Ou les mots cessent de faire
la tête et revêtent un visage. |
|
|
|
GUEULE DE MOTS
Été
2025
Libre parole à la Palestine Poésie&Témoignages(sélection : Dana Shishmanian) Peinture de Wadeei Khaled Présentée à l’exposition The Sky Above Gaza… Imagine (18 Sept.- 7 nov. 2024), organisée par Al Markhiya Gallery en collaboration avec Qatar Red Crescent, réunissant environ 50 artistes de Palestine et du monde arabe. |
|
POÉSIE :Tawfik
Ziad ; Ziad Medoukh ; Azeddine
Lotfi ; Jihad Alghoul Tawfik ZiadTawfik Ziad (1929-1996 ; pour sa biographie voir sur Wikipedia-fr et Wikipedia-angl) était maire de Nazareth (la plus grande ville palestinienne à l'intérieur des frontières d'Israël de 1948), quand il a appelé à la grève générale le 30 mars 1976, une grève presque totale, à laquelle l'État israélien a réagi avec férocité. Le 30 mars est devenu un jour de commémoration annuelle de la lutte contre l'occupation israélienne. Ci-dessous deux poèmes traduits par Jalel El Gharbi (cf. sa page Facebook, 25-04-2024) Dessin de Tawfik Ziad (reproduit de la page Facebook de Jalel El Gharbi) Un million de soleils dans mon sang...On m’a privé d’eau, d’huile, Du sel de mes galettes, Des rayons du soleil, De la mer, Du goût du savoir, Et d’un amour parti il y a vingt ans Que j’aimerais tant croiser une seconde On m’a dépouillé de tout Du seuil de la maison et des fleurs du balcon On m’a dépouillé de tout Excepté : De mon cœur De ma conscience Et de ma bouche Mon orgueil après qu’on m’a mis aux fers Est plus violent que toute la folie de leur brutalité Un million de soleils dans mon sang Défient les diverses obscurités Je franchis les sept cieux Grâce à ton amour Oh peuple des drames outranciers Car je suis ton enfant, né de ton sang Par mon cœur, Par ma conscience Et par ma bouche Nos mains sont bien fermes Et celle de l’oppresseur Si ferme qu’elle puisse paraître, Est toujours tremblante. Je donnerai la moitié de ma vie
Et je
donnerai la moitié de ma vie À celui
qui ferait rire un enfant en larmes Et l'autre
moitié pour protéger Une fleur
fraîche du péril *** Ziad MedoukhProfesseur de français dans les universités de Gaza, chercheur, formateur pour les jeunes de Gaza, poète et écrivain d’expression française, Ziad Medoukh est l’auteur de quatorze livres. Son huitième recueil de poésie, Poèmes d’espoir à Gaza la dévastée, édité en Suisse (Éditions de Rochefort, 33 poèmes, 108 p., novembre 2024) est arrivé à 1500 exemplaires vendus. Le commander auprès de Françoise Jaquet, présidente du collectif Action Palestine à Neuchâtel en Suisse, qui signe la préface du recueil. Voir, dans ce même numéro, le groupage de poèmes extrait de ce livre à la rubrique Vues de francophonie. En dépit des tragédies vécues (son frère assassiné avec sa femme et leurs cinq enfants, sa propre maison détruite), le poète témoigne de la volonté de toute une population de continuer à s'accrocher à la vie, de résister et d’exister sur ses terres, et de garder espoir pour un lendemain meilleur, fait de paix et de justice. Suivre sa page Facebook. Nous aimons les rosesNous aimons les roses Et davantage encore les blés A côté du parfum exquis de la rose La pureté de l'épi Gaza qui joue une triste mélodie Sur la guitare nostalgique Renaît de ses cendres Donne sens à la vie Et Met un baiser sur le front de la Palestine Gaza symbole de l'humanité porte l'espérance Gaza n'est pas un endroit sur une carte, mais un battement de cœur caché qui habite l'âme. C'est l'odeur du sol après la pluie. 7-05-2025 Photo reproduite de la page Facebook du poète (origine indéterminée) Je résiste dans la dignitéJe résiste dans la dignité Je résiste sur les montagnes hautes de Naplouse Je résiste dans la mer encerclée de Gaza Je résiste au pied de collines occupées de Ramallah Je résiste sur la terre sacrée de Jérusalem Je résiste sur la terre sainte de Bethlehem Je résiste en Palestine et pour la Palestine. Aux côtés des oliviers menacés de Jenin, je résiste ! Sur ma terre confisquée à Hébron, je résiste ! Près des rares orangeraies de Java, je résiste ! Prés des dattiers mûrs de Jéricho, je résiste ! Contre les colons illégaux, je résiste ! Contre les soldats agresseurs, je résiste ! Contre l’impunité des oppresseurs, je résiste ! Contre la terrible violence des occupants, je résiste ! Face à un usurpateur arrogant, je résiste ! Malgré le silence assourdissant Et malgré l’hypocrisie latente, je résiste ! En dépit de l’injustice, je résiste ! Je résiste pour la paix et je résiste en paix ! Par ma lutte pacifique, je résiste ! Par ma présence riche en humanité, je résiste ! Par une poésie engagée qui creuse son sillon, je résiste ! Avec la force de mon droit, je résiste ! Avec ma plume et mes vers, je résiste ! Avec mon existence sur ma terre, je résiste ! Avec ma persévérance et ma foi, je résiste ! Avec ma glaise d’amour et de tolérance, je résiste ! Avec l’arme indestructible de mon espoir, je résiste ! Pour une graine d’espérance, je résiste ! Pour une nuit magique, toujours lumineuse, je résiste ! Pour le courage de la mère d’un martyr qui sait pardonner, je résiste ! Pour le retour d’un réfugié, je résiste ! Pour une cause juste et noble, je résiste ! Pour créer de nouveaux horizons d’espérance, je résiste ! Pour que nos arbres grandissent où vivent leurs racines, je résiste ! Pour en finir avec le nuage de l’horreur qui planait sur la Palestine, je résiste ! Puisque ma patience est un génie, je résiste ! Puisque je suis soutenu par la bravoure des solidaires, je résiste ! Puisque mon sourire est plus puissant que leurs armes, je résiste ! Puisque les épées de la victoire brillent dans mes yeux, je résiste ! Puisque je suis attaché à la vie, je résiste ! Pour arrêter la machine infernale de cette occupation Qui continue de fustiger inlassablement, je résiste ! Pour allumer sans éclipse la lumière de notre avenir, je résiste ! Pour guérir les blessures et la douleur des années noires, je résiste ! Pour rendre leur sourire à nos enfants traumatisés, je résiste ! Pour effacer le désespoir de nos jeunes enfermés, je résiste ! Pour arrêter le génocide et les crimes arbitraires contre mon peuple, je résiste ! Pour la reconnaissance de nos droits légitimes, je résiste ! Pour que mon cri légitime contre l’injustice soit entendu, je résiste ! Pour un monde plus humain et plus humaniste, je résiste ! Dans la dignité, je résiste ! Loin de la haine, je résiste ! Pour l’humanité, je résiste ! Pour la vie et la paix, je résiste ! 2024 Tes oliviers qui poussent encoreAvec nos oliviers qui poussent toujours à Gaza Plantés et récoltés Génération après génération Nous attendons quelque chose de vrai D’authentiques jours meilleurs Pour notre avenir, Quelque chose de plus beau ! Gaza ouvre son cœur Avec une lutte, par un sourire Une dignité , un grand amour, Beaucoup d’espoir Elle persévère en des paroles pures Gaza tu poursuivras ton bonheur Avec tes oliviers qui poussent encore ! Février 2024 Nabil Anani – Gaza (2023). Présentée à l’exposition The Sky Above Gaza… Imagine (18 Sept.- 7 nov. 2024), organisée par Al Markhiya Gallery en collaboration avec Qatar Red Crescent, réunissant environ 50 artistes de Palestine et du monde arabe. Le vacarme des bombesLe vacarme des bombes continue à faire du bruit Dans le plus grand cimetière à ciel ouvert Ce bruit qui rend sourd la conscience Ne dites à personne ce qui vous fait si mal Ne criez pas votre indignation face à ce carnage Parce que le silence est meilleur dans la souffrance Marchez la tête haute Protégez vos enfants de la destruction et du fléau des bombardements Des enfants démembrés, des enfants anéantis Mais des enfants qui continuent de sourire Serez-les dans vos bras même cassés. Accrochez-vous à vos racines parmi les rochers de montagne et le thym Prenez l’ombre et la chaleur du soleil comme les abeilles de la fleur Restez éveillée même la nuit malgré la fatigue et l’afflux des douleurs Vous avez perdu votre maison, votre abri et votre soutien Mais jamais l’espoir Ne pleurez pas même si la douleur est intense Continuez à marcher même lorsque vous saignez Et que votre sang coule sur votre robe blanche pure Portez vos deux enfants comme s’ils étaient vos ailes Traversez les décombres entre les cris Vous êtes la dame de gloire et le mur de la patience Vous ne tomberez pas tant qu’il y aura de la vie Cherchez un beau souvenir entre les mots Vous sentez l’odeur du pain à l’aube de l’hiver Protégez la dignité d’un peuple opprimé Gardez une lueur d’espoir pour un avenir meilleur L’huile d’olive de Gaza aura toujours un goût de liberté. 23 avril 2025 Photo reproduite de la page Facebook du poète (origine indéterminée) *** Azeddine Lotfi(d’après
sa page Facebook)
À Ziad Medoukh. Même sous les bombes, elle marche. Elle porte ses enfants comme on porte l’espoir. Sa maison est en ruines, mais sa dignité tient debout. À Gaza, le silence est résistance, et l’huile d’olive a toujours le goût de la liberté. Sous les bombes, elle tient, elle crie sa vérité, Volée, meurtrie, mais jamais effacée. Contre l’oubli, nos voix sont des armes de combat, Palestine vivra, Palestine vaincra. 23 avril 2025 *** Jihad Alghoul(Textes
et peintures reproduits de sa page Facebook)
Do not block the morning light of the dreamers and
return after dusk in an eternal night. Fill your hearts with love and peace
for the sake of peace so that you may live in peace. Shake off the dust of
hypocrisy and see life and leave hatred and the darkness of your minds so
that you do not block and wish for peace. Ne bloquez pas la lumière matinale des rêveurs et revenez après le crépuscule dans une nuit éternelle. Remplissez vos cœurs d'amour et de paix pour le bien de la paix afin que vous viviez en paix. Secouez la poussière de l'hypocrisie et voyez la vie et laissez la haine et l'obscurité de vos esprits pour ne pas bloquer et souhaiter la paix. Voir beaucoup et ne rien avoir, c'est avoir des yeux riches et des mains pauvres. Le manque de pauvreté est la clé de la pauvreté. La faim se fiche du goût. Je dessine pour garder l'amour et la beauté éveillés dans mon cœur malgré les ténèbres de la réalité. Dessin sous l'ombre de la famine. Dessin reproduit de la page Facebook de l’artiste (3 mai 2025) We are tired, our country, hear our cry How long will we remain souls leaving life with the
time difference? Dessin reproduit de la page Facebook de l’artiste (23 avril 2025) |
|
Témoignages
Dr Saeed Mohammad Al-Kahlout, spécialiste en
santé mentale et écrivain
« Le
corps de ma sœur a été projeté dans une explosion. Il a survolé deux
immeubles et une rue. Son mari — qu’il repose en paix — a été retrouvé deux
jours plus tard, dans une ruelle voisine. (…) Les gens ont trouvé le corps
d’une femme, allongée tranquillement sur un lit… mais au cinquième étage de
l’immeuble voisin. Mais les explosions sont si fortes qu’on a
l’impression que les corps tentent de se sauver, sautant hors du feu, fuyant
l’enfer. L’air sent le sang, la chair brûlée et le fer fondu. »
(avril 2025). Ziad Medoukh, écrivain et professeur de
français
« Mardi
18 mars 2025, à l’aube, alors que les habitants dormaient, l’occupation a
entièrement rompu une trêve fragile et régulièrement violée, en bombardant
partout dans la bande de Gaza, provoquant la mort de 425 palestiniens dont
175 enfants et 95 femmes. La situation est toujours dramatique et tragique
pour les 2 400 000 Palestiniens de Gaza horrifiés et effrayés. Rien ne semble
changer même après l’entrée en vigueur de l’accord du cessez-le-feu depuis
deux mois, on attend toujours une solution politique. » « La
crise la plus grave c’est la pénurie d’eau potable. Avant l’agression, il y
avait 1230 puits d’eau qui fonctionnaient au carburant et grâce aux panneaux
solaires. L’occupation a détruit 990 puits. Il en reste environ 240 mais qui
ne fonctionnent qu’à 30 % de leur capacité à cause de la pénurie de carburant
et de panneaux solaires. » (le 25 mars, et le 6 avril). « Un
enfant palestinien de Gaza partage son repas modeste avec un chat. Malgré la
famine installée dans la bande de Gaza, cet enfant montre son humanisme et
donne à manger au chat. Bravo à ces enfants pour leur partager et leur
générosité dans une région dévastée et abandonnée. (30 avril 2025) Jihad Alghoul, artiste peintre et
poète
« Bonjour
de Gaza. Bonjour du cœur du conflit et de la guerre. Ne portez pas de roses,
je porte avec moi un collier des chagrins et des faiblesses du monde, afin
qu’une certaine paix s’épanouisse en nous. Je célèbre mon temps seul loin du
terrain et du climat de la vie ici alors je peins un peu de joie et de beauté
pour nourrir mon cœur fatigué. 24
mars : "Un groupe de colons vient de lyncher Hamdan Ballal,
coréalisateur de notre film No Other Land. Ils l’ont battu et il présente des
blessures à la tête et au ventre, qui saignent. Des soldats ont envahi
l’ambulance qui l’a emmené. Depuis, plus aucune nouvelle de lui" (le
journaliste israélien Yuval Abraham, coréalisateur du film oscarisé). 9 avril.
Allumé comme une torche lors du bombardement de la tente des journalistes à
Khan-Younès, dans la nuit de ce dimanche passé à lundi (6-7 avril), vers 2
heures du matin, le journaliste Ahmed Mansour est décédé. Deux de ses
collègues, dont Helmi Al-Faqaawi qui est décédé instantanément, ont également
été tués dans le même bombardement. Quatre autres journalistes sont blessés.
Ahmed Mansour et ses collègues travaillaient pour l’agence locale Palestine
Today. Avec eux, le nombre de journalistes palestiniens assassinés dans la
bande de Gaza depuis octobre 2023 s’élève à 212. 8 avril. Il y
a quelques instants, les forces israéliennes ont pris d’assaut l’Université
Al Qods à Abu Dis, en Cisjordanie occupée, lançant des grenades paralysantes
et des gaz lacrymogènes. 23 avril.
Voilà comment nos enfants sont brûlés en dormant dans les tentes des
déplacés... Pas de zones sûres, pas de survivants de ce génocide. La ville de
Gaza et son nord subissent des bombardements violents par les ceintures de
feu et l'artillerie israéliennes depuis des heures. 7 mai. Les
photos des écoles Abu Hamisa l'une des soirées les plus difficiles. Des dizaines
de blessés et de souffrants nous leur dirons au revoir sous peu au camp
Al-Brig. Les gens sont devenus sans-abri et leurs tentes ont été déchirées,
et les gens dont les enfants ont disparu maintenant. 12 mai. L'aide à l'obésité est entrée pour préparer un nouveau
jour d'abattage pour la population de Gaza. Puisque c'est
devenu une coordination et une communication avec l'Amérique et d'autres,
j'espère que vous apprendrez d'eux à apprécier un être humain et à l'appeler
ici au lieu de tuer, de blesser, de faire mourir de faim, etc. » Photo de Jihad Alghoul, sur sa
page Facebook.. La journaliste Islam N. Megda
« Voici
notre situation actuelle. Ils ont complètement occupé Rafah. Ils ont évacué
le nord et l’est de Beit Hanoun, Beit Lahiya, Jabaliya, Shujaiya, Khan
Younis. Partout des corps, des victimes carbonisés !!! Ils ont fait sauter
les maisons sur la tête de leurs occupants faisant des dizaines de morts. Ils
ont brûlé des gens vivants pendant leur sommeil dans des tentes. Des gens par
milliers dans les rues, dormant sans abri. De nouveaux missiles sismiques qui
brisent ce qui reste des gens et des pierres. La famine hante nos enfants.
Nous n’avons plus de farine. Nous manquons de linceuls. Il faut que ça
s’arrête. » (Dernier communiqué de la journaliste, datant du 6
avril, deux jours avant qu’elle ne soit tuée avec son enfant de 2 ans). Photo de Gaza, par Fatma Hassouna (d’après sa page FaceBook) Le journaliste Saleh Al-Natour
« J'ai
encore eu faim ce soir. Soudain,
vous avez l’impression que la paroi de votre estomac s’est collée et vous
ressentez de l’amertume dans votre gorge, comme si son jus avait atteint
votre bouche. Un
mal de tête sévère commencera au sommet de la tête ou provoquera une
sensation de vide autour du cerveau. Je ne sais pas comment le décrire. Lorsque
vous essayez de vous lever, vous vous sentirez étourdi et déséquilibré.
Rapidement, vous essayez de vous soutenir avec quelque chose et fermez les
yeux un moment. Ensuite, le sang tente à nouveau d’atteindre le cerveau. Vous
avez le temps de sortir et de chercher n'importe quoi, aussi simple soit-il, à
mettre dans votre corps et à atteindre votre estomac, afin que le corps
reçoive une indication temporaire et fausse que votre corps a commencé à
manger, brisant ainsi la crise de faim pendant un certain temps et vous
restez en attente de la prochaine crise de faim. Certaines
personnes ne parviennent pas à surmonter cela et tombent dans la rue ou dans
leurs tentes. Au
fil du temps, notre corps commence à se digérer et la masse musculaire
disparaît, nous laissant gravement épuisés. Si
le temps passe, nos organes vitaux commencent à s’effondrer, certains d’entre
nous souffrent de défaillances fonctionnelles et le corps commence à souffrir
de maladies, conduisant à une mort progressive. Le
terme « arme de la faim » n’est pas seulement une expression, c’est en
réalité une arme de meurtre à laquelle nous sommes exposés à chaque
heure. » (correspondance de Gaza
pour Al Araby, 8 mai 2025) Dessin de Ahmed Muhanna (d’après sa
page FaceBook, 4 juin 2025) Le Dr. Ezzideen Shehab
Doctor, sometimes a
writer. Revealing hidden stories, a voice for the unheard. Witness to
humanity's darkest depths. We were not silent. We were silenced. Message
posté sur X - @ezzingaza 12 juin 2025 : Il n'y
a plus d'internet. Aucun
signal. Aucun son. Aucun monde au-delà de cette cage. J'ai
marché trente minutes à travers les ruines et la poussière. Non pas en quête
d'évasion, mais pour un fragment de signal, juste assez pour murmurer : «
Nous sommes toujours en vie. » Ce
n’est pas parce que quelqu’un écoute, mais
parce que mourir sans être entendu est la mort définitive. Gaza
est désormais silencieuse. Non
pas par la paix, mais par l’effacement. Non
pas un silence calme, mais un silence étouffant. Ils
ont coupé le dernier câble. Aucun message
ne sera laissé. Aucune image ne sera affichée. Même
le chagrin a été interdit. Je
passais devant des cadavres d'immeubles, de maisons, d'hommes, certains
respirant, d'autres non. Tous
effacés par la même main qui a effacé nos voix. Il ne
s’agit pas seulement d’un siège de bombes. C’est
un siège de la mémoire : une guerre contre notre capacité à dire : « Nous
étions ici. » Les
bombardements n’ont jamais cessé, surtout à Jaballa. Ils
bombardent les rues où les enfants mendient de la nourriture. Ils
bombardent les files d'attente où les mères attendent la farine. Ils
bombardent la faim elle-même. Pas de
nourriture. Pas d'eau. Pas de sortie. Et
ceux qui essaient, ceux qui cherchent de l'aide, sont abattus. Des
gens meurent ici, et personne ne le sait. Non
pas parce que le meurtre s’est arrêté, mais parce que le meurtre de la
connexion a réussi. Internet
a été notre dernier souffle. Ce
n’était pas un luxe ; c’était la dernière preuve de notre humanité. Maintenant
c'est parti. Et
dans l’obscurité, ils massacrent sans conséquence. J'ai
trouvé ce faible signal eSIM comme un homme mourant trouve une lueur de
flamme. Je me
tenais sous un ciel brisé, risquant la mort, non pas pour être sauvé, mais
pour envoyer ceci. Un
seul message. Une
dernière résistance. Si
vous lisez ceci, rappelez-vous : nous
avons traversé le feu pour le dire. Nous
n’étions pas silencieux. Nous
avons été réduits au silence. Et
quand les câbles seront rétablis, la
vérité transparaîtra à travers les fils, et le monde
saura ce qu’il a choisi de ne pas voir. Dessin de Ahmed Muhanna (d’après sa
page FaceBook, 4 mai 2025) |
|
Présentation
des artistes
Wadeei Khaled est né dans le camp de réfugiés
d'Al-Arroub en 1986. Dès son plus jeune âge, les couleurs étaient devenues
ses compagnons de prédilection. Le premier jalon de sa carrière artistique a
eu lieu à l'âge de 13 ans, lorsqu'il a organisé une exposition à Al-Arroub.
Il a ensuite commencé à explorer les possibilités de peindre directement sur
les murs du camp. Wadeei a finalement obtenu une licence en beaux-arts à
l'Université Al-Quds et a depuis participé à de nombreuses expositions
locales et internationales (https://thisweekinpalestine.com/wadeei-khaled/).
Voir d’autres œuvres de l’artiste sur les sites suivants : https://www.latamarte.com/en/galleries/nU7W/ ;
https://zawyeh.net/wadei-khaled/; https://www.artsy.net/artist/wadei-khaled.
Pour ses nouvelles œuvres, voir sa page Facebook. Nabil Anani (n. 1943). Après des études à la
faculté des beaux-arts de l’Université d’Alexandrie, Anani est
retourné en Palestine pour commencer sa carrière d’artiste et enseignant à
l’école de formation de l’ONU à Ramallah. Sa première
exposition à Jérusalem a eu lieu en 1972 et depuis il a été exposé en Europe,
en Amérique du Nord, au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et au Japon. Il a
été nommé en 1998 à la tête de la Ligue des artistes palestiniens et a joué
un rôle clé dans la création de la première Académie internationale des arts en
Palestine. Son parcours, ses œuvres : voir sur wikipedia, dafbeirut.org, palestineposterproject.org. Jihad Alghoul : artiste peintre et poète, Gaza ; voir ses
textes et ses œuvres sur sa page Facebook. Ahmed Muhanna : artiste plasticien, Gaza,
titulaire d'une licence en beaux-arts de l'université Al-Aqsa (né en 1984 à
Deir Al-Balah). Pour son parcours artistique et ses participations à des
projets et expositions collectives à Gaza, voir sur le site artzonepalestine.net.
Pour ses dessins presque générés en temps réel voir sa page Facebook. Fatma Hassouna : la photojournaliste palestinienne
tuée, avec plusieurs membres de sa famille, par un missile israélien le 16
avril, a été victime d'un assassinat ciblé, a déclaré la réalisatrice
iranienne Sepideh Farsi lors de la présentation, au festival de Cannes, de son
documentaire sur la vie à Gaza, avec des videos et photos de Fatma Hassouna,
intitulé Put Your Soul on Your Hand and Walk (cf. france24.com). À la veille de sa mort, qui a suscité l’indignation
générale, Fatma venait justement d’apprendre que ce film serait présenté à
Cannes. Plus de 200 journalistes palestiniens ont été tués à Gaza par l’État
d’Israël. |
|
(*)
J’ai
glané ces poèmes, dessins, photographies ou peintures, et ces témoignages,
pour la plupart, sur Facebook, sur les pages des auteurs (le cas échéant) ou
de groupes d’amis des poètes et artistes palestiniens. Je remercie les
auteurs et artistes pour m’avoir permis de les reproduire dans Francopolis. Je
leur rajoute (voir ci-dessous) une œuvre d’une grande force qui dit tout sur
le massacre des innocents à Gaza : je la regarde comme la partition d’un
requiem pour les enfants martyrisés… (Selon l’appel SAVE
THE CHILDREN IN GAZA : plus de 18.000 enfants tués, 30.000
orphelins, 50.000 infirmes, amputés ou manchots, 800.000 traumatisés… Et
combien d’affamés, voire même de morts d’inanition ?…) (D.S.) Gaza vu aujourd’hui par Banksy, juin 2024 https://assoamani.com/gaza-vu-aujourdhui-par-banksy/ Voir aussi, pour le
même artiste: https://street-art-galerie.com/blogs/blog-street-art/banksy-en-palestine ; https://streetartutopia.com/2025/03/17/street-art-by-banksy-in-gaza-palestine/. |
|
Poètes, artistes et journalistes
palestiniens Francopolis – été 2025 Recherche : Dana
Shishmanian
|
Créé le 1er mars 2002