Le Salon de lecture Découverte d'auteurs au
hasard de nos rencontres |
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SALON
DE LECTURE Novembre-décembre 2022 Éric Chassefière Poèmes extraits de trois recueils inédits Catherine Bruneau, Danse
silencieuse, acrylique |
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POÈMES
EXTRAITS DE PRÉSENCE DE L’ENFANT Les
marronniers ont poussé dans la fenêtre ils emplissent d’une caresse de leurs fleurs la paume ouverte de l’ombre se font jeu pur du vent et de la lumière la voix de l’enfant dans la pièce voisine accompagne le ballet silencieux des fleurs sous la fenêtre où je viens écouter ma vie le regard plein de ces arbres qui se mêlent et ondoient * Un
chant léger d’oiseaux dans la fenêtre ouverte sur la seule présence de l’arbre dépose sur nos lèvres parole d’ombre et de lumière ce chant il suffit de le penser pour l’entendre il est le lointain par lequel la fenêtre laisse entrer le
ciel l’arbre dessiné balance doucement dans une absence bercé par le souvenir de la présence à naitre le chant perlé peu à peu se fond au silence * Rythme
lent des pas et des gestes dans la cuisine carrelée de soleil fenêtre ouverte sur l’écho des jours passés le petit arbre d’autrefois au plein des tempes geste après geste la vie rejouée le rythme retrouvé du corps cela que le chant des oiseaux est silence que la lumière ne touche la pierre que la caressant * Le
ciel de fleurs des marronniers viennent s’y perdre les ombres des oiseaux il faut toucher la nuit de ces fleurs pour éteindre la lampe de la présence l’enfant s’éveille alors poussant silencieusement la porte du rêve dans lequel il s’est endormi le beau temps noie doucement l’infini des toits de sa voix l’enfant cherche la tendresse des mots * Les
mots l’enfant les porte dans son corps comme l’oiseau porte en lui son chant les mots se font images du corps le chant est oiseau dans la mélopée de l’ombre le cimetière dans l’ouvert de la fenêtre brille de mille fleurs de lumière la voix de l’enfant est silence des voix qui l’entourent c’est en elle qu’il faut faire résonner les mots * POÈMES
EXTRAITS DE LA PART SILENCIEUSE Silence
et nuit l’ombre flambe la main émerveille le temps le chemin est caresse la mémoire souffle faire musique dans la distance du corps doucement chanter accompagner l’oiseau de l’œil écouter murmurer la source savoir que la source est en l’autre que le chemin ne s’arrête pas qu’éveil est partage bientôt la présence s’ouvre la musique se déploie se fait cœur silencieux d’un jardin l’éclat sombre du regard dévoile l’écrit intérieur accorde la page à son silence * Vérité
de ce jardin de ces tiges fines inscrivant le mur de ces fleurs accrochant l’espace de la subtile délicatesse de leurs tracés vérité qu’y vient prendre la musique son chemin pierreux ses crêtes éloignées sa nostalgie toute de pas joyeux la musique toujours s’évade trace le cercle d’un envol le jardin aussi est d’instants de seuils à tracer dans la lumière faire musique de ce jardin y prendre légèreté de vent profondeur de souffle d’une présence sentir comme ici s’y rêve dans l’ailleurs * Lumière
qui frôle le jardin éclaire les branches hautes de l’olivier ouvre dans le mur la profondeur d’un ciel pose sur les fenêtres sa paupière d’ombre lumière pour l’éclat et le caché la tendresse et le manque la musique l’écho le silence la légèreté de l’encre sur la page jouer dans cette présence de la lumière qui est aussi part d’ombre du jardin jouer pour que brille la joue l’émotion retienne le geste jouer pour sceller le temps refuser l’inéluctable de la perte jouer pour que les chemins se rejoignent résonne la profondeur mémorielle d’un jardin * POÈMES
EXTRAITS DE COMME TREMBLE LE SEUIL L’arbre chante Soir silencieux, aux lisières du jardin, de la
fresque sombre d’arbres et de murs. C’est le ciel entier qui jaillit, cette
profondeur de la lumière dans le bleu rehaussée par ces bords de toits,
éternel horizon de ce jardin, avec la cheminée de vieille pierre, dressée
comme girouette au vent de la lumière, que le soleil vient caresser de l’or
du fruit ; et, derrière ce toit et cette cheminée, ce pin à la fine
ramure sur le ciel dont la fluidité de la silhouette se fait mouvement au
cœur de l’immobile, minces calligrammes sur le ciel du léger feuillage. De
l’arbre, du ciel, on ne sait lequel enlace l’autre ; de la nuit, du
jour, lequel illumine, lequel est illuminé. Plus rien ne bouge que le noir,
perpétuel tourbillon de lui-même, toute chose peu à peu rentrant en
elle-même, se repliant au secret de la naissance. La nuit est ce
jaillissement du ciel, de l’arbre, du toit, hors des limites de nos sens, le
jardin comme suspendu dans l’immobile. Se laisser porter par cet horizon du
proche, sentir comme se mêlent forme et profondeur, comme chaque lieu de la
présence accueille l’infini. Fermer les yeux pour que le ciel soit en nous,
l’arbre chante. * Enlacer Venir, sous les grands frênes, incrustant le ciel
des volutes de lumière de leurs fins feuillages, reprendre parole à la langue
des matins d'enfance, écouter le silence de l'eau paisible, là, au caché de
l'herbe, qui fait seuil dans l'ouvert sans borne du matin, le cri de la
tourterelle au dessin léger de la sève, l'aboiement dans la profondeur des
vergers, la respiration du grand corps murmurant de la terre, crissant
d'autant de voix qu'il est de chemins d'écoute dans cette nature partout
s'éveillant à sa présence. Voir comme derrière le rideau sombre des arbres
d'ici, s'illumine l'immensité d'écriture de la terre à nu, sous cette lumière
qui ne fait que caresser, exhumer de sa gangue de pénombre la chair de la
terre venue à maturité. Voir ce champ, berceau de la lumière, dans la douceur
d'un ultime éveil, y déchiffrer de sa main posée sur l'infini de l'instant ce
palimpseste à vif des anciens étés. Sentir comme les mots sont
proches, comme doucement, au fond de nous, le souffle s'en délie. Écrire
comme corbeau glissant sur la ligne des pierres, enlacer de lointain et
d'éphémère, refermer d'écrire le cercle de la présence. * Étreindre Venu sous les fronts d’hortensias blancs s’asseoir
aux tables moussues de la roche, tout près d’un bord du monde, là où l’éperon
ensoleillé tranche au sombre de la mer. Se laisser, silence de l’être, happer
par le tournoiement des cris d’oiseaux, sentir comme cela résonne loin en
soi, comme vent et soleil sculptent la présence, comme tout n’est qu’ombre
contre la lumière, œil qui nait du regard, oreille de l’écoute. Lentement
prendre corps de sa seule présence au monde, partager une naissance, l’éveil
d’un souffle, apparaître à cette clarté qui efface ; n’être plus le
chemin mais la crête, l’oiseau dans la main du vent, le lézard qui fait peau
des pierres. Rester là longtemps assis face à la mer, son ombre incrustant la
roche pour vigie. Se laisser embrasser par l’étendue, étreindre à longueur
d’être étreint. En cela agrandir le corps, devenir substance même du désir
d’étreindre, silence de toutes les voix ensemble, espace de tous les chemins
en un. Fermer les yeux pour que la lumière tremble. * ©Éric
Chassefière |
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Éric Chassefière a passé sa jeunesse
à Nîmes, et vit à Paris. Directeur de Recherche au CNRS, il est
astrophysicien, spécialiste de l’étude des planètes, et historien des
sciences à l’Observatoire de Paris. Il est l’auteur d’une quarantaine de
recueils parus chez : Yvelinédition, Encres
Vives, Rafael de Surtis, Editions de l’Atlantique,
Alcyone, Interventions à Haute Voix, La Porte, L’Harmattan,
Sémaphore (Quimperlé). Il a obtenu en 2015 le prix Giorgios
Sarantaris pour « Le peu qui reste d’ici »
(Rafael de Surtis), en 2021 le Grand Prix spécial
de la SPAF pour « Comme
une sève », et en 2022 le prix Xavier Grall
pour l’ensemble de son œuvre. Il a publié dans une trentaine de revues de
poésie. Il est membre du comité de lecture de la revue Interventions à Haute
Voix, chroniqueur régulier pour la revue Diérèse, et membre du comité de la
revue en ligne Francopolis. Il est régulièrement invité à donner des
lectures : Festival des Poésies Actuelles de Cordes-sur-Ciel, Festival
de la Parole Poétique de Quimperlé, Printemps des poètes à Chaville, Maison
de la Poésie de Poitiers,… Bibliographie Chez M25 : Microcosmes (1987) Aux Presses de Valmy : Paysage de la trace
[poèmes de 1998-1999] (2009), D’errante inquiète joie [poèmes de
1999-2002] (2009), Se peindre à d’autres nuits [poèmes de 2006-2007]
(2009) Chez Yvelinédition :
Camera Oscura (2009), L’incendie de la
parole (2009) Aux Editions de l’Atlantique, puis chez
Alcyone : Paysage sans nuit (2010), Le silence de l’arbre
entier (2010), Peint de noir (2011), La traversée du silence
(2012), Déambulations du sable (2016), Echos
du vent à ma fenêtre (2017), L’arbre chante (2021), La part
silencieuse (à paraître, 2023) Chez Rafael de Surtis :
Se rappeler pour être (2010), Sur un au-delà du corps (2011), Comme
est le chemin d’aujourd’hui (2011), Le vol du papillon, itinéraire
onirique, avec Catherine Bruneau (2013), Le peu qui reste d’ici
(2014), Ce regard qui nous vient du monde (2015), S’achèvent
murmurés (2017), Sentir (2021), La part d’aimer (2022) Chez Interventions à Haute Voix : Fragments
du dernier hiver, suivi de Je respire par le corps (2013) Chez La Porte : Sous l’eau des mûriers (2015) Chez L’Harmattan : La présence simple des choses (2017) Chez Sémaphore (Quimperlé) : L’arbre de
silence (2018), Présence du masque (2019), L’immédiat de vivre
(2020), Le jardin d’absence (2022) Chez Encres Vives/ collection Encres Vives : L’arbre
à nouveau fleurit (2009), Seule la lumière change (2011), Eric Chassefière, Itinéraire poétique (2013), Profonde
la lampe d’autrefois (2014), L’inaccessible ici (2016), Le
partage par la musique (2019), Moments poétiques (2021) Chez Encres Vives/ collection Lieu : Suite
taïwanaise (2011), Suite malgache (2012), Feu et glace
(2012), Carnet d’Inde (2013), Carnet de Corée (2014), Carnets
du Vietnam, avec Catherine Bruneau (2016), Chant du Péloponnèse,
avec Catherine Bruneau (2016), Le parfum du monde (Java) (2018) Chez Encres Vives/ collection Encres
Blanches : Jusqu’au bout de la vie, avec Catherine Bruneau (2015) Présence dans les anthologies - Parterre
verbal, Anthologie n°2, 2010. - Anthologie-
Tome 5, Visages de Poésie, Jacques Basse, Editions Rafael de Surtis, 2011. - Editions
de l’Atlantique, anthologie des auteurs, Encres Vives, N°429, 2014. -
Causeries au coin du poème, Editions FutureScan,
Volumes 3 (2018), 4 (2019) et 5 (2020). Présence dans les revues M25,
L’Arbre à Paroles, Verso, Poésie/Première, Décharge, Comme en Poésie, Friche,
Traction-Brabant, Pages Insulaires, Traversées, A l’Index, Fermentations, 7 à
dire, Interventions à Haute Voix, Verso, Les cahiers de la rue Ventura, Spered Gouez, L’Intranquille, Concerto pour marées et silence, Les Hommes
sans épaules, Saraswati, Voix d’Encre, Diérèse,
Florilège, ARPA, L’arbre parle, Mot à maux,
Francopolis, Terre à ciel, Sémaphore ... Prix
et nominations - Prix Xavier Grall 2022
pour l’ensemble de son œuvre. - Grand Prix spécial de la SPAF 2021 pour « Comme
une sève ». - Prix Gyorgos Sarantaris 2015 pour « Le peu qui reste d’ici ». - Finaliste Grand prix de poésie Joseph Delteil
2016 pour « Ce corps éphémère de
mots ». - Finaliste Prix PoésYvelines
des collégiens 2015 pour « Le peu
qui reste d’ici ». Pour mieux connaitre le poète et ses sources et
motivations intimes, lire son entretien avec Clara Regy
dans Terre
à ciel, réalisé en juin 2021 (avec aussi un groupage de poèmes, pour l’instant inédits, extrait du recueil Rêver l’aube). |
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Éric Chassefière Francopolis novembre-décembre 2022 |
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Créé
le 1 mars 2002