LECTURE - CHRONIQUE 

 

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ARCHIVES:  LECTURE CHRONIQUE

 

LECTURES – CHRONIQUES – ESSAIS

Automne 2025

 

 

Catherine Bruneau, Embrasser

 

Éditions Encres Vives, janvier 2025 (6,60 €)

 

Éric Chassefière, Sentir, Garder vivante la flamme du poème

 

Sentir : Éditions Rafael de Surtis, 2021 (15 €)

Garder vivante… : Éditions Sémaphore, octobre 2024 (14 €)

 

 

Lectures par Lara Dopff

 

 

(*)

 

Une image contenant livre, texte, croquis, papier

Description générée automatiquement

 

Sentir

 

Une lecture de haut vol poétique, d'apaisement et de pensée conjugués. Nombre de pensées en partage sur les silences du monde, les ombres, la lumière, l'écoute et la mer - sur le regard au monde et en écho ce même horizon de quêtes silencieuses d'apaisement et de dépassement sain et immobile que chacun nourrit de sa propre immensité -

 

Ce jardin d’ombre et de lumière comme les traçait si bien Jaccottet a pris racine, écho et vie en moi en les multiples jardins perses de ce monde qu’il m’a été donné, d’incorporer, de transcrire et de vivre, en cette planète, en différents continents, pays, régions, lieux perdus de France, face à l’immensité de la mer ou des montagnes du ciel.

 

Ces lisières me sont familières, le cri qui bat l’espace, l’oiseau, sans voix ni visage, qui n’existe que creusant le vent je l’ai maintes fois écouté. Cette suspension où l’on devient le mouvement même de l’éveil, cette errance, je tends vers sa naissance à chacune des aubes. Le chant d’au-delà de la lisière est infinité qui me saisit. La caresse au vent est feu connu et inné. Justesse permise de fermer les yeux avec le monde quand le chant est feu. J’ai œuvré à un Jardin qui me semble entendre L’aube est ce jardin fait chemin, exactitude, et ses promesses d’apaisement, ses profondeurs de songe je les trouve ici posées en réciprocité, comme cet espace autour de nous se double à l’intérieur d’un plus vaste encore. Tout comme ces éléments autour de nous, rappels au monde, nous mettant au monde la nuit matérielle de l’arbre. Nous dessinons oui sans cesse l’ombre pour s’offrir la promise naissance de la lumière. Ce chant je l’écoute, il chante avec le feu de l’oiseau, avec la pierre des fontaines. Les traces et surtout les empreintes je les quête en cette brume de lumière, à l’immensité, à cet infini d’espace autour de nous. Grâce de nous appeler à toucher l’horizon de son seul désir de vivre et de rêver. Ces baies de sureau que vous nommez sont en train de mûrir à la fenêtre.

 

L’errant, le toujours au monde est une de mes essences devenue à travers terre et nuit si justement évoquée ici. Comment ne pas entendre ce regard de chaises et tables pour le seul festin de la lumière, la voix au lit des pierres.

 

Je pourrais énumérer l’ensemble de vos fragments de silences, nous partageons cette pensée, cette approche, cette écoute de ces si sonores silences du monde. De la matière d’un silence à l’étoile partagée, voir qui naît de voir, ce n’est pas la matière des choses, mais leur silence.

 

Et la nature sonore qui s’incante en les silences, l’écoute permise, ce n’est plus de pluie que les arbres murmurent, mais de vent, où s’ouvre Le ciel seul de la pensée, silence seul de l’écoute et on ne sait plus si pluie ou vie pour atteindre l’immobile dans le mouvement, le cri dans le silence.

 

Embrasser

 

Fureur douce et dure des mots. Un souffle, un élan de vie puissant et une tentative de tension pour tendre à l'essentiel des sens ouverts et décuplés au monde mais aussi la faille, le contrepoint de cette ouverture totale au monde sans concession - la pénétrance totale des vibrations et des chants du monde en soi jusqu'à l'implosion, nous sommes une espèce "ouverte", tu en as la mémoire.

 

Embrasser est une tentative pensante, un chant sauvage originel doublé d'un chant d'apaisement forgé dans l'expérience.

 

Garder vivante la flamme du poème

 

La solitude est ce don dont peu prennent le chemin. Elle est magistrale cette quête de la part de soi sans laquelle il n'est de mort possible.

 

Rare au-delà de l'entendement ouvert à la fleur de l'écoute. Je connais ces saisons de l'écriture, leurs lumières, si peu encore de ce que forge la mémoire car je ne suis encore revenue du cours de la source. Ce fond de l'univers, ce battement du sang - là où germe le plain chant de l'écoute - la rumeur interne de la langue qui se fusionne. Le bourgeon de l'appel écrit avec les lèvres a cette persistance harmonique du cri sans le cri. Doux sommeil d'écriture où ne s'entendra l'oiseau qui se pose.

 

Ce manifeste d'expérience, ce corps à corps avec la pensée blanche - neige de l'acte d'écriture - ces échos de forgeron, de souffleur de verre, inspirés et inspirants, le refus des chemins pour l'à travers d'une sente à essarter soi-même, seul le sentier vierge et unique peut garder vivante la flamme du poème et plus encore celle du poète. A nouveau cette question qui souvent est mienne, comment vivre en poète une vie entière et non au simple instant de la fulgurante brûlure ? Ce livre est comme un compagnon sur nos sentiers solitaires, d'autres ont forgé et forgeront, nous venons des uns et nous nous fonderons dans l'alter. Mais à l'instant de l'acte poétique c'est l'un et le cosmos, c'est l'inspiration, les mobiles des mondes, l'inspiré qui renverse tout acte pensant.

 

tu veux écrire ce chant

faire qu'il parle en toi

là est pour toi le sens même d'écrire

 

Garder vivante la flamme du poème et Embrasser sonnent comme deux recueils en dialogue qui se lisent, bien plus que par les mots, dans leur accord silencieux.

 

 

©Lara Dopff

 

 

Note de lecture de

Lara Dopff

Francopolis, automne 2025

 

 

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Créé le 1 mars 2002