Articles sur les poètes
francophones contemporains |
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Mai-Juin 2021
Anne de
Commines : La poésie - une flamme lucide et permanente. Hommage à Simone Landry (*) Hélène Laffly, Éclosion (ou La rose du futur, dans l’album Un
devoir de mémoire à Hélène Laffly, 2018) |
Notre monde est hanté par le chaos. Science à consommer sur place vomie
par la bouche affolée des médias continus. Dans ces les jouissances
exténuantes quelle île du temps réserver à la poésie ? Quelles grâces
espérer pour les plumes qui se dressent et nous recueillent ? Comment
profiter un moment d’inattention pour ériger nos innocences héroïques et
rythmer la catastrophe à perpétuité ? La poésie de Simone Landry se dessine entre nos yeux et nos ombres. À
travers elle, nous aimons les chutes libres en ces idéaux soudain si proches.
Rivée aux vertiges le long de la matière qui s’évide, aux gestes solubles
dans l’air qui la prend, la poétesse nous tend une flamme lucide et
permanente. Elle demeure à jamais sensible à nos combustions inconsolées Dans
ce monde, Simone Landry prend soin des enfances violentées aux rêves échoués,
des prisonniers aux cris atrophiés par manque de souffle, au ciel lorsqu’il
oublie ses morts. Comme Rilke, la poétesse sait combien on ne voit bien qu’au prisme des larmes. Elle les tient au bord
de ses prières avant qu’elles ne se fanent. Sa plume demeure droite et
révélatrice, si insomniaque comme le sont les étoiles veilleuses. Son esprit
de contradiction, ses vifs engagements fendent nos habitus et réchauffent nos
dissidences. Avec elle nous rendons à nos solitudes leurs imperfections
appliquées et leurs habitacles. De sa voix insatiablement inflammable Simone
Landry nous alerte là où le monde nous réduit. ©Anne
de Commines |
Ci-dessous
une sélection de textes de Simone Landry (choix
Anne de Commines) J’avais reflété une fidélité vaine inversé les
courants interrompu l’élan en trame de vie la petite musique des appels
lointains organisait
l’espace en visions
évolutives. Apaisement des
erreurs et je me retrouve conciliable
d’idéal improvisant des
mélodies avec la terre-mère tête et bras levés en arabesque
d’existence. Le ténu de
l’instant s’échappe d’entre
les doigts et part en flèche. Demain sera
bientôt. Homme du devenir En ta plénitude Tu me diras L’histoire du bonheur Du visage souhaité L’été vorace des colères Actes non-accomplis Le retour se fera En soudaineté En orage des forces refusées. L’aile de l’ange Indiquait Le chemin du retour Et le reflet du pardon Dansait Dans le miroir. Extraits de Encore
quelques années à vivre, une éternité, Préface d’Anne de Commines, L’Harmattan, 2017 (collection Accent tonique –
Poésie) |
Simone
Landry (1930-2020) a été comédienne, journaliste et femme
d’action engagée auprès de l’ONU, poète (créatrice d’un prix de poésie
féminine). Nous l’avons accueillie dans notre numéro de mars-avril 2019, avec
une sélection de ses textes accompagnant les gravures de sa sœur jumelle,
Hélène Laffly, partie quelques années avant elle, à la rubrique Creaphonie, et avec un groupement de poèmes inédits
fraîchement composés, que j’ai moi-même eu le privilège de cueillir auprès
d’elle, au Salon
de lecture. Anne
de Commines – que nous avons accueillie avec
bonheur au précédent Salon
de lecture – a coordonné et préfacé le volume anthologique de Simone
Landry Encore
quelques années à vivre, une éternité, paru chez L’Harmattan en 2017. D.S. |
Anne de Commines
Hommage à Simone Landry
Francopolis, mai-juin 2021
Créé le 1 mars 2002