TERRA INCOGNITA

 

 

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Archives : Terra incognita

 

Nouvelle rubrique depuis 2019 

 

Automne 2024

 

Jean-Nicolas De Surmont

 

(*)

 

 

Illustration par Camille De Wyse

 

 

Musiques monastiques

 

Le Plaisir esthétique s’incarne

Lorsque l’âme se fond dans l’arche

Vibrato sur les cordes du corps

Englouti dans les entrailles musicales

Chante le verbe incarné

Chante et danse le mélomane

Chante mon corps au vers mesuré

Englouti le plaisir

Psalmodié à l’aube des récitations

Durant la vigile

 

*** 

 

Orchestrer ses émotions

Comme un concerto

Esquisser une sonate de tristesse,

Un adagio desséché

Arabesque violée

Aux halliers de l’enfance

Caresse dissonante

Qui musarde

Tristesse enivrante

Assombrie

Écoute mon chant,

Écoute ce chant

Prélude à l’amour

Touche le clavier

Du nocturne transcendant

 

 

Exégèse des souffrances

 

(…)

Vide quantique

Bourdonnement d’énergie

Conscience évanouie

Néant habité

Grand tu croyais Hêtre

Hêtre maintenant le plus petit

Comme la croix et la nuit

À l’épaule le sac des déambulations

Chaque nuit, il se couche

Espérant qu’à l’aube les abeilles

Le gavent du miel qu’elles ont butiné

De l’or tant recherché

 

***

L’eau et le vent libre

J’oscille entre incertitude et dérision

Orné de clôtures épineuses

Je transporte le calvaire de vies passées

Je marche loin de moi

Mon chemin trace un signe de noir

 

***

 

Hêtre plein de mouvement

S’illustre dans l’hiver blanchâtre

Comme une dispersion mentale

Comme chez les Montagnais

Réduction estivale

Chasser le gibier

Cordes vocales desséchées

Le verbe meurt dans mon univers claustral

Je suis près de ma terre

Mais loin de l’esprit

Entre le verbe et la chair

Le jongleur converti

M’enseigne

La demeure de l’Être

 

 

Le cycle de la fenêtre

 

L’air froid gèle à la fenêtre

Aussi blanc que l’hermine et le lemming

De ma fenêtre givrée j’aperçois

L’hiver et sa blancheur

Croissant au rythme des danses champêtres

 

 

Exutoire de la mort

Paroles de nuit aride

Ô passe jour sans fenêtre

Sans nuit

Je serai la fenêtre

 

*** 

 

Savoir la lumière

Comprendre que noirceur n’est pas noirceur

Qu’ombre n’est point ombre

Et que tristesse et pensée ne sont point ce qu’elles représentent

Mais un rayon de clarté

Qui se cherchant

Devient lumière

 

 

Purification déifiante

 

Vivre de confiance, d’espérance

Sous le linceul de valses

Au seuil de la conscience

Et des ritournelles

Dans l’éphémère glaçure

J’ai déposé le glacis

Sur l’ornement

De l’être mystifié

 

***

 

Je peux être partout

Je me dépossède

Je ne suis plus rien

 

Que mes songes

Soient réalités

Qu’ils s’accouplent

Qu’ils copulent

 

À ma mémoire

Flagellée de parcours multiples

A deo factus est

 

©Jean-Nicolas De Surmont

 

 

(*)

 

Linguiste, anthropologue, universitaire, travaillant en France, Belgique, et au Québec, Jean-Nicolas De Surmont nous offre ici le privilège d’un regard sur son recueil inédit de poèmes intitulé Corps spasmiques. 

Le recueil est préfacé par Raôul Duguay et illustré par Camille De Wyse. Pour l’explication du titre nous citons justement le préfacier :

« Cherchant dans mes dictionnaires et sur le Web le sens de l’adjectif "spasmique", je n’ai rien trouvé. Ce terme est donc un néologisme, une licence poétique. En fait, l’adjectif approprié est "spasmodique". Sur le plan psychologique, le spasme est la réaction habituelle de l'émotivité se manifestant dans un "vif transport de jouissance amoureuse, sentimentale et/ou charnelle". Cependant, "spastique" du grec σπαστικóς est un autre adjectif du substantif "spasme" utilisé en médecine et dont la signification est "qui a la propriété d'attirer à soi". Dans Corps spasmiques il est question de cette force d’attraction qu’est l’amour. Et comme ce titre est écrit au pluriel, il est clair que cette mutuelle attraction va bien au-delà des spasmes corporels. » (préface de Raôul Duguay).

Nous avons extrait du recueil quelques textes qui nous sont parus significatifs de ce travail singulier autant sur les mots dont se fait la Poésie que sur l’être même du Poète, qui se fait et se re-fait lui-même en-deçà et au-delà du poème. Il nous semble utile et nécessaire, pour la bonne compréhension de sa démarche, de lui donner la parole (extrait de l’Introduction de l’auteur) :

« Le recueil n’a aucune volonté autobiographique, mais correspond certes à un cheminement poétique et intérieur, une poésie mysticisante s’il en est une, dont la production s’étale sur plusieurs années. C’est en fait une réflexion spirituelle sur l’être humain dans les difficultés qu’il rencontre dans sa tentative de socialisation. La vie spirituelle constitue en quelque sorte une contestation sans la lettre de ces tentacules sociaux. L’ivresse de vivre passe nécessairement par cette distance critique envers la société, mais aussi par celle de l’être humain lui-même, écorchant au passage les stéréotypes mais s’enivrant aussi de rencontres électrisantes. (…)

La poésie qui suit ne se réclame d’aucune école, quoi qu’on en dise. Elle n’est pas non plus coupée du monde, ni du champ poétique dans laquelle elle s’inscrit, mais la lecture que l’on en fera est toujours prisonnière de subjectivités, qui sont construites sur des faux repères, des profils construits sur des a priori.

La production des poèmes qui sont présentés ici s’étend sur plus d’une vingtaine d’années. »

Un grand merci pour ce don.

***

 

Pour faire connaissance avec l’auteur, voir, sur la toile :

https://independent.academia.edu/DESURMONTJeanNicolas
http://www.laportedoree.com/

Jean-Nicolas De Surmont est responsable de l'association bruxelloise ASBL LA PORTE DOREE : « Conférences, concerts, culture et édition à votre portée » (présente sur Facebook).

 

Un échantillon des articles et travaux de l'auteur sont accessibles par téléchargement sur le site ACADEMIA. La bibliographie des ouvrages figure sur ce site de même que sur le site de l'ASBL LA PORTE DOREE.

La Librairie du Québec distribue un certain nombre des ouvrages en Europe.

Nous en citons quelques-uns :

- La bonne chanson. Le commerce de la tradition en France et au Québec dans la première moitié du XXème siècle (Triptyque, 2001 ; épuisé)

- Chanson, son histoire et sa famille dans les dictionnaires de langues française (De Gruyter, 2010)

- La poésie vocale et la chanson québécoise (Instant même, 2010)

- De l’écho canadien à la lanterne québécoise. Comment la chanson est devenue la figure de proue de l’identité québécoise (GID 2010)

- « M’amie, faites-moi un bouquet… ». Mélanges posthumes autour de l’œuvre de Conrad Laforte (2011)

- Vers une théorie des objets-chansons (ENS Éditions, 2011 ; éd. numérique 2022)

- La chanson comme berceau de l’identité québécoise. Mélanges en l’honneur de Bruno Roy (Éditions du Québécois 2022 ; sorti en novembre 2022).

(D.S.)

 

 

Jean-Nicolas De Surmont

Francopolis Automne 2024

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