Vos textes publiés ici après soumission au comité de poésie de francopolis.







 


 
 

 


Une infographie
de Laurence de Sainte Maréville

Présentation de la
sélection des textes
des mois de mai-juin

 

Par Florence Noël




Au joli mois de mai, la poésie nous prend par plaisir. 

Des personnalités fortes, marquées, des voix qui ont longuement parcouru des sentes de traverse, des itinéraires de tendresse ou des lieux sonores.
Quelques écritures travaillées qui nous viennent de France ou de Québec. Des chants plus que des textes
issus du Cameroun, et une prose pour la route, pour inviter davantage d’entre vous à nous envoyer vos
nouvelles ou vos récits.



*

Pour ouvrir le livre des échos, Patrick Joquel nous fait le plaisir de nous partager son transroubaudien
et nous initie par là aux semences du temps. Des arbres et paysages glanés à l’unique fenêtre de son
adolescence 
il va, collectionnant aussi les graines de ses voyages

avec le secret espoir
qu’une fois cloué par l’âge à mes balcons
je puisse garder le monde à hauteur de mes yeux 


Isabelle Servant est touchée par cet auteur qui lui donne aussi  l'impression de tenter l'aventure de l'hermétisme mais d'être si lié organiquement aux paysages, aux plantes et à la nature en général, que le sens nous en arrive quand même très vite.

Comment être surpris que l’auteur et professeur des écoles, qui a déjà rencontré tous nos questionnements
d’avant-naître et de naissances dans Perché sur ton planisphère, ne recueille pas notre émotion : c'est profond, vrai, très finement écrit et, au-delà de l'écriture, on sent un vrai regard et un travail humain. La grande classe.
On en sort un peu comme après qu'une personne chère nous ait ouvert son âme, on en sort nourri. Un poème-compagnon de route. Ciselé, vivant, juste
.  (Stéphane Méliade )

Dans mes jardinières germent à présent
des fleurs étonnantes
elles me dévisagent longuement

A ce jeu des regards
je cligne le premier des paupières 

Avec Hélène Soris, nous souhaitons donc la bienvenue en nos pages à cet  auteur qui déguste la vie , la
protège a conscience des plaisirs qu'elle offre et la chute ne déçoit en rien . Un poète en pleine maturité .



*

Karl Létourneau s’invite parmi nous, avec trois textes, sobres de forme et denses de contenu, des petits tableaux intérieurs qui ont séduit par leur  acuité, finesse et sensibilité. On le sent capable d'exprimer toutes les angoisses humaines, et aussi de remettre les choses perpétuellement en question, une sorte de révolte (Isabelle Servant) une révolte qui se manifeste par la mise en lumière des manques et des tangentes comme le dit bien Stéphane Méliade :  Un poète de l'évitement, du ratage, de l'esquive de l'abrutissement et de la lucidité. Ses textes sont des camisoles de faiblesse. Le parallèle avec Michaux est pertinent, sous réserve que l'auteur chemine encore
quelques années, pour exprimer aussi sa primalité et la joindre à sa précision
.

La chaise : texte qui marque par son thème apparemment anodin mais dont chaque phrase invite à une réévaluation du monde qui nous entoure, le monde des assis et des debout, des attentistes et des en mouvement, cherchant à comprendre les raisons de l'immobilité des autres. Ces autres qui finissent par lui donner l'envie de se rasseoir. C'est qu'il dérange leur ordre aveugle.  (Hélène Soris)

plus tard
positions révisées
je me lèverai peut-être
inquiet de mourir
je ferai un pas
au nom des assis 


Vers le flou  dont Juliette Schweisguth souligne combien ces mouvements mais surtout le ton employé
me font penser à certains textes de Michaux .

Des illuminations aussi, ,la phrase:

mourir est une longue distance à franchir éveillé

mériterait de figurer dans les aphorismes de Djalal-Din-Al-Rumi. ( Stéphane Méliade)

Et enfin,  Je sais des années  :

particulièrement émouvant ; celui-ci est le moins réussi formellement pour moi, et pourtant peut-être le plus émouvant.(Isabelle Servant)

Remarquez que je ne suis pas poète, mais plutôt quelqu'un qui s'amuse à écrire,  nous dit Karl, dans sa présentation, nous le remarquons, mais au lu de ces trois univers de poche, nous ne nous sentons pas
obligés de le croire !


*


Aujourd’hui veut qu’on soit bruyants, irradiants,
chargés d’ondes, pollueurs des trompes émotives.
Mitaines de tolérance, obtus sous la rengaine et le
crissement du quotidien, nous voulons qu’aujourd’hui
le ciel pleuve,
depuis ce plein champ d’organdi mousseux où Sotere
abandonne sa tâche et laisse les humains sottiser leur
retraite aux cieux 


Aziz Majhoub nous a tous séduit et étonné. Une écriture maîtrisée, pensée et imaginative,  fomentée dans un esprit qui puise à de nombres influences (voir la présentation de l’auteur) et qui ne laisse pas indifférent. Il ne fait pas partie des écritures tièdes , il semble qu’on y adhère ou qu’on se sente en dehors, qu’on entre dans la danse ou qu’on regarde le derviche tourneur vibrer en cercles. Un auteur que nous sommes très enchantés d’accueillir parmi nos pages avec L’air con   (un texte qui  décolle !  nous fait
remarquer Joë Ferami) et le gouleyant Un bon cri
bien senti 

J 'adore inconditionnellement,  nous dit Isabelle Servant, chaque mot, expression, phrase provoque images, sentiments, émotions, réflexions, à le lire je me rends compte que je ne résiste pas aux textes qui font à la fois
intervenir intelligence et sensible, réflexion et coup de cœur
.

Ces deux proses poétiques sont vraiment très bien écrites, tout est fluide et sans un mot en trop. Travail d'orfèvre sur les mots, on cueille des pépites qui nous cognent en dedans par la force de leur portée, et en plus, l'auteur dit quelque chose, exprime une révolte, cette écriture a une vraie portée, une harmonie, un rythme. la qualité est très soutenue, de bout en bout, y'a rien à redire à part : c'est du grand art, merci, encore ! (Juliette Schweisguth )

Un auteur certainement, mais pour lequel peut-être on aimerait quelque fois « une petite faille, une petite lézarde maladroite, une gambette qui boîte un peu, un grain de sable dans le manège, une tâche de rousseur sur la statue, une mouche dans le verre. (Stéphane Méliade)

*

Jean-Michel Niger nous vient pour sa part avec quatre petits textes, C’est peut-être toi,  Le tracé,
La cinquième saisonLa carte . Malgré parfois quelques pointes de préciosité, l’écriture plaît beaucoup et « au-delà de la somptueuse chorégraphie sonore, l'auteur descend de la scène et vient nous parler vraiment, d'épaule à épaule.(Stéphane Méliade )

Oui :

tout cela fragile, intense, danse dans l'instant
médusé
surtout, ne pas troubler l'or sursitaire des
interludes
la carte de crédit-coeur pourrait disparaître
avalée par le distributeur d'ombre
et la cécité bondir en masse
dans les rues orphelines
de nos baisers 


En effet, conclut Hélène Soris dans ses commentaires :
je lis en gardant un sourire aux lèvres. Cet auteur épicurien et sensuel semble s'amuser en diable!! 

Une écriture a deux facettes, donc, l'une sombre et mystérieuse, l'autre sophistiquée et élégante, les
deux étant courtes et sobres, cela fait un mélange très intéressant et prenant
(Isabelle Servant)

*

Des contrées camerounaises, Willy Touomi nous apporte une note d’ailleurs . Férocité dans la description de
la misère, il use tantôt de sensibilité tantôt de cet humour noir, sans mauvais jeu de mot, qui se mâche et qui se mastique, un humour de la parole, presque chantant ; un texte que l’on aimerait, tout comme demande à dieu  entendre dire par son auteur, ou par un diseur.

 Noël, c'est pour ceux qui ont de l'argent est un conte africain par la forme mais aussi universel par son contenu, mâtiné d’humour à la Jonathan Swift, une misère non pas mélo mais qui se regarde en face pour ce qu’elle est, un texte qui souligne, sourire en coin, et en cadence les injustices criantes du monde mais aussi ses paradoxes. Le texte semble viser la férocité joviale d'un Zao nous dit Stéphane Méliade, le chanteur béninois
d'"Ancien combattant" ('tout le monde cadavré ! ") Au début, on se dit que c'est naïf et que la forme n'est pas à la hauteur du fond. Toutefois, des passages nuancent cette impression, tel :

mais on n'a même pas eu un morceau de poulet.
ni même un bout de pain
pour savoir si on a encore des dents.
c'était Noël sans argent,
Noël au sous-sol. 


Lisez aussi  Demande à Dieu , dont Gertrude Millaire nous évoque la similitude avec quelques poésies des
femmes africaines et haïtiennes qu’elle a lues  et je sens cette même façon de dire si différente de la nôtre... et cette foi qu'ils ont... et comme pour moi la poésie n'est pas tant littéraire mais plus quelque chose qui vient des tripes... Alors cet auteur parle de ce qui l'habite. 

Demande à Dieu est un thème traditionnel dans tous les peuples exploités qu'ils soient indiens ou noirs (c'est souvent un thème de négro spirituel), insiste Yves Heurté, C'est d'ailleurs ici une chanson plus qu'un poème. 


*

Enfin en prose et grâce à une nouvelle, nous découvrons l’histoire d’une frustration ordinaire, emprise dans nos mots et maux de tous les jours avec  balade au bord de l’eau  d’Emmanuel Sabatie.


*

Ne quittez pas les sentes fleuries de mai sans avoir rendu visite au salon de lecture, où vous attendent encore les très percutantes images de la Guerre des Lords d’Aaron de Najran, une lecture qui dépoussière nos écrans et nos œillères,  une écriture trempée dans les objectifs des reporters de guerre et dont nous ne pouvons sortir indifférent.

Je vous y conduis par ces quelques mots de Michel Pleau (« Il arrive que le ciel te console » aux éditions Le loup de gouttière):


pour la dernière fois vivre tient lieu de hasard
un jour tu sortiras
prendre les rues lointaines de ton enfance

tu sauras les mots pour te rappeler à toi-même
les gestes de qui retrouve
une avalanche de clarté dans ses pas 


***

Florence Noel - mai 2003




 

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Créé le 1 mars 2002

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