A
la mémoire de l’artiste
Dans le cercle privilégié des poètes
et artistes, Etienne Fatras était particulièrement bien apprécié. En
premier lieu pour son talent personnel et son inaltérable gentillesse, il
avait toujours un sourire, un propos sympathique pour les amis et confrères.
À plusieurs reprises il exposa à
l’espace Mompezat, siège de la Société des Poètes
Français. Ses expositions nous ont toujours apporté un souffle de
fraîcheur, sorte de bonheur presque innocent, car chacune de ses sculptures
contenait sa propre histoire, sa propre écriture.
N’oublions pas qu’Etienne Fatras
était également un poète taquinant la muse en entretenant toujours un lien
entre ses sculptures et ses poèmes. Chacune de ses œuvres avait l’intensité
d’un poème, d’ailleurs à ce propos c’est lui qui sculpta Érato, muse symbole
de la Société des Poètes français, mais nous lui devons également de beaux
bustes de Rimbaud, Verlaine, Villon, Baudelaire et bien d’autres œuvres qui
trônent sur les bureaux de quelques poètes et hommes de lettres, jusqu’en
Italie, terre de cœur qui influença beaucoup Etienne Fatras.

Etienne Fatras : Rimbaud

Etienne Fatras : Verlaine
L’ensemble de ses créations nous
invite à l’évasion en transgressant l’âpreté de ce monde par le miracle de
la beauté, le mystère de la féminité en faisait souvent la démonstration.

Etienne Fatras : Beauté
africaine

Etienne Fatras : Ma première
D’une rare modestie Etienne ne
chercha jamais à imposer son œuvre, mais préféra laisser le temps de
suggérer, de préserver la part du rêve, le langage des anges, de laisser
l’imagination s’épanouir. Seul dans son atelier, un peu comme un moine en
sa cellule, il aimait créer dans la contemplation, la sérénité, en écoutant
de la musique sacrée, chants grégoriens ou orthodoxes, à cet instant précis
son esprit se faisait monacal afin de mieux s’abîmer dans le travail, comme
une prière universelle : « Ora et labora » qu’il aurait voulu
laïque.
Avec beaucoup d’humilité, signe
distinctif d’Etienne Fatras, il était toujours dans ce dilemme du
questionnement existentiel ou spirituel. Tel un alchimiste ébloui Etienne
Fatras tentait la métamorphose de la vie, caressait l’énigme du temps.
Pygmalion n’était pas loin. Pour lui la sculpture était un acte d’amour,
une reliance avec l’existence.

Etienne Fatras : Le Méditant
Il était un sculpteur qui se faisait
médiateur de la parole. À sa façon il préludait le futur et œuvrait pour un
monde qu’il aurait voulu meilleur en lui donnant sens dans la protection
des siens. La famille ayant chez lui une valeur cardinale. Sous forme de
révérence symbolique, je lui laisserai la parole au travers de son poème et
sculpture : « L’arlequin »
Allez salut l’artiste !

Etienne Fatras : Arlequin et la
belle inconnue
Le
salut d’Arlequin
Certes c’est peu de chose
Un geste de la main
Un mouvement de la tête
Et même si j’ose
Une question indiscrète
Qui derrière ce masque
Cache ses frasques ?
Je sens son regard perçant
L’ironie de son sourire
Mais je ne saurais vous dire
S’il est bienveillant.
Lui-même existe-t-il vraiment
Sur ses jambes bien plantées,
Je ne vois plus son visage.
Rassurez-vous, ce n’est rien,
Vous, vous allez bien
Arlequin n’est que la mise en scène
De la fantaisie d’Étienne.
Étienne Fatras.
©Michel Bénard
Lauréat de l’Académie française.
Chevalier dans l’Ordre
des Arts et des Lettres.
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