Pile
dans un long manteau brun.
à neuf heures quarante pile.
tu m’attends sur le parking, comme
toujours.
j’entre dans ta voiture.
tu m’offres une cigarette.
ta main tremble.
tu trembles.
à neuf heures cinquante pile.
j’accepte.
et on démarre.
Les furieux et les fous
nous n’avons plus d’air
la pression est trop grande
je te dis de le faire
encore
roule plus vite
dépasse-le
un vacuum
espace vide
à peine sentons-nous le bout de nos
doigts
seul l’engourdissement sur nos
lèvres
nous courons furieux
comme des fous engourdis
le sifflement furieux du téléphone
comme une douleur de machine hurlante
résonnements lointains dans
l’oreille
le goût du sang
souvenirs d’un piano et d’une
cabine suffocante
le sang sur les draps
qu’en circulant à travers les
feuilles tombantes des arbres
notre niveau de sérotonine va dans
la même direction
que ce qui est sur toi
y compris ta peau ne m’interpelle
même pas
pourtant ce n’est qu’à travers cela
que tu sens quand je te tâte
qu’en même temps dieu existe
et n’existe pas
que l’homme n’est plus du tout un
animal
mais quand même
que les animaux sont furieux
et fous.
Le piano
Dans ton salon il y avait
un piano couleur os.
Dans l’ennui nous appuyions
sur une touche.
Nous chantonnions en plus.
Tu te souviens?
Tu sais, juste pour que
quelque chose remplisse ton
appartement loué à Buda,
recouvre son silence moisi.
À l’époque nous étions
encore beaux tous les deux.
C’était l’automne.
Je te voyais de moins
en moins.
Je n’arrivais pas à dormir.
Maintenant non plus.
En
français par ©Lea Kovács
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