Il n’y a plus guère de mots
dans le filet des pages
mais l’horreur de la chair nous quitte
comme les corps passent
chargés de coups, propagande et mystère
d’enfants qui tombent à l’infini
pour que rien jamais ne s’arrête
même leurs nuits l’un sans l’autre
et je me retrouve dans le rêve cliquetant
loin de là
(car l’on doit déjà retourner dans ma forêt)
Plutôt s’évanouir que de vivre ces airs ces feux de tourbe
tomber raide morts sur la douche pendant que tu tousses
mais les années passent bien dans nos cheveux
on se vide et on se coiffe au creux des draps
avec le plus petit soupçon d’humour

Par une nuit d’été
pas d’air
tout juste de quoi relever un peu la tête
et si je regarde
là où nul n’est censé le faire
je peux m’imaginer
(doucement, comme du bout des doigts)
une framée dans le poing, fouiller les fougères de la hampe
et les bourrasques filent sur les flancs des collines
tranchent efficacement le silence
puis retombent et chantent en canon
les délices des mortels et leur fardeau et leurs dons
"Je porterai un iris accroché au pommeau de la selle
un iris et un loup mort jeté sur les genoux
dans un univers sans bruit
j’effacerai les traces des sabots"
Je les vois maintenant tous
dans la lumière qui filtre dans le sous-bois
depuis le cœur stérile des clairières
Ils retournent chez eux
ne veulent plus voir le passage des moissons
et foudroient les cils

A présent il fait complètement noir
mais pas dehors
Des passants allument des chandelles comme ils peuvent
pour donner dans un grandiose dérisoire
au risque de railler Mère Nuit
comme si le monde ne devait être
ombres et poussières

Qu’est-ce qui ruisselle sur ce crâne
des cheveux si bien dressés que la nature
n’y est sans doute pour rien
Attention à la lumière
ce lieu maudit (que tout souffle exaspère)
file vite autour des dents.

***

---------- >  Kapo

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