D'une langue à l'autre...
et textes
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ou comme prétexte. Traduction.

 

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Archives : D'une langue à L'autre

 

D’une langue à l’autre…

Janvier-février 2022

 

Lea Nagy :

Trois poèmes traduits du hongrois

 

(*)

 

 

Da Cruz, graffiti Paris 19e (photo Dana Shishmanian)

 

Pile

dans un long manteau brun.

à neuf heures quarante pile.

tu m’attends sur le parking, comme toujours.

j’entre dans ta voiture.

tu m’offres une cigarette.

ta main tremble.

tu trembles.

à neuf heures cinquante pile.

j’accepte.

et on démarre.

 

 

Les furieux et les fous

nous n’avons plus d’air

la pression est trop grande

je te dis de le faire

encore

roule plus vite

dépasse-le

un vacuum

espace vide

à peine sentons-nous le bout de nos doigts

seul l’engourdissement sur nos lèvres

nous courons furieux

comme des fous engourdis

le sifflement furieux du téléphone

comme une douleur de machine  hurlante

résonnements lointains dans l’oreille

le goût du sang

souvenirs d’un piano et d’une cabine suffocante

le sang sur les draps

qu’en circulant à travers les feuilles tombantes des arbres

notre niveau de sérotonine va dans la même direction

que ce qui est sur toi

y compris ta peau ne m’interpelle même pas

pourtant ce n’est qu’à travers cela que tu sens quand je te tâte

qu’en même temps dieu existe

et n’existe pas

que l’homme n’est plus du tout un animal

mais quand même

que les animaux sont furieux

et fous.

 

 

Le piano

Dans ton salon il y avait
un piano couleur os.

Dans l’ennui nous appuyions
sur une touche.

Nous chantonnions en plus.

Tu te souviens?

Tu sais, juste pour que
quelque chose remplisse ton

appartement loué à Buda,

recouvre son silence moisi.

À l’époque nous étions

encore beaux tous les deux.

C’était l’automne.

Je te voyais de moins
en moins.

Je n’arrivais pas à dormir.

Maintenant non plus.

 

 

En français par ©Lea Kovács

 

(*)

Lea NAGY est une poétesse hongroise née en 2000 à Budapest. Elle a publié deux recueils Kõhullás et Légörvény aux Editions Napkút à Budapest. Elle a été lauréate du prix du meilleur « jeune poète hongrois » en 2018.

Un troisième recueil est en cours de préparation en hongrois, ainsi qu’un premier recueil en langue française aux Editions du Cygne.

Ces trois poèmes ont été publiés, en la traduction française de Lea Kovács et en espagnol par Maggy Coster, dans la revue en ligne Le Pan poétique des muses (13 janvier 2022), et sur le site Le manoir des poètes ; et en portugais/brésilien, en la traduction de Floriano Martins, dans la revue Acrobata. Nous reproduisons ici uniquement la version française, en suivant le site belge Les belles phrases (12 janvier 2022).

 

 


Lea Nagy

 

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