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Textes de l'atelier d'écriture
par
Philippe Vallet

Année 2009/2010

L’atelier d’écriture du Lycée Louis Lapicque existe depuis maintenant 6 ans.

Cette année encore je dois dire l’étonnement de cette continuité et la volonté de chacun à faire exister ce lieu de créations, de critiques, d’expérimentations, de partages, de réflexions, de découverte du monde de la littérature au sein d’un établissement scolaire.
Cette année encore l’étonnement et la détermination des adultes, animateurs, responsables et professeurs pour faire vivre cette expérience aux élèves.
L’étonnement devant la découverte du « je suis capable » des élèves qui ont la chance l’envie, la volonté de tenter, d’expérimenter, de découvrir l’écriture comme le chemin d’une expression personnelle de sa langue dans son quotidien, dans son apprentissage, dans sa vie. Et ainsi de passer de la peur de s’exposer ( la peur de faire, la peur d’être seul devant les mots)  à la confiance de dire devant un groupe son texte à peine écrit, à peine né : l’étonnement de ce pas vers la confiance en soi, l’étonnement est le regard.
Dans ce recueil, dans ce travail concrétisé de l’atelier, les textes s’inventent avec la joie de découvrir un monde neuf à chaque page. Le vivant est dans les mots. Ils traduisent à la fois notre rapport au monde et l’énergie que nous leur donnons. Écrire devient un levier pour prendre conscience, confiance dans notre pouvoir d’agir sur le monde, de le comprendre. Chaque mot emporte avec lui, pour nous, un éclat toujours changeant. Écrire est le pas de côté du clairvoyant. Écrire pose, expose dépose, repose le permanent de notre conscience. Une sorte de travail de fond, de mise en culture, de jardinage persistant, d’ensemencement constant.
L’atelier d’écriture est le travail de l’étonnement, celui d’être vivant et d’en prendre conscience dans le pouvoir de s’exprimer. Étonnement d’une confrontation où l’autre nous invite, une image attentive et chaleureuse.

Bonne lecture et à bientôt en atelier.

Philippe
animateur de l’atelier


Textes

Le jour, en ce matin d’octobre, s’attarde sur les branches languides et les feuilles froissées. On croirait qu’il veut mourir avec elles. Le ciel et sa grisaille écrasent les montagnes.
Il fait doux, cependant, très doux pour la saison.
Ce qui manque à ma vie, je l’oublie en marchant. Quelques fumées s’élèvent derrière les buissons et dessinent dans l’air des figures étranges, pareilles à celles qui remuent dans les tiroirs des souvenirs.
Bientôt, après m’être arrêté près d’une ancienne croix que l’on fleurit, même en hiver, ému, je me tiendrai devant la petite usine abandonnée dont l’horloge au-dessus de ce qui fut l’entrée des ouvriers, marque neuf heures dix-sept – depuis des années.

Richard Rognet
(Inédit)
Dommartin-lès-Remiremont
Octobre 2009

***


Dans la vie, un Atelier d’Écriture


Hier athée, aujourd’hui lecteur

Ainsi se crée la possibilité de devenir auteur, voire poète

Car écrire est un jeu, dont les règles se découvrent au fil du texte

Les lettres y sont tirées, reliées, étalées et élues

Puis transformées parfois en rire

Parler pour raconter, et cela sans tri de lecteur

Et défendre ses pensées avec un stylo

Étaler la terreur

Creuser pour que poussière et banal soient sens, spontanéité et esprit

Rigoler en inventant, mais surtout être vrai

Lecture et écriture sont les attelles reliant la rupture des mots

Enfin pouvoir dénoncer la traite de la laitue

Accepter l’art de tuer

Et hurler sur Tutur qui crie, étale son lard et rit

Ritale, athée, lecteur, quoi d’autre ?


Émilia


***


Atelier d'écriture

la musique de ma rue

me relie à ma culture

je m'évade de mes pensées

sans lutter pour me faire une cure

discuter avec eux à travers mes écrits

me donne des idées claires

et je m'imagine un monde parfait

je me sens hâté de dénoncer

les maux sur mon culte

mais mon fond est clair

je rêve de décrire le monde et de

partager mes pensées

lire pour apprendre c'est montrer

l'originalité de l'écriture et sa perfection

réécrire sans cesse me permet de partager

ma joie


Yves


***

La pudeur de l’élégance

La cécité des étoiles

N’est que l’inscription

Fanée des anges.


La rivière de l’amertume

Reflète les vertus

Des fraises et des orties


La profondeur de nos chimères

Nous permet de mieux résister

À toutes ces roses entassées.


Cette promenade audacieuse,

Au cœur du temps,

Embrasse ton absence.


J’affronte tes regrets.

Personne ne me voit.

Personne ne m’entend.


Les étoiles n’ont aucune profondeur d’espoir,

Elles griffonnent et gribouillent

L’ombre de ton amour.


Marine


***

 

La route est blanche

Un sentiment de mal-être m'englobe

Chuchotements oppressements clignotements
Parfums encres
Rires cris cliquetis
Claquements et grincements
Regards angoissants
Encerclée d'images

J'ai peur
Peur mystérieuse
Venue d'un rien
Joie amère
Rejoignant l'impossible

Chuchotements oppressements clignotements

Sentiment de déjà-vu
Parfums encres
Solitude face au bruit
Rires cris cliquetis
J'ouvre les yeux
Et tout est fini

Pauline

***

Pierre m'a déçu...

Pierre n'est pas un simple caillou
Non, il était bien plus que ça, Pierre
Il m'a volé, Pierre m'a volé mon ombre
Ombre volée Pierre
Simple caillou capable de mentir
Pierre, protège ce qui va éclore
Éclore il va Pierre
Mentir menteur, Petit caillou simple pierre
Il vit en moi.
Il vit dans mon coeur de pierre
Aime-moi Pierre
Pierre, le poème
Le poème est l'amour
Amour réalisé du désir pierre
Petit caillou entend cela !
Pierre, je te supplie maintenant
Demeuré désir
Désir Pierre demeuré
Pierre mon ombre a volé
Mentir Pierre
Caillou dur
Simple pierre
Pierre, caillou dur il est
Pierre a menti
Pierre a trahi mais moi aimer Pierre

Marion


***

Ma chère Otarie,

Eh bien ! Que de chimères, que de chimères ! Cette blague-là ne m'a pas fait rire.
Je savais que c'était du chiquet. Lorsque j'ai vu ta ribambelle de cageots dans mon potager, j'ai aussitôt appelé Tristan et Stanislas. Ils ont pris l'auto et sont partis immédiatement de Paris. Je les attendais, je leur préparais une bonne chicorée avec patience quand soudain j'ai senti une affreuse odeur d'essence... Quelle malchance ! La voiture dans les conifères ! Ils ont roulé sur mes pensées ! Ils ont ruiné mes semences ! Bien heureusement eux n'ont rien. Sauf Tristan qui a cassé son alliance, une bague qui datait de l'époque celtique ! Et un escargot a péri, ma foi tant pis !

Pour nous remettre de nos émotions nous nous sommes remplis la panse de chipolatas. Quelle déchéance pour une fille comme moi qui n'aime que le risotto bien consistant (une recette qui nous vient de nos ancêtres ostrogoths. Étonnant non? Comme quoi, il n'y a pas que les ritals qui savent faire la pitance ! )

En tout cas, je ne te fais plus aucune concession. Tu es bonne concitoyenne, mais mon chemin ne converge pas vers le tien. Va donc retrouver ton alchimiste, moi je vais retrouver mon histoire, j'ai un contrôle sur l'Empire ottoman.

Rendez-vous sous l'archipel à 15h.

Constance

***


Notre Gouveromance

Je veux un état social actif, genre stratégie de Lisbonne ou modèle danois, un peu de flexibilité et beaucoup de créativité. Nous étions pourtant en projet. Responsabilisation et justice sociale étaient à l’ordre ! Mais maintenant, finie l’égalité des chances ! Il n’y avait plus que toi pour moi et moi pour toi. Ainsi on créa notre flexisécurité. Progressivement notre wordfare a détruit l’équilibre, ce fut l’économie sociale du marché. Exclusion de l’ordre social, finie l’équité. Le contrat vivre-ensemble a muté, faites place à tolérance zéro ! Entre inclusion et exclusion, on prône le blairisme. Échec de la conditionnalité des allocations, donc droits et devoirs exclus ! Peut-être reste-t-il quelques droits acquis mais où sont les devoirs ? De revendication, nous sommes passés à révolte, puis à guerre. Chaque peuple meurtri, notre gouveromance fut finie.

Force et puissance

Les lucioles luminescentes brillent en silence. L’aurore arrive, et le spectre d’une journée s’installe. Les derniers souffles se font entendre. Leurs corps gisaient là, au milieu du fleuve. Nez, crânes, minuscules têtes humaines phosphorescentes, tout est soumis à la moquette, chose effrayante. C’était le premier amour, gracieux et fantaisiste, mais étrange aussi. Maintenant elles sont seules, torturées par le néon vert. Le soleil étincelant éclate dans l’espace. Une déesse de marbre, une Vénus de cristal, luit et veille à présent sur elles. Le profond abîme creuse leur vie. Elles ne sont plus que braises attractives et éclats flambants. Ces insignifiantes femmes bercées d’ardentes illusions abordent les mystères de la lune. Avec force, elles sombrent, l’enfer n’est pas loin. Elles remontent, les voilà dans la malle des nébuleuses. La dureté du regard s’adoucit, c’est l’œuvre d’un rire. L’eau en devient rose, la lumière, fantasque. Sur un temps d’arrêt, la mort si attractive les emporte. Deux saintes sont nées 

Émilia


***

Ma voix se tait
Je m'en vais
Ton coeur plein de vie meurt
Alors je m'en vais
Tu te blottis dans un coin
Et je m'en vais
Vers des collines
Vers des pays inconnus
Je m'en vais


Le ciel s'enfonce de plus en plus dans l'ombre
Et je m'enfonce dans les bois sombres
Tu me regardes de loin avec mépris
Cet amour entre toi et moi est simple comme une chanson
Mais je m'en vais
même si je ne sais où aller
Je regarde ton visage une dernière fois dans la nuit
Alors des heures de rêves passent
Enlacés, entremêlés
Ravir un baiser, ce baiser
Il fait bouillir notre sang et briller nos yeux
Je souris, amusée
Ce dernier instant de bonheur m'emplit le coeur
Mais quand la première étoile du soir disparaîtra
Je m'en irai

Marion


***
 

 

La plaie  

Bavard comme une pie. Menteur comme un politique. Roi de l’hypocrisie et de la rhétorique. Mon épaule sur la tienne te faisait gouverner mon cœur. Tu avais pris le pouvoir des sentiments et tu t’enfermais dans ta bulle. La liberté et l’égalité disparaissaient et laissaient place à une monarchie absolue. L’abolition de tous mes privilèges faisait monter en moi une certaine révolte. Révolte qui voulait faire pression sur toi. Je voulais te pressuriser, t’envoyer une balle pour te faire tomber de ton piédestal. C’est un rêve. Un rêve où l’avenir sans toi est plus rose, plus serein et où repose une relique de toi, à Athènes, comme dans l’Ancien Temps. Une photo de nous se  trouve désormais en paix, là où la pluie et le public ne peuvent l’atteindre.
C’est une relique épique qui enfonce chaque jour le couteau dans la plaie.

Marine


***


Maternelle

pleine de compassion et d'émotion
cet ange donne toujours ce qu'il y a de mieux
bâtie comme une guerrière elle déploie
ses armes à l'occasion
derrière sa lumière chaleureuse
se cache l'ombre des pensées
miroir de la bonté et du savoir
elle n'a jamais cessé d'être là pour chacune
des minuscules têtes humaines
peu importe le temps qui passe
cette eau de rose veut conserver le présent
et le reflet de la joie

Yves


***







Black dream

De vieilles connaissances, cachées dans mon chapeau de souvenir

It's Over...

J'ai crayonné les murs of this black world, pour enfin un peu me dépayser

It's over...

Cherche pas à comprendre, caresse les mots et fais la paix avec ton mal de vie

It's over...

C'est demain, c'est ailleurs, dans cette journée perdue que nous marcherons de travers

It's over...

Dans ce tiroir scellé, mes souvenirs parfumés à la vanille, à jamais sont bloqués

It's over...

Des chansons comme des faux soleils me rappellent un bouquet de pensées

It's over...

Quand rien n'attend plus, pleurer d'eau ou de sang ne change rien

It's over...

Un homme qui ne reviendra pas tout ça parce que l'amour a pris le bord sur le Titanic

This black dream is over!


Marion 

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textes tirés du receuil
Poético
Scriptique

"libérez vos crustacés syntaxiques"
2009-2010



 

atelier d'écriture
par Philippe Vallet
pour Francopolis octobre 2010

Créé le 1 mars 2002

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