LECTURE - CHRONIQUE
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LECTURES –CHRONIQUES
Note de lecture de
Dominique Zinenberg :
Jean-Marie Guinebert, La vie neuve
(Les Cahiers Illador 2021, 78 p., 15€)
De
quoi serait faite « la vie neuve » ? De quels matériaux, de
quels cris, de quelle peau ? La vie neuve et non nouvelle « Vita
Nova – con allegria » signale l’exergue, est
énergie, vitalité, regard sans concession sur le monde, champ d’expérience ou
d’expérimentations, sur le vif, à même le cynisme ou la virulence du monde, à
même son énigme, sa finitude, le désespoir qu’elle engendre. Trois
cycles forment La vie neuve. Le premier s’appelle « Chants
métaphysiques » : c’est l’enfance, la Genèse, le plus ancien, ce
qui chante en sourdine les débuts, les contes, les peurs et cris primitifs,
le face à face avec la mort, la rudesse de tous les débuts, depuis le début,
à chaque début. « L’enfance était profonde/Autant que la mare/Commune
et noire/ Au centre du village ». Le
deuxième est intitulé « Le cycle court des amours
douces-amères » : les références amoureuses sont légion, les désirs
multiples, les cupidons ne cessent de décocher leurs flèches. On repère Dom
Juan, Casanova, les amours à la Marivaux, les amours courtoises, les
conquêtes et défaites et toutes les jouissances physiques, les délicatesses
romanesques, les fragilités du sentiment et parfois le temps suspendu du
bonheur d’aimer : « Ne sachant/ Ni dessiner ni peindre/ Et muet
d’amour/ Quelles nuances/ Donner au silence/ pour dire l’aimée/ Qui dort
entre mes bras/ Je cherche en vain/ Dans les blancs/ Qui séparent les mots/
Comme autant de soupirs / Surtout / Ne pas la réveiller/ Elle est/Cela
suffit. » Le
troisième temps du recueil s’appelle « Après-dire ». L’épopée
homérique, l’Iliade, en particulier, nous saute aux yeux. Sa présence se dit,
nous dit, accapare le dire. La Grèce, Le Pirée, d’autres partances, d’autres
désastres comme celui du Titanic, se rejouent à l’envie ici et ailleurs, ne
manquent pas d’interpeller, de miner, d’approfondir le tragique de la vie, de
nourrir l’angoisse, le tourment, la tentation du cynisme, retenue juste à
temps par l’énergie du poétique qui combat la tentation de la déréliction et
rappelle la dette qui nous consume. Après C’est-à-dire
toujours Il
faudrait encore Donner
le change Rendre
la monnaie Toujours
acquitter le passage Mais
– Rater
l’arrêt Au
bout de la ligne Sans
avoir rien compris Rien
retenu De
ce voyage qui ne mène à rien Ne
rime avec rien Sauf
lui-même En
ses innombrables semblants Ses
épuisants semblables. ©Dominique Zinenberg |
Note de lecture
de
Dominique
Zinenberg
Francopolis, mai-juin
2021
Créé le 1 mars 2002