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Sélection novembre-décembre 2018

 

Anouk JOURNO

 

Le passager

 

Tu m'as suivie jusqu'à la voiture, confiant, lent, doux,

Tu le savais peut-être

Ou pas

Comme souvent ces derniers temps, j'ai dû t'aider

Te hisser soulever caresser

Je t'aimais tant

 

A l'avant, côté passager,

Tu t'es affalé

Ton regard voilé

Vers moi s'est tourné

Peut-être

Ou pas

 

Je t'ai gratté le crâne, confiante, lente, douce,

Emmené dans ce lieu d'où tu ne reviendrais jamais,

Tu le sentais peut-être

Ou pas

 

De petits gâteaux le trajet fut ponctué

Comme le Petit Poucet, tu sais,

Sorte de couronnement croquant

De nos années entre nous.

Tu les as mangés avec appétit

Les yeux à moitié fermés, bercé par le ronronnement des fleurs

Ou par la langueur

Déjà en toi, l'envie d'un ailleurs d'où tu n'émergerais pas

Du moins pas sous cette forme-là, mais émietté, éparpillé

Dans une boîte dure et indifférente portant ton identité

Matricule ridicule et abstrait

Avant de te fondre au milieu des rigoles fertiles que je creuserai.

 

Tu m'as suivie jusqu'à la salle, confiant, lent, épuisé

Après plus de deux heures d'attente à mes pieds,

Tout contre moi, tranquille mais si fatigué,

Ton corps, ce lâche, ne voulait plus te porter sur les chemins constellés de brumes

Le long des champs emplis de longues herbes où tu aimais te glisser

Onduler le long des haies

Humer les fleurs les herbes les autres animaux la vie

Respirer toute cette vie

Avaler toute cette vie

Jouir de toute cette vie dans tes pattes tes longues griffes qui lacéraient parfois les étoiles

Trotter courir marcher t'asseoir te rouler te déplier sauter dévorer ta gamelle

La poubelle

Les assiettes sales

Les mouchoirs en papier

Les boulettes d'aluminium au risque d'en mourir

 

Peu à peu l'énergie a quitté ton grand corps solide - crémeux devant mes yeux

Alors que ta tête, elle, réclamait encore encore encore des biscuits gâteaux vaisselle à lécher

Encore la veille au soir

Et même le dernier matin

Ta promenade chaotique, le regard un peu opaque,

Cahin-caha vers moi, muscles erratiques,

Tu n'entendais plus rien, tu me détectais au son de mes mains

Je tapotais sur mes cuisses, t'appelais, t'enlaçais de mes deux bras.

 

Et voilà,

Samedi 11 août,

Ton arrière-train s'est écroulé

Je n'ai plus jamais pu te relever

Tes yeux semblaient me supplier, j'ai peut-être rêvé

Ou pas

 

J'espère avoir su t'écouter,

Ne pas m'être trompée,

Maintenant ? Avant ? Plus tard ? Quand ?

Décider qu'il est l'heure

Déterminer le moment de la piqûre

Après ce trajet en voiture,

Ma main sur ton large crâne

Toi si confiant

Moi si malheureuse

Bon sang, ces mots sont pathétiques.

 

Je suis restée avec toi jusqu'au bout,

Tout contre toi, par terre, mon buste sur ton dos,

Ta tête entre mes cuisses,

Ton museau tout chaud,

Ta respiration sifflante puis profonde

Ton souffle s'engouffrait en moi

Tes yeux bruns se sont enfoncés dans leurs orbites

 

Et soudain ce silence.

Définitif.

 

Bientôt

Dans le jardin que tu aimais plus que de raison

Tu sens, les pommes sur le gazon au fond,

Là, tu seras, près des bambous, des taupinières,

Ta nouvelle chaumière,

De nouveau, tu seras vif

 

 

Lac de toi

 

Au cœur des herbes folles

Nos songes s'enlacent s'envolent

Se goûtent

Et nos bouches murmurent

des fougères

A nos paupières

 

Et nos antres se mélangent

Familières

Du jour au lendemain

 

Le temps ?

Invention de l'humain

Cédant aux mornes vallées

 

Du creux de nos mains

Jaillit un ruisseau ailé

Laissons l'eau s'écouler

 

 

Le pas

 

C'était ce jour-là, ton visage se liquéfia et pour autant, rien de toi ne s'échappa, au contraire, ce fut

comme l'aube d'une promesse d'amour pour toujours,

Le genre qu'on ne croit pas,

Le genre qu'on écrit pour gagner sa vie,

Mais c'est vrai, je l'ai vue ta folie, elle coulait et titubait sur l'herbe aride du jardin,

Personne n'y comprendra rien,

Tu as emporté ce secret des rivages,

soufflé les sanglots des enfances,

Tu as su aimer comme tu le voulais,

Éclusés des temps de Carthage

Où seuls des yeux noirs comptaient,

C'était ce jour-là, et tu le savais, gelé déjà

Mais brûlant à jamais.

 

 

Décor de chair

 

Les bulles de roches

Implosent en voûtes folles

Synapses chaotiques

Claquemurant peu à peu la parole

 

Le silence du sang  

Nourrit pourtant encore

Les pores vacillant

Des corps électriques

 

Dedans

Rondes de sons

Caquetant en dômes douleurs

Veines surpeuplées

Dehors  

Frémissements et débords

Pas à pas déconnectés 

 

 

Cônes

 

Cueillir le grain

En un mot

 

Se rit plutôt

Ses épis caressent

La peau 

Sentir le vivant 

Et le divin qui ment

En nous

En toi

 

Se pend plutôt

Son pollen s'enfuit

La chair

Pique et blesse

Et les paroles crissent

En nous

En toi

 

Se tait plutôt

Ta voix n'est plus

Inspirer muer

Expirer la guerre

Les larmes d'hier 
En eux
Sans nous

 

Cueillir le grain 

En un mot

 

 

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Créé le 1 mars 2002

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