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Coup de coeur : Archives 2010-2013

  Une escale à la rubrique "Coup de coeur"
poème qui nous a particulièrement touché par sa qualité, son originalité, sa valeur.



 
( un tableau de Bruno Aimetti)


À Francopolis,
la rubrique de vos textes personnels est une de nos fiertés.
Elle héberge un ensemble de très beaux textes, d'un niveau d'écriture souvent excellent,
toujours intéressant et en mouvement.

Nous redonnons vie ici à vos textes qui nous ont séduit
que ce soit un texte en revue, en recueil ou sur le web.


Poème Coup de Coeur du Comité

JUIN 2014

Géo Koger
Lionel Gerin
Francesca Y. Caroutch
 Marie-Jeanne Heusbourg
Paul de Roux & Guy Goffette
Guy Jean
Habiba Zougui  & Cee Jay


GEO KOGER

Geo Koger, cela est aussi de la poésie, certes populaire mais connue dans le monde entier. Les paroles de cette chanson ont été écrites par le parolier Géo Koger, la nuit dans un train dont les tressautements du wagon lui ont inspiré la forme hachée du texte, choix Michel Ostertag
Je n'suis pas bien portant
Depuis que je suis sur la terre
C´n´est pas rigolo. Entre nous
Je suis d´une santé précaire,
Et je m´fais un mauvais sang fou,
J´ai beau vouloir me remonter
Je souffre de tous les côtés.

J´ai la rate
Qui s´dilate
J´ai le foie
Qu´est pas droit
J´ai le ventre
Qui se rentre
J´ai l´pylore
Qui s´colore
J´ai l´gésier [gosier]
Anémié
L´estomac
Bien trop bas
Et les côtes
Bien trop hautes
J´ai les hanches
Qui s´démanchent
L´épigastre
Qui s´encastre
L´abdomen
Qui s´démène
J´ai l´thorax
Qui s´désaxe
La poitrine
Qui s´débine
Les épaules
Qui se frôlent
J´ai les reins
Bien trop fins
Les boyaux
Bien trop gros
J´ai l´sternum
Qui s´dégomme
Et l´sacrum
C´est tout comme
J´ai l´nombril
Tout en vrille
Et l´coccyx
Qui s´dévisse (Bis)


Ah! bon Dieu! qu´c´est embêtant
D´être toujours patraque,
Ah! bon Dieu! qu´c´est embêtant
Je n´suis pas bien portant.


Pour tâcher d´guérir au plus vite,
Un matin tout dernièrement
Je suis allé à la visite [rendre visite]
Voir le major du régiment.
[A un méd´cin très épatant.]
D´où souffrez-vous? qu´il m´a demandé.
C´est bien simpl´ que j´y ai répliqué.



J´ai la rate
Qui s´dilate
J´ai le foie
Qu´est pas droit
Et puis j´ai
Ajouté
Voyez-vous
C´n´est pas tout
J´ai les g´noux
Qui sont mous
J´ai l´fémur
Qu´est trop dur
J´ai les cuisses
Qui s´raidissent
Les guiboles
Qui flageolent
J´ai les ch´villes
Qui s´tortillent
Les rotules
Qui ondulent
Les tibias
Raplapla
Les mollets
Trop épais
Les orteils
Pas pareils
J´ai le cœur
En largeur
Les poumons
Tout en long
L´occiput
Qui chahute
J´ai les coudes
Qui s´dessoudent
J´ai les seins
Sous l´bassin
Et l´bassin
Qu´est pas sain






{Refrain}

Avec un´ charmant´ demoiselle
Je devais m´marier par amour.
Mais un soir comm´ j´étais près d´elle,
En train de lui faire la cour,
Me voyant troublé, ell´ me dit :
- Qu´avez vous? moi j´lui répondis :

J´ai la rate
Qui s´dilate
J´ai le foie
Qu´est pas droit
Et puis j´ai
Ajouté
Voyez-vous
C´n´est pas tout
J´ai les g´noux
Qui sont mous
J´ai l´fémur
Qu´est trop dur
J´ai les cuisses
Qui s´raidissent
Les guiboles
Qui flageolent
J´ai les ch´villes
Qui s´tortillent
Les rotules
Qui ondulent
Les tibias
Raplapla
Les mollets
Trop épais
Les orteils
Pas pareils
J´ai le cœur
En largeur
Les poumons
Tout en long
L´occiput
Qui chahute
J´ai les coudes
Qui s´dessoudent
J´ai les seins
Sous l´bassin
Et l´bassin
Qu´est pas sain

Et puis j´ai
Ajouté
Voyez-vous
C´n´est pas tout
J´ai les g´noux
Qui sont mous
J´ai l´fémur
Qu´est trop dur
J´ai les cuisses
Qui s´raidissent
Les guiboles
Qui flageolent
J´ai les ch´villes
Qui s´tortillent
Les rotules
Qui ondulent
Les tibias
Raplapla
Les mollets
Trop épais
Les orteils
Pas pareils
J´ai le cœurEn largeur
Les poumons
Tout en long
L´occiput
Qui chahute
J´ai les coudes
Qui s´dessoudent
J´ai les seins
Sous l´bassin
Et l´bassin
Qu´est pas sain
En plus d´ça
J´vous l´cach´ pas
J´ai aussi
Quel souci!
La luette
Trop fluette
L´oesophage
Qui surnage
Les gencives
Qui dérivent
J´ai l´palais
Qu´est pas laid
Mais les dents
C´est navrant
J´ai les p´tites
Qui s´irritent
Et les grosses
Qui s´déchaussent
Les canines
S´ratatinent
Les molaires
S´font la paire
Dans les yeux
C´est pas mieux
J´ai le droit
Qu´est pas droit
Et le gauche
Qu´est bien moche
J´ai les cils
Qui s´défilent
Les sourcils
Qui s´épilent
J´ai l´menton
Qu´est trop long
Les artèresTrop pépères
J´ai le nez
Tout bouché
L´trou du cou
Qui s´découd
Et du coup
Voyez-vous
J´suis gêné
Pour parler
C´est vexant
Car maint´nant
J´suis forcé
D´m´arrêter.

(Refrain)
Paroles de Géo Koger, musique de Vincent Scotto
(À écouter sur You tube)

Géo Koger né en 1894, décédé en 1975.
Auteur des paroles entre autres chansons :
J’ai deux amours pour J. Baker : Marinella pour Tino Rossi ; Prosper Yop la boum ! pour Maurice Chevalier ; Pigalle et
Un monsieur attendait pour Georges Ulmer.



HABIBA ZOUGUI 
&
CEE JAY

Habiba Zougui , poétesse et romancière marocaine native d’El Jadida, titulaire d’une licence en langue et littérature françaises. Ses écrits sont en arabe et en français.
Et
Cee Jay , né à Bruxelles, choix de Jamila Abitar.
 Malédiction
(un extrait de ce qu’elle appelle
« Un poème de cendres des années de mutisme »


Veux–tu voyager à ces cites
Quittant ces lieux et leurs rumeurs ?
N’oublie pas les versets qu’on récite !
Devant ces cavernes .
Toi O jeune voyageur !

Je me mire devant toi,
comme a fait Narcisse autrefois,
croyant qu’il n’y a que moi
sur ce sable emblème d’ effroi .

Ne me chasse pas de l’empire,
je parle et renais avec l’eau
ta mission risque de finir,
les Dieux te changeront en roseaux.

Et tu oublies ces rochers spirituels ;
cette eau et ces chants rituels
tu as voulu devenir l’émule des Dieux
tu seras écartelé et maudit par les Cieux.

Ne songe pas, ô maudit voyageur, au salut !
ni à la miséricorde des Cieux.
Songe aux formules qui doivent être lues ;
et relues en traversant ces lieux .

Habiba Zougui

Publications
Cendres des années de mutisme(recueil)
Ghazl al haky : roman (Jordanie)
3oqda f 3oqda : poésie populaire.(subventionné par l’Association Culturelle à El jadida )
Portes promises : recueil de poésie ( Algérie

Prix littéraires
Prix de la poésie francophone (1999)
Prix de la traduction (2008)
Prix d’innovation naji naman 2008 (recueil portes promises)

***

CEE JAY

De Nador au Nadir

Quand filent les étoiles
Pour échapper à l'univers.
Que la vasque du ciel ne suffit plus
à contenir le murmure des tendresses perdues
La beauté de l'homme a trouvé
Son ultime refuge dans le sommeil.
Ce qui palpite n'est que matières inertes
Agitées par les vents.
Ne germe que la fuite éperdue en tous sens.
Une pluie de sel s'est répandue sur les ruines d'hier.
S'est arrêté le temps.
Dans l'aride solitude des lieux
J'ai tendu les filins amarrés d'étoile à étoile.
J'ai joué la Ghaïta et envoyé la corde à noeuds
Jusqu'aux lacs fumants d'en haut.
Je me suis posé immobile en Lotus
J'ai attendu que le fin fil d'argent
Me mène où je pourrai m'atteindre
Enfin infiniment éloigné du monde.

Le flûtiau de l'enfant berger arrive jusqu'à moi
Si haut porté par les âmes des arbres abattus.
Ses moutons rêvent de loups amis
De hautes herbes vertes
Cette nuit sur leurs couches de détritus.
Il y a une grande attente du silence
Avant que tout ne se soit tu.
Le pâtre s'est endormi entre deux brebis maigres.
Sa main lâche la flûte qui tombe comme un bijou
sur les méconnaissables ordures.

De noeuds en noeuds Je redescends
M'arrachant péniblement à l'attraction du grand néant
Et je file la route sans destination
Sous les étoiles fuyantes de Nador.

BIO
- Né à Bruxelles le 10/09/1946, études à l’Académie Royale des Beaux Arts de Bruxelles de nombreux métiers, de nombreux voyages, des succès et des silences. J.C.Crommelynck ; (alias) CeeJay , à toujours été poète mais n’avait rien écrit après ses 17 ans, il avait peint depuis ses 14 ans, gravé, sculpté, touché à tout.
- Slameur par hasard en 2011, deuxième prix de la Maison de la Francité
+ de 300 textes en 2014

- Il avait été promu Chevalier des Arts et des Lettres de l’ordre du Roi Léopold à l’âge de 15 ans par Arthur Haulot  (Grand résistant et initiateur de la Maison de la Poésie)
- Affamé d'écriture avec des fautes avant la fuite dans les pensées
En se gardant intact le plaisir de se découvrir à posteriori en première lecture publique à l’affiche de nombreuses lectures de poésie à Bruxelles, Mons, Anvers, Reims, Paris, Nice, Marrakech, Safi, Guelmime, Massa, Nador etc CeeJay, un poète slameur quoi !

Son courriel


LIONEL GERIN

Lionel Gerin, choix Karim Cornali


Encore une fois

Encore une fois
La route qui fend
La paupière du gel
Et le barbelé des étoiles
Encore une fois
Ton corps
Accoudé au matin
Encore une fois
Partir
Relire les épitres de la pluie
Tendre nos pas
Et se hisser à la hauteur du jour

*

Je n'irai pas par quatre chemins

Je n'irai pas par quatre chemins
J'irai par des centaines
Voir tout le spectre de l'humain
Boire à l'eau des fontaines
Je n'aurai de répit dans l'or du paysage
Alors je serai nu dans la beauté du monde
La parole me sera comme geste et louange
Pour protéger mes yeux du feu de mille soleils
Je n'aurai de silence dans le chant de l'été
Mon souffle à l'unisson du cœur battant des blés

Lionel GERIN
dédicacera son recueil "Si nous n’avions qu’une ombre" au prochain marché de la poésie de Paris, au stand des Editions Le Nouvel Athanor.

  
FRANCESCA Y. CAROUTCH

Francesca Y. Caroutch, poète, choix de Dana Shishmanian
GRAND LARGE

Un feu organique
incendie la neige de juillet

Forteresse infranchissable
surgie de ses abysses d’oubli
sous la voûte étoilée

Ce soir
l’obscurité creusera un puits de lumière inversée

La nuit ne tombe pas
Elle caresse en voilant très lentement

Demain le soleil fera flamboyer les collines

Ne rien jeter ne rien conserver
Les pensées se libèrent aussitôt d’elles-mêmes

(p. 30)


CONSTELLATIONS DE NOMADES

Nul accroc dans la soierie des voyages

Mendiants d’amour
lorsque vous percez nos nuits fragiles
saisissez-vous
l’or volatile de nos poèmes
qui dorment tout habillés
comme les nomades ?

Pourtant notre peuple intérieur
chevauche monts et merveilles
entre la douleur et les astres


L’extase du vide
vous guérira
de la maladie du temps

(p. 42)


SEMEUR D’ÉVEIL

Un ange noir agite les bas-fonds
plus exaltés que le feu
au désert du désir
Peu importe
Nous avons la poésie dans le sang
Voici la terre pure
où le semeur d’éveil a planté sa tente

Les yeux des fleurs s’entrouvrent
sous les fils de la vierge
amis de la rosée

A l’aube du silence intérieur
barque dans les prés
verger sur le lac
Savoir
quand dire les choses les magnifie
les tue
ou inverse le cours du temps

(p. 43)


MORT ET RÉSURRECTION D’UN POÈTE

« L’absence n’existe pas
pour les vivants. »
Alain Suied.

Nous fûmes la poignante collision
de deux éclairs noirs
à une altitude insoupçonnée
Les plantes les sources
les pierres chantaient

Forges du non-dit

Quel était ton combat
avec l’ange ou avec un fauve
Proche et inconnaissable
sévère et incandescent
tu avançais à découvert
au bord d’un cratère

Les mots de nuit
s’avéraient aveuglants

Je te salue dans la lumière

(p. 57)

J’ai choisi quatre poèmes du recueil Les enfants de la foudre de Francesca Y. Caroutch (éd. Rougerie, 2011). C’est une écriture qui me parle au plus profond de moi. Elle cache une expérience ultime qui illumine l’être, par la proximité même du gouffre qui la nourrit ; l’expression poétique qui en jaillit est pure et coupante, comme un diamant ciselé par la foudre.

Sur l’auteure, voir son site.
Présence à Francopolis : note de lecture en avril,
et Entretien Francesca Y. Caroutch avec Igor Smetanof
dans ce même numéro.



MARIE-JEANNE VHEUSBOURG

 
      Marie-Jeanne Heusbourg, est Lorraine. Elle vit dans l’écrit et pour l’écrit,
     choix d'Éliette Vialle.


Le printemps

Émerger du printemps
Nus comme aube brillante,
Émerger de l'eau claire
Nus comme diamant.
Regarder soleil
Jusqu’à larmes aux yeux,
Prendre main qui se tend,
Plonger dans un soir tiède...
Se faire l'un à l'autre,
Un bel enfant d'espoir.
Prendre regard de gosse
Et y lire amour !
Oublier l'heure, le temps,
Et vivre la vie.
Oublier les arrivées, les départs,
Les fuites éperdues,
À travers les champs de sa personne
Cheminer enfin
Sans lien, sans rêve
Nager en béatitude
Dans l'exaltation de la vie...


PAUL DE ROUX
&
GUY GOFFETTE


Paul De Roux et Guy Gofette, choix de Dominique Zinenberg
Paul De Roux

Pierre-Albert (5)

Si mêlé aux plantes dans le souvenir
que froissant la menthe ou le thym
c'est à lui que je pense,
lui se nourrissant de ce paysage
– il semblait que le Ventoux
soit venu de Chine se poser entre les vignes
et les oliviers, derrière sa maison,
pour qu'il soit de plain-pied avec calligraphes
et vieux peintres, lui-même
petite silhouette sur le sentier,
donnant l'échelle et qui s'éloigne.
   
Pierre-Albert (6)

Si mêlé aux plantes dans le souvenir
que froissant la menthe ou le thym
sa leçon me revient à l'esprit:
« Demander pardon à la plante
quand on cueille un brin de thym. »
Je le revois penché vers ses dieux
que rien ne protégeait, des dieux livrés
à la mainmise des hommes, chassés
de la terre rousse où se roulaient les chiens
et lui près de pleurer devant les animaux,
notre frère des jours révolus.

Paul de Roux-La Halte obscure (Poésie Gallimard)

&

GUY GOFETTE

C'est toujours la même histoire et l'on s'en veut
après coup d'avoir laissé dans le feu des paroles
et du vin de sombres nuages monter
sur le front de l'ami
sans rien lire au-delà des yeux, rien
du désert de vivre et de la soif de l'homme
aux prises avec ses ombres, quand sans cesse
il tournait sa tête
inquiète vers les lumières de la rue
comme s'il voyait déjà le printemps
en chemin dans les branches et déjà craignait
que les forces lui manquent
pour grimper avec lui comme un chat dans l'été.

(Élégie pour un ami)
 à Paul de Roux


Entrevoir, c'est tout ce qu'il voulait
que les pas restent ouverts au coeur
de l'élégie, et pareil au chat,
le front contre la vitre, épuiser
les nuages, retrouver la veine
de cet inconnu qui va tissant
dans les intermittences du jour
et les allers retours du sang,
poèmes de l'aube après poèmes
des saisons, un chemin bruissant
et calme comme un paysage en cours.

Guy Goffette
(Paul de Roux, une bibliographie, à la dérobée
Poésie Gallimard)


 
 GUY JEAN

        Guy Jean, poète acadien, vit au Québec, choix de Gertrude Millaire
Prologue

Je dépose une page blanche
comme site quadrillé d'archéologue
y range les fragments épars de nos origines
les rassemble en un rêve
que je veux poème

Dix-sept

J
e plante en mon corps
les semailles des jours à venir
les arrose de semence
fleurs et fruits de dessinent sur les années

J’allume un feu
ses flammes ne connaissent ni matière, ni chair
j’en foudroie l’ogre tout-puissant et éternel
caché dans le passé de mes pères et mères
brise sa monture aux yeux jaunes qui portent
mes cauchemars enfantins de chutes et d’enfer

j’immole les amours gâchées
les rancœurs, les envies
je recueille les cendres
en fait l’encre de mon écriture
je donne naissance à un dieu
ordinaire, transitoire
sans autre ambition que de créer
une seule vie
puis
s’abimer dans la mort
ma mort.

(dernier poème tiré de son recueil,
fossiles qui gisent en mes rêves
(poèmes archéologiques)

Présence sur Francopolis (librairie
2006) (Revues 2008 et 2014)
Visiter son site Guy Jean, écrivain

Coup de coeur
 
Dana Shishmanian, Éliette Vialle,
Dominique Zinenberg, Gertrude Millaire
 Karim Cornali, Michel Ostentag et Jamila Abitar
 
Francopolis, juin 2014

Pour lire les rubriques des anciens numéros :

http://www.francopolis.net/rubriques/rubriquesarchive.html