête
Mais
comment j’peux, j’ai pas d’cassette.
Ah
! si seulement je pouvais lui conter fleurette
Je
pourrais la gâter ma p’tite Arlette
J’lui
achèterais quelques fleurettes
N’irait
sur les boulevards faire des emplètes.
Si
seulement j’trouvais un boulot d’arpète
Je
pourrais inviter Arlette, aller boire une anisette
Elle
deviendrait ma bergerette
Faut
dire qu’elle a une bien jolie binette.
Quand
vous flânez à Paris, le hasard vous entraîne
Par
les rues, les gares, l’envie de partir en voyage,
De
vagabonder, vous arpentez les quais de Seine,
Ses
bouquinistes, Notre-Dame, comme en pèlerinage,
Face
à l’académie française, quel paysage !
Mais
si vous vous rendez au marché de la carte postale
À
Saint-Mandé, vous y rencontrerez des gens formidables
Une
petite famille avec leur fouillis invraisemblable
Les
brocs du mercredi, objets en tous genres, c’est louable,
Mais
surtout le monde des cartes postales.
Dès
le premier contact vous êtes adopté par le broc,
Il
vous accueille dans son fatras de vieillerie, de bric et de broc.
Ses
caisses recèlent un vrai trésor,
Les
fameuses cartes postales françaises, j’adore.
Revivre
l’histoire des gens simples, des familles, des amoureux
Évoquer
la vie il y a un siècle, de personnes vivant en ces lieux.
Et
il y a Gérard, homme affable, de bonne humeur
Petit,
trapu, mains grêlées de taches de rousseur,
D’allure
bonhomme, chevelure brune, épaisse,
Son
matériel, des tréteaux, des caisses
Il
range, il trie, il classe, et pour ses fans,
Ses
très aimées cartes sous cellophanes
L’univers
des cartes postales est magique
Et
même peut-on dire mystique
Et
comme le dit le libraire Taganskaia*,
C’est
la charge de la vie, du « A à Omega »
Font
pénétrer dans le monde des sentiments,
Avec
grand respect et dignité,
Que
certains ont pu écrire, il y a 100 ans,
À
leurs proches, à leurs aînés,
On
partage ainsi une tranche de vie
De
ces inconnus qui nous deviennent familiers,
Mais
c’est très touchant et c’est la vie.
*Taganskaia : quartier de la ville de Moscou
Ces
cheveux que tu laisses posés
Négligemment
sur le lavabo
C’est
beau,
Sont
un signe de ton passage
Pour
faire perdurer en moi le secret
De
ton image.
La
réminiscence de ton visage
La
douceur de tes traits, leur finesse,
Un
baume pour moi au jour de la tristesse
M’entraîne
dans les méandres
De
ton souvenir.
Une
mèche m’apprend tout de toi
Ton
côté revêche quand tu te rebiques
Le
côté soyeux quand tu te fais câline
Le
brillant dans l’éclat de ton sourire.
Je
garderai cette mèche comme on garde un
Diamant,
la reposerai dans un écrin
Me
souvenir de toi si mon cœur est chagrin
Pour
la contempler souvent, la contempler toujours
Penser
à toi, encore et encore mon amour,
Une
mèche de cheveux que tu avais posée….
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