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Une infographie
de Laurence de Sainte Maréville
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Présentation
de la sélection de textes de février
Par Isabelle Servant
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Bonjour à tous
et bienvenue encore une fois sur notre espace de lecture et d’images.
Mélange et ouverture, liens et diversité, nous
avons l’espoir à Francopolis de mettre notre grain de sable
de paix et de connaissances partagées dans un tourbillon
humain qui en manque parfois singulièrement.
Et en ces temps d'hiver et de froid dans notre francophonie
d'hémisphère Nord, nous vous présentons
donc une fournée en forme d'attisée, comme nos
amis et partenaires québecois pourraient aimer certainement.
Une attisée aux essences différentes: prose et langage
poétique mêlés de nouvelles et théâtre,
six auteurs venant de tous les coins de la terre !
Un grand merci à
tous, habitants francophones proches et lointains, de donner
toujours votre confiance et vos écrits à notre
site...
*
« Arbres par le travers
», d'Alain Freixe, est l'un de nos coups
de cœur, un ensemble de textes courts et visuels, «
passionné, cohérent, bien écrit, parlant,
animant l'inanimé, traversant l'apparent »,
dit Stéphane Méliade. «
ca donne envie d'écrire…ça chante, ça vrille
en dedans mais c'est plus grave que cela: dès que je suis
dans une écriture `juste', intelligente, `spirituelle' , c'est
comme si je pénétrais dans un endroit sacré,
à peine fais-je un pas, et tout ce qui m'environne devient
différent, je vis l'écriture, les images, les sons,
tout se devine, je suis dedans. », commente aussi Florence
Noël. Aussi, installez-vous dans l'assemblée, écoutez
le conteur, il parle de désir, il conte ses regards.
« Arriverais-je jusqu'à
ces mots, ces pierres où prendre appui pour me hisser
à hauteur de lisière? Là où les arbres
sont encore du jour ? Il me faut tes images. Et ce vent qu'elles
descellent dans les murs
de l'air. Ce vent qui les tient. Et les porte. »
Ce texte est
dédié au photographe Frédéric
Lefeuvre, dont vous pouvez également voir les images inspiratrices.
*
De l'autre côté
du monde vient la pièce de théâtre «
La nounou ».
Ecrivain et poète de Nouvelle Calédonie, Nicolas
Kurtovitch nous parle inlassablement avec sa sensibilité
particulière et chaude de relations humaines, de départ
de l'enfant, de séparation, de domination et de chagrin.
Un univers où l’enfant comprend tellement de choses :
« Enfant
Tu vois, tu vois j'ai tout compris.
Nounou
C'est bien. Nous les vieilles femmes mélanésiennes
on sait très bien comment s'occuper de vous, les petits
monstres blancs. On vous habille, on vous amène à
l'école, on marche avec vous sur la route, et tout et
tout.
Enfant
Pourquoi tu dis que je suis un monstre ?
Nounou
Mais non tu n'es pas un monstre, les monstres sont dans la forêt,
et ils sont pas pour vous. Toi tu es un petit homme qui comprend
tout.
Enfant
Oui, c'est ça. »
Un univers enfin où l’on souffre aussi terriblement du
manque :
« Oui j'ai mal au coeur,
tu as deviné, j'ai mal au coeur, j'ai mal partout, j'ai
mal dans les bras, j'ai mal dans les pieds, sur la poitrine,
dans ma tête, dans mes yeux. Tu vois jai mal très
mal aujourd'hui, c'est parce que tu es là tout contre moi. Mais
si tu n'étais pas là, si je ne devais pas m'occuper
de toi, j'aurai encore plus mal, j'irai me jeter dans un trou
jusqu'au fond de la terre et je ne ressortirai jamais. Peut-être
là-bas, tout au fond, je n'aurai plus mal au coeur. »
*
Chantal Cudel nous
fait battre le cœur d'une très étrange manière
avec « Takoum
», une nouvelle au long souffle.
« Là sa langue tâtait,
perplexe, la voûte en plastique dure et asséchante.
Il contemplait ses draps et les palpait avec la jouissance d'un
nageur qui goûte du regard et des sens, la mer où
il plonge. Il les lissait du plat de la main étendue en
aile d'oiseau, comme le bien être de renaître lui
lissait les traits. Tout souci s'aplanissait enfin, pour un répit
dont il ne souhaitait pas envisager les limites ».
Joë
Ferami confie qu'il s'est « laissé
embarqué dans cette histoire comme pour une navigation
dans une mer noire et opaque avec pour seule lumière l'opalescence
de quelques étoiles lointaines». Un monde qui
paraît obscur et hostile, et pourtant…
« L'objet pourrait -il échapper au contrôle
de l'homme? Fabriquant ses propres "neurones et synapses"? En
lui, "Takoum" jubilait, piaffait d'impatience. Ce monde lui semblait
le sien, ce monde futur trouvait un étrange écho
en lui, comme le chant d'une sirène dans un grand tunnel
noir, attirant, incontournable, angoissant, inconnu et rêvé.
Le regard à l'intérieur de lui même, il entrevit
comme une comète arrivant du fond d'un infini? Une autre
dimension? Un appel saisissant de la matière…Un passage
»
Bonne navigation
à tous dans l'univers de notre auteure…
xxxxxx
Voici ensuite un poème de Claire Cassagne,
« Instruments
», un texte effleuré d'élégance
et de spiritualité, Hélène Soris
en aime particulièrement « le bruit des doigts
qui glissent » et l'évocation perpétuelle
de la musique
« Et l'émotion
se répand
De tous les côtés, dans l'espace,
Comme une sphère d'or liquide
Sans le moindre son parasite
Dans le vide obscur et la nuit »
xxxxxx
Une voix qui
se parle « avec des mots de tous les jours, comme on
se parle à soi-même, comme on se déteste,
comme on se supporte, comme on se boulimise... avec humour, justesse,
sans apprêt littéraire, sans effets »,
dit Aaron de Najran…
« La semaine passée,
c'est le chien de la voisine du dessus qui avait fait ses besoins
sur mon paillasson, et elle est venue pour s'excuser. Je m'en
fichais complètement, à vrai dire, mais le temps
qu'elle me raconte ses histoires, avec la description détaillée
des problèmes rénaux de son animal en prime, et
le bain dans lequel j'avais prévu de me trancher les veines
était tout froid. Après, impossible de ravoir de
l'eau chaude, vu l'heure tardive, alors j'ai laissé tombé.
Suicidaire peut-être, mais douillette. »
C'est la voix
d'Antonella qui raconte, dans la nouvelle «Dérapages », combien
c'est incroyablement difficile de
mettre fin à ses jours, quand on a des voisins collants.
On dirait qu'ils le font exprès.
xxxxxx
Michèle Bresson nous donne deux poèmes
originaux et mouvementés, "Demain" et "Murmures nouveaux",
« une petite musique acide mais pas amère »,
un « constat de possible », quelque chose qui
nous emporte dans cet univers créé subitement.
« L'hologramme de l'épitaphe
Ponctuant notre histoire
Si singulier périple
Fébrilement vécu
Des dernières lignes
Avant un total oubli.
Ne dévoile pas
Ce qui nous a mesuré
De cet envol de mots
Et de vents contraires »
xxxxxx
« En Chine c'est bien connu, les filles sont fragiles.
Elles meurent jeunes. »
« A sa vue, initialement, son corps fut parcourue de frissons.
Depuis, son désir s'est exacerbé. Ses nuits sont
hantées par sa
silhouette. Des bras musclés entre lesquels, elle voudrait
se
blottir. Sentir leur protection. Un dos puissant ou s'appuyer
dans un
moment d'abandon. De dépit, elle secoue la tête.
Sa conscience lui
interdit de s'attarder plus longtemps. Un bouleversement qu'elle
ne
peut se permettre. A sa contemplation, elle s'arrache d'un geste
brusque. »
Trois nouvelles de Lise Arrelle terminent
cette sélection du mois de février. Cette auteure
québecoise extrêmement imaginative joue sans entrave
avec les personnifications, les suspense ou des propos très
forts et pourtant parlés comme de loin.
*
Et comme les
membres du comité aiment à vous accompagner de leurs
pages personnelles, voici une très belle suite de poèmes de
Florence Noël.
« On est toujours sans nouvelle
du soir
et c’est si peu à l’orée des visages »,
des vers qui
semblent immédiatement familiers comme des proches que
l’on rencontrerait au coin du feu lorsqu’ils désireraient,
une nuit, nous conter leurs voyages
Installez-vous
dans notre salon de lecture, et lisez ces mots extraits du recueil
« initiation au crépuscule » Bonne lecture
à tous, amis et visiteurs de Francopolis, et que la ronde
des paroles puisse se poursuivre longtemps, bien plus longtemps
que celle des folies et des haines…
« au-delà
il y aurait
un cri d'effraie l'herbe blanche
le corps de l'autre infini
une ronde de paroles
dehors autour de la maison
sans pouvoir entrer ni sortir
tandis que dans l'affouillement
de l'aube l'avancée des nuits
brille une lame étrangère
sans pouvoir entrer ni sortir »
(Jacques Dupin )
Isabelle
Servant - février 2003
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