LECTURE - CHRONIQUE
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livres... |
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LECTURES – CHRONIQUES – ESSAIS Été 2025 Pierre
Tanguy, Lieux ardents. Éditions Des Sources et
des Livres, printemps 2025 (85p., 15 euros) Une
lecture par Guénane Cade |
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Des lieux vibrants
ouvrent les portes du temps, avec tant de naturel qu’en vous peut sourdre une
comptine de l’enfance. Sur les chemins, j’ai rencontré un cueilleur de
souvenirs, sur les chemins j’ai rencontré un poète enraciné. Un poète qui,
avec une émouvante clarté, nous ramène à ses racines, à nos racines. Les petits chemins Sous la lune Sont des filets de
laine Que dévident des
chattes curieuses Ici, les chemins
accueillent les simples humains ou, en écho, les simples, les plantes qui
adoucissent, guérissent ou picotent, les fleurs humbles qui embellissent, à
chacun de se laisser attraper par le col. C’est un poète cueilleur de
murmures. Chemins, chemins creux des vieilles charrettes avant que les
chemins côtiers ne bondissent vers les falaises et nous rappellent que le
bout du monde est partout. Sourire aux bénitiers d’eau salée, au
chapelet des vagues, aux croix qui font le guet dans la nuit, à la
crinière des oyats. Le poète pèlerin chemine vers les fontaines plus
ou moins vertueuses, mystérieuses. Au bord de l’une d’elles, il se dépouille
du vieil homme, l’enfant retrouve son visage, sa sérénité. Que diriez-vous d’un
festin Sur la margelle d’une
fontaine ? Il suffit d’un peu de
pain Épicure,
philosophe à la vie simple et frugale, frétille en nous en sourdine. Ici, les montagnes
bossent leurs vieux dos, entre mer et marais, elles ont la tête dans les
nuages, les yeux perdus en mer et leurs légendes ont l’accent du Pays Léonard
breton. Nos montagnes Nous prennent par la main Quand la douleur fait
de nous des errants Sur les berges, des
parenthèses attirent, parenthèses paupières où vient surgir un détail, éclore
une idée avant la dernière halte où le recueil de l’errance nous mène à
l’Aven, au Bois d’amour de Gauguin. Mais aussi à tous les petits Bois d’amour
de l’enfance, nos cachettes, nos découvertes, les futaies qui froufroutent,
les cueillettes. Baies immuables de nos Bois d’amour secrets, semblables à
celles qui sauvèrent un enfant juif évadé d’un camp d’internement, ultime
ponctuation. À chacun ses miroirs intimes, les lieux
que nous portons en nous sont notre univers, sont l’univers. Bois d’amour Car les arbres chez nous Comme partout dans le monde Dialoguent par leurs racines Livre limpide. Le poète
pérégrine à sa source. Nous partons en ballade et les photos donnent le
rythme, enluminent comme au temps du noir et blanc. Certaines mémoires
écrivent à reculons, la mémoire de Pierre Tanguy va de l’avant dans ses
sobres et riches heures. Ce recueil nous invite à laisser palpiter librement
en nous ces lieux de la mémoire, ces lieux qui nous façonnent à jamais,
malgré nous. © Guénane Cade |
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(*)
Présentation du livre sur le
site de l’éditeur :
Ici ! Tout se dit là, dans
l’horizon d’une Bretagne « éternelle comme l’Univers » ainsi que
le chante Charles Le Quintrec après Saint-Pol Roux. Ici ! Ce n’est pas n’importe où que
se conjuguent les alliances de la terre, de la mer et du soleil. Que les
pluies sont bienveillantes et que les nuages embrassent les montagnes
fatiguées. Ici ! C’est tout un territoire de chemins creux, de gestes
ralentis, de pierres levées en autant de croix singulières, de monts tout
fiers, désormais étêtés. Une sacralité toute terrienne s’y respire et
s’impose. |
Note de lecture de Guénane
Cade
Francopolis – Été 2025
Créé le 1er mars
2002