Ou les mots cessent de faire la tête et revêtent un
visage. |
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GUEULE DE MOTS
Cette rubrique reprend un second souffle en 2014
pour laisser LIBRE PAROLE À UN AUTEUR... Libre de s'exprimer, de parler
de lui, de son inspiration, de ses goûts littéraires, de son attachement à la
poésie, de sa façon d'écrire, d'aborder les maisons d'éditions, de dessiner
son avenir, nous parler de sa vie parallèle à l'écriture, ou tout
simplement de gueuler en paroles... etc. Mars-avril 2023 Libre parole à Jean-Michel Sananes Deux poèmes coup-de-gueule : Jacques
Grieu, Grand Bazar (peinture reproduite de son site, avec
l’aimable autorisation de l’auteur) |
Je
suis un papillon noir
Derrière mes larmes, mes rires, mes colères, mes
espoirs, il y a un papillon noir, une aile en quête
d'altitude, une force invisible qui s'insurge contre toute les
soumissions et contre l'omniprésence de cette conscience
d'apparat sa volonté mécanique, endorphine, sa capacité à déformer les vérités, à arrimer l'intelligence aux certitudes de l'obscur. Il faut qu'un cri ouvre l'insurrection, libère les promesses et les rires emprisonnés dans
ces bulles de savon que les jongleurs savants et autoproclamés font
danser sur leur nez pour endormir les consciences. Plus haut que les dos courbés et l'abdication il faut qu'un cri défonce les devantures de ce vide galactique qui parle en notre nom. Annoncez à tous les Pinocchio et autres jeteurs de
charmes que la fourberie est parfois périlleuse, marcher sur le fil des mensonges enrubannés étirés entre les étoiles ne fait pas d'eux des
funambules intouchables, l’imposture et la supercherie qui masquent l'horizon
doivent cesser, rien ne fermera le vent des révoltes. Et... surtout, dites à l'enfant qui en vous ouvre vos matins, qu'il n'est en rien une mémoire morte, que l'enfance de l'homme ne tarit pas à l'arrivée de
l'âge, que le souffle de l'espoir a ses printemps, dites-lui la Révolution des Œillets, celle de
Prague, et d'un certain mois de Mai, dites-lui que la vie est belle pour qui n'enterre
pas ses rêves. J'étais un papillon aveugle, une chrysalide endormie aux acides d'une autosatisfaction égotique, mais je suis de retour, j'ai cassé mes chaînes à la hache des mots, il faut réveiller le jour, rouvrir le cristal, effacer les cauchemars, les échafauds, les bûchers, oublier les résignations, les maîtres, les rois, les
confiscateurs d'univers, les assassins de liberté, les destructeurs de rêve, destituer ceux qui quantifient nos droits et
normalisent nos désespoirs, aucun homme ne doit se retrouver seul au matin et croire qu'il n'était riche que de ses nuits, il faut chasser les marchands d'illusions et tous ceux qui nous veulent à leur service. Quand mon printemps se lèvera, avec des colères de vent, je placarderai des murs de goudron sur leurs
propagandes, avec des rumeurs d'oiseaux, de forçats évadés des
usines, j'inventerai des mots sans couteaux, à formes
galactiques, des géométries sans croix et sans sens interdit, ensemble, nous balaierons les verbiages insipides de ceux qui imposent leur savoir-vivre et ignorent que VIVRE n'est pas servir. Je suis un papillon fou né de nuits de trop longue
attente, à l'aube d'un soleil nouveau j'éradiquerai tous les drapeaux, toutes les vieilles patries, j'inventerai un territoire plus vaste, à dimension d'homme et d'inconnu plus large que le connu. J'effacerai les univers tangentiels et leurs
manifestes patriotiques calligraphiés sur papiers sanglants siglés aux
en-têtes des pouvoirs et de leurs élites, nous abolirons leur démagogie, leur métaphysiologie
et mystériologie, leur arithmétique du bonheur et leur équation : tout pour les uns, rien pour les autres. Je suis un papillon fou dans un ciel asservi aux
croyances périmées, je crois à l'azur, aux étoiles, à l'amour, à la vie, j'arrive d'un futur d'arcs-en-ciel et de fraternité, nous oblitérerons un passé sclérosé de philosophies
atrophiées, de corruption mentales, d'inadmissibles soumissions, leurs injures deviendront mots d'amour, à ménager le mensonge, les belles idées rognent
l'espoir, nous inventerons une encre éthique, insoumise, un
verbe nouveau à l'exact de vérités opposables aux falsifications
millénaires des manichéismes, nous vomirons les fourberies, les charlatanismes,
les dictatures qui ont tué, génocidé, affamé la vie, nous nous opposerons aux héritiers d'un passé
falsificateur qui au nom de prétentions astronomiques veulent
coloniser mars quand la terre et ses habitants meurent de soif, de
faim et de désespérance. L'incalculable est à nos portes, nous pouvons éviter l'inexorable, ils sont l'impudence, nous serons le partage et le pardon. Je suis un papillon noir, fils des vents et des forêts, de la vie sur une terre ronde, l'enfant des peuples disparus je suis tous les peuples, je suis un papillon fou, je crois à l'inflation des idées, à la résurrection
du jour, je suis une multitude et nous arrivons pour délivrer demain avec des mots sans artifices qui parlent de mutations, de consciences réinventées et d'honnêteté non
sectaire. Je suis un papillon noir, un écho majeur de la révolte du vide, un papillon fou, je suis la multitude innombrable, nos mots portent la lumière d'aimer aussi large que
le vivant. ©Jean-Michel Sananes Publié le 19 août 2021 sur CHEVAL FOU (le blog de JMS) *** Comment se dire poète
Fallait-il que je vous sache jongleurs
d’iniquité tenant le mauvais côté de la matraque pour que ce cri résonne éculant mon pacifisme pour souffler un
vent de révolte ! Comment se dire poète quand le mot est devenu si mercantile que le roman ne s'écrit plus pour être lu
mais pour être vendu quand le libraire fait ses emplettes au
hit-parade de l’odieux-visuel quand l'âme humaine se distille en fraude
parmi les blessures du poème et le
silence du jour ? Comment se dire poète quand au matin l'homme-misère se redresse pour défier le regard de
l’exploiteur quand le monde d'en haut ignore la différence entre empathie et
suffisance quand l'indignation ne suffit plus et quand l'espoir ne retrouve plus sa
route ? Tournent tournent les presses à vérités
apprêtées. Le crime et le scandale font leur
business quand Versailles joue ses fastes sur délit de finance, paillettes et
arrogance quand la République brade la vie du petit
peuple offre des permis d'exploiter sans limite
d’âge détruit le pacte républicain réinvente le STO (Service du Travail
obligatoire) brandit l'étendard du CAC 40 arme la loi des araignées et ses cordées
de francs-tricheurs qui au pas de Loi braquent un colt 49-3 et flinguent la démocratie ! Ne faut-il pas que la poésie hurle quand vous bannissez l'espoir ? Qui d'entre vous parle de la violence de
la rue quand il n'enverrait jamais ses père et
mère à l'usine après 60 ans ? Qui d'entre vous délaisserait ses dîners d’affaires pour porter un sac
de ciment ? Briser les dos ne vous inquiète pas plus que la faim des
autres ! Messieurs d'en haut qui dites aimer la
France quand vous devriez aimer les Français ayez peur quand le verbe saigne à cœur
ouvert. Le peuple d'en bas ne sait plus vivre à
genoux craignez le verbe quand la misère ouvre
le poème craignez l'injustice quand elle peut être
fatale. ©Jean-Michel Sananes 25/03/2023 |
Jean-Michel Sananes Francopolis
mars-avril 2023 Recherche Dana Shishmanian |
Créé le 1 mars 2002