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ARCHIVES FRANCO-SEMAILLES

 


Novembre-Décembre 2019

 

 

« Elle danse dans le brasier… »

 

Plainte pour l’embrasement de Notre-Dame de Paris,

par Camille Aubaude

 

 

 

Notre Dame de l’Heure, d’Alep, de Palmyre

Récompense divine de tendre Beauté, 

Notre Dame est Isis, fermement sanctifiée

Par la fraîcheur de Rome, la chaleur de Rio 

Un langage intérieur, délicat qui s’impose 

À la lisière des voix familières,

Couvre de prières les cruels maux

Vêtus du linceul des vices qui empoisonnent.

Notre Dame demeure en adoration.

 

Notre Dame de Paris aux splendeurs de génie

Tes cloches égrènent les tourments des peuples

Tintent l’heure du Bataclan, de Charlie

L’heure où Paris a résonné du glas de mort.

Qui se suicide, ne sachant courber le front ?

L’imbécile borné, l’inculte sans mystère

L’intrus plus qu’inepte qui viole et fanfaronne,

Quand le vent ride doucement le fleuve désert.

Notre Dame demeure en adoration.

 

Notre Dame sert de réclame aux touristes 

Quand travaux, bruit, impôts sont l’injuste lot

Des fidèles tranquilles de la haute nef

Qui siècle après siècle, telle un pur phénix 

Ressuscite après la détresse des désordres.

Les misérables colériques seront oubliés 

Oui ! ceux qui montrent la faconde d’un cuistre.

La Malcontente garde l’esprit rebelle et pur

Elle danse dans le brasier, plante les arcs 

Du chœur dans le fumier des infidèles.

Notre Dame demeure en adoration.

 

Ils passent. Sans recueillement ni dévotion

Alors qu’Elle chérit le sillage de la Seine

Notre longue Colombe dans la nuée sereine

Nourrissant les Heures de Paris sans passion.

 

 

***

 

 

Notre Dame est brûlée comme une Sorcière.

L’as-tu vue : Ame fantastique immergée, tellurique et céleste, au regard laconique de l’éternelle Nature naturante ?

Je ne peux contempler les cendres

Les passants photographient le bois calciné cette expansion, les golem, les frankestein et, l’âme archaïque, végétale, tellurique survivant biotope aux méandres sensoriels je suis allée rue de Bièvre, relier mes premières Paroles célestes qui embellissaient Saint Saturnin de Gentilly où coule la Bièvre polluée par les croyants incultes faiseurs de désastres, incendiaires pour imposer un livre inégalitaire. 

Le jour est gris. L’air est glacial. Dix jours après, les rues de l’île sont fermées aux voitures. Avant, ils faisaient des travaux au pont de l’Archevêché car les nouveaux barbares bétonnent, c’est convenu, ils sont rationnellement actifs…

Qui leur a montré l’Archevêché détruit à la Révolution, les arbres de la forêt en offrande aux oiseaux ? Pas les idodoles vénales et télévisuelles souillant la cause des enfants, les opposants à Notre Dame quand ne pas se reproduire est un signe de vitalité.

Quand Notre Dame est brûlée comme une Sorcière.

 

La logique des violeurs : abattre ce qui est plus grand que soi.

Jusqu’au XVIIIe siècle, l’or des Indiens entrait à Cadix. Notre Drame de Cadix est de ne plus briller, de ne plus rien promettre. Eteinte, Cadix ! pas de beauté sans âme sensible.

La brute chercheur d’or va débusquer les morts.

Les yeux de l’incendiaire suintent de convoitise. Au-dessus des déserts sursautent les petits humains qui grignotent leur prochain, pour qu’il n’y ait plus rien ceux dont les entrailles se drapent dans la mélancolie.

Quand Notre Dame est brûlée comme une Sorcière.

 

L’esprit invente la vie, s’il a la flamboyance, l’ardeur ancestrale, l’appel vigoureux qui libère Temps, le grand broyeur où le profond turquoise enserre l’or vivant. 

Ton Or à Toi 

la Foi

qui s’oppose au néant.

 

©Camille Aubaude

Poème extrait de

Plainte pour l’embrasement de Notre Dame de Paris

le 15 avril 2019, vers 19 heures,

publiée par La Maison des Pages éditions, Paris 2019

 

Les photos ci-dessous ont été prises le 16 avril, par Dana Shishmanian 

 

Avec ces textes sur Notre Dame, Camille Aubaude veut remonter aux origines mystiques de la poésie pour montrer ce qui résiste. 

Dans une société plus que jamais mutante, mais toujours peu favorable à la parole des femmes, Camille Aubaude enrichit ses poèmes de sa connaissance universitaire de l’œuvre de Gérard de Nerval. Ennemie de la destruction de toutes les formes du savoir, elle se réfère à une tradition ésotérique de la continuité, propre à la pensée de l’auteur des Filles du Feu. Ainsi, la cathédrale de Paris devient-t-elle un temple d’Isis dédié au culte de la lumière, et œuvrant pour une splendide unité.

Camille Aubaude s’attache à transcrire minutieusement épisodes et formes imaginaires se superposant à des paysages réels. Enrichi des légendes de l’Egypte ancienne, son voyage se dénoue, en définitive, par une quête d’elle-même. Tout voir et tout transcrire, par le symbolisme isiaque, de l’animal à la forêt obscure, du fantasme à l’autoportrait : voilà la mission qu’elle s’assigne.

Elle n’en poursuit pas moins une voie entièrement libre et singulière, avec l’obstination tenace d’un bâtisseur qui fait surgir un monument de ses chimères.

Nous avons avec bonheur publié des poèmes de Camille Aubaude et une ample présentation de sa personnalité et de son œuvre dans le Salon de lecture d’avril 2017, le lecteur est prié d’y aller, pour renouer avec cette autrice d’exception. (D.S.)

Dans le présent numéro de notre revue, à la rubrique Lectures, lire également l’essai de Camille Aubaude sur Nerval et la reconstitution de la tradition mythique isiaque.

 

 

 

Camille Aubaude,

recherche : Dana Shishmanian 

 

Francosemailles, Novembre-Décembre 2019

 

 

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Créé le 1 mars 2002

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