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Pieds des Mots : Archives

 

PIEDS DES MOTS

Où les mots quittent l'abstrait pour s'ancrer dans un lieu, un personnage, une rencontre, un objet de la nature ou de l’art...

Le principe des Pieds des mots est de nous partager l'âme d'un lieu, réel ou imaginaire, où votre cœur est ancré...

 

Mai-juin 2023

 

Jeannine Botella - Michel Racois :

Le site de Calès

 

Textes et dessins

(*)

 

 

Situé à Lamanon, à l’extrémité Est des Alpilles, le site de Calès est un cirque naturel creusé de grottes troglodytiques datant du néolithique. Le lieu, dominé par un château médiéval dont on peut encore voir les vestiges, a été ensuite habité au Moyen-Âge.

Ce qui suit est extrait d’une plaquette inspirée par ce site, et publiée en 2016, La mémoire de la pierre.

Les textes sont de Jeannine Botella, les dessins de Michel Racois.

 

Creuser, enfouir dans l’ornière, enterrer, oublier… Ou au contraire, marquer, imprimer, détacher, mettre en exergue en conférant du relief ; faut-il voir la trace ou privilégier le signe ?

Ce sillon, est-ce la marque infâmante du Temps ou la volonté d’interpeller, de chercher du sens, de conduire à une vérité qui ne peut s’effacer ?

 

 

 

 

 

Il est des portes ouvertes sur l’éternité. Les franchir, c’est entrer dans une autre dimension ou plutôt, c’est perdre toute dimension, abolir le Temps, l’Espace, se fondre dans la gravitation universelle, vertige d’une vision holistique.

 

 


 

 

Géométrie sérielle, froide, rigide, lignes fuyantes pour se rejoindre dans la cassure, la pierre donne à voir sa substance secrète, se résigne à réchauffer son âme mystérieuse aux jeux de la lumière, et fixe de ses trous noirs cet hybride jailli de terre qu’elle a vu s’élever au fil du temps, le pied figé, prisonnier de la terre et les membres libres, dansant au vent.

 

 


 

 

N’a-t-on pas dans l’obscurité dédaléenne de la grotte été confrontés à la réalité des peintures rupestres ? Une vérité certes limitée dans un temps et un espace, mais un éclairage certain. A contrario, même dans la ‘’lumière de la science’’, ne serions-nous pas leurrés comme les prisonniers de la caverne de Platon si nous fermions les yeux sur ces indices, ces signes, l’empreinte du passé, en un mot, les leçons de la pierre pour prévenir le futur ?

Introspection dans la mémoire humaine : trouver notre fil d’Ariane pour rebrousser chemin, garder une conscience intègre, indépendante, pour ne pas s’égarer dans le labyrinthe de l’illusion, et descendre dans le tréfonds de notre être pour se ‘’re-connaître’’.

 

 

 

 

Cellule carcérale ?

Inversion des champs de confinement et d’ouverture ?

Ou plus logiquement entailles pour supporter des structures annexes. Partout, la main de l’homme patiente, efficace, ingénieuse, domptant la roche, l’asservissant à ses besoins.

 

 

 

 

Cette grotte n’a pas fini de révéler son mystère…

Comme d’autres blocs erratiques du site de Calès, elle reste énigmatique. Creusée, gravée, elle témoigne de l’occupation humaine de ce site bien antérieure au Moyen Age. Grotte sacrificielle ? Lieu de culte solaire ou de foi chrétienne, quelles aspirations, quelles prières ou consolations ces initiés y venaient chercher ?

 

 

 

 

Le Temps semble s’éterniser ici : le même vertige du regard qui plonge dans cet à-pic depuis la nuit des temps, le même sentiment d’humilité et la même angoisse existentielle dans ce silence lourd, enveloppant…

Et soudain un éclair, la flèche vive d’un oiseau au-dessus de nos têtes ; sortir de l’emprise, lever enfin les yeux au ciel.

 

 

 

 

Dans quelles conjonctures, par quel hasard, dans ce site où le mâitre d’œuvre de cette unité architecturale est d’abord la nature, un esprit humain appose-t-il les normes de référence du nombre d’or ? L’opposition entre le naturel, la simplicité sauvage de l’ensemble et la composition complexe, réfléchie, érudite même de la figure géométrique surprend, interroge. A quelles fins ce travail fastidieux d’impresion à la broche ? Survivance d’une intelligence insolite en ces lieux ? Trace anachronique ?

 

 

 

 

Au Néolithique, dans un environnement encore vierge, l’Homme et la Pierre conjuguaient leurs destins : matrice protectrice contre tous les dangers et inspiratrice d’une vie quotidienne qui se sédentarisait, s’organisait, s’outillait, elle était la matière dont il tirait parti - en structurant sa pensée - mais certainement aussi, cette entité transcendantale qu’il respectait, la faisant dépositaire de sa mémoire, allant jusqu’à la vénérer.

 

 

 

 

© Jeannine Botella : textes

© Michel Racois : dessins

 

 

Domiciliée à Mallemort, dans les Bouches du Rhône, Jeannine Botella, ancienne professeur des écoles puis directrice, est aujourd’hui à la retraite. Elle est l’auteure de plusieurs recueils de poésie, d’un écrit mêlant contes et souvenirs, Les Pauses « tendresse », et d’un roman, Les fleurs de mai, primé par l’Académie Littéraire et Poétique de Provence.

Également peintre, elle anime un atelier et durant plusieurs années, elle a organisé le Salon international de peinture de Mallemort.

 

Né en 1947 à Dakar, Michel Racois vit et travaille à Lamanon. Il a été enseignant (mathématique) successivement en lycée, École Normale, et collège.

Peintre de la galerie Simone Boudet (Toulouse) de 1977 à 2000, de la galerie J.M. Cupillard (Grenoble) de 1979 à 2008, de la galerie G. Goubin (Salon-de-Provence) de 1995 à 2010, et présenté par la galerie ''Traces'' (Pernes-les-Fontaines), et les Ateliers Agora (Eyguières).

Ses « papiers froissés » (peintures) ont été accueillis à la rubrique Créaphonie de janvier-février 2022.

Comme écrivain, il nous a confié plusieurs de ses nouvelles qui ont été publiées dans Francopolis en janvier-février, mai-juin, novembre-décembre 2022, à la rubrique Suivre un auteur.

 

 

Jeannine Botella - Michel Racois

Francopolis, mai-juin 2023

Recherche Dana Shishmanian

 

 

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Créé le 1 mars 2002