Olivia Elias
Extraits de Point de suspension.

Gaza,
Palestine
Bleu
si bleu de Méditerranée noyé dans
nuages
noirs sursautés d’uranium & plutonium
paysage
frappé par astéroïde
cratères
d’une quinzaine de mètres hôpitaux
mi
hospices pour résidents de l’enfer
mi
mouroirs
& morgues
les médecins se cachent
pour
pleurer
ailleurs
pont
aérien & secours d’urgence accompagnés
de
grandes déclarations à propos de
"valeurs
universelles" comprendre :
Valant
pour tous sauf ceux ghettoïsés emmurés
Ici
ni
eau ni nourriture ni carburant & électricité
(&
pas de médicaments d’aucune sorte)
Ici
à
mains nues les hommes cherchent
dans
les décombres s’il reste des survivants
&
retirent de petits corps
Gaza,
Palestine
Plaie
saignante où aigles & monstres d’acier
ont
établi leurs quartiers de la Mort
rendre
la terre stérile effacer toute trace
de
culture & vergers
abattre
des arbres de famille plusieurs fois
centenaires
Ahmad
est parti (il y a soixante-quinze ans juché
sur
les épaules de son père il
parcourut la piste
des
larmes menant de Yaffa au sud
harcelés
par les soldats pillards)
Youssef
& Samir ses aînés aussi
avec
femmes enfants petits-enfants
tous
partis
Gaza,
Palestine
oasis heureuse avant
il
y a si longtemps avant
l’arrivée
de ceux venus
de
l’autre
côté de la mer
aujourd’hui
cimetière
d’enfants au bord de la Méditerranée
sur
les écrans du monde entier
agonise
l’Humanité
*
N’ai
rien vu de l’automne
n’ai
rien vu cette année
n’ai
pas vu l’automne se déployer
l’acacia
flamboyer les grues
s’envoler
n’ai
rien vu que bombes
&
encore plus de bombes sur Gaza
en
flammes
ni
eau, ni nourriture ni carburant & électricité
ni
acacia flamboyant ni grues en
partance
seulement
déluge phosphorique
avec
débordant au milieu de la folie
le
grand fleuve vivant aux bras multiples
des
enfants de Gaza
leurs
petits corps qui n’auront pas
eu le
temps
de grandir
leurs
rêves qui n’auront pas eu le
temps
de
fleurir
leurs
petits corps fleurs de sang
leurs
rêves envolés sur les airs du
vent
n’ai
rien vu de l’automne cette année
n’ai
pas dit adieu aux feuilles d’or
aux grues
dire
adieu adieu adieu à toute chose
comme
ils le font là-bas parents &
enfants
qui
se prennent dans les bras chaque nuit
&
se disent adieu avant de s’endormir
Peut-être
aurons-nous la chance d’être à nouveau réuni
dans
une autre vie une vie qui ne sera pas
ghettos
& bantoustans prisons bombes
&
extinction
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