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GUEULE DE MOTS -ARCHIVES 2010-2011
Jean-Pierre Lesieur - Serge Maisonnier - Juliette Clochelune... et plus |
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GUEULE DE MOTS
Cette
rubrique reprend vie en 2010 pour laisser LIBRE PAROLE À
UN AUTEUR...Où les mots cessent de faire la tête et revêtent un visage... libre de s'exprimer, de parler de lui, de son inspiration, de ses goûts littéraires, de son attachement à la poésie, de sa façon d'écrire, d'aborder les maisons d'éditions, de dessiner son avenir, nous parler de sa vie parallèle à l'écriture. etc.
C'est
avec grand plaisir que nous recevons ce mois-ci, Michel Ostertag, un
passionné de poésie et de vie ! La poésie, un gène ! La
poésie, c’est d’abord un gène reçu en
héritage de mon père, un gène
« non génétiquement modifié
»
avant de devenir un virus aux effets secondaires parfois
néfastes. En prime, du
même géniteur, une hugolâtrie fortement
prononcée. « Poésie,
attention
danger » dit le poète André Chenet. Il
a bigrement raison. On peut parler
ici de virus qui infiltre chaque cellule de votre chair, creuse des
sillons
dans les méandres du cerveau. À huit ans, j’ai
commencé à rêver, aux mots, au
choix et au rythme de ces mots, à leur musique. Fâcheuse
habitude qui ne m’a
jamais quittée. Ecrire des poèmes était pour moi
une obligation vitale. Dix
ans, douze ans… À quinze ans, ce fut l’explosion avec : Paroles de J. Prévert. Et là, la marmite
a sauté ! Rué sur une rame de papier, deux cents
pages de poèmes écrits à
la main, je n’avais pas de machine à écrire et qu’en
aurais-je fait, je n’aurais
pas su m’en servir ! Envoyé aussitôt aux
éditions Gallimard. Innocent que
j’étais ! Trois mois après, retour du colis, avec
une note toute
préparée : « notre programme
d’édition est saturé, nous ne pouvons
pas… » Ce n’est pas cela qui a freiné mon élan
poétique. Je n’ai pas vu
cette réponse comme un échec (j’avais dix-sept ans) mais
comme une mauvaise adéquation
entre les possibilités des maisons d’édition et mon
désir de me voir édité. La
poésie est un supplément de vie, mais pas la vie
réelle. L’âge
étant venu, il a fallu étudier sérieusement,
s‘orienter vers un métier. Ce fut
un métier de dessinateur dans les bureaux d’études. La
technique, aux antipodes
des rêves poétiques ! C’était aussi
l’époque de la jeunesse
triomphante : Sagan, Gérard Philipe, les chanteurs, SLC, la
société vouait
un culte à la jeunesse ; on reparlait de Raymond Radiguet
et son Diable au corps. Avec eux, c’était la
précocité, mon âge était le leur et mon
envie irrépressible de les imiter me motivait.
Je voulais écrire, je n’avais pas vingt ans, comme eux, pourquoi
aurais-je
attendu davantage ? Par
les circonstances de la vie, mes études avaient pris un tour
très particulier.
La semaine en province et le samedi à l’école, à
Paris. Ce qui me laissait
libre d’organiser ma vie comme je le souhaitais. La semaine, les
devoirs
réalisés, je pouvais laisser libre cours à ma vie
personnelle. À rêver, à
écrire, à me conforter dans ma bulle d’adolescent. Avec
des moments d’égarement,
d’abandon de la ligne tracée par les parents, de trop croire en
ses rêves cela
conduit à des ennuis. Le
décès brutal de mon père me projeta sans
ménagement dans la vie réelle. Avec
le recul, on constate que dans ces années-là, la
misère de la poésie était
totale : aucun débouché, nulle part. Seules
demeuraient les grandes
maisons d’édition dont certaines daignaient consacrer une toute
petite partie
de leur activité à la publication de la poésie.
Mais seulement pour les grands
noms de la poésie : Char, Bonnefoy, Eluard, Michaux, seuls
ceux-là avaient
droit de cité. Quant aux autres, les inconnus, ils
étaient remisés au silence. Après
dix ans de pratique de la technique, je voulais changer de voie,
apprendre
autre chose, m’exercer dans d’autres
domaines.
Je suis retourné à l’école, cette fois, au
niveau supérieur. Le Conservatoire
National des Arts et Métiers, le CNAM. Quatre années
d’études intensives (tout
en travaillant) Diplôme d’Etudes supérieur en
économie. Alors, j’ai pu changer de
voie, aller dans une activité qui me conviendrait mieux. Une
importante multinationale
américaine me proposa un poste d’études de marché
dans l’électronique grand
public : télévision, Hifi, audio : imaginer le
futur, connaître et
devancer les goûts des acheteurs, susciter de nouveaux
débouchés industriels :
autant de préoccupations qui me convenaient. Les nouvelles
technologies
faisaient florès. La venue du magnétoscope
révolutionna notre façon de regarder
la télévision et aussi de filmer. Passionné depuis
toujours de cinéma, d’abord
avec une caméra super 8, je passais à la caméra
Vhs. Je réalisais avec un
collègue de bureau un film de plus d’une demi-heure sur Paris
(mon sujet de
prédilection) dont le titre était Paris,
passé, présent, futur. C’était un concours
organisé par l’Hotel-de-Ville de
Paris. Nous fûmes lauréats. En plus d’un chèque
important, nous eûmes droit à
une réception dans les salons d’honneur, discours du maire et
cocktail
mémorable. Et
aussi l’écriture de nouvelles, de romans, (le centenaire de la
mort de Victor
Hugo enflamma mon esprit), certains de ces textes furent publiés
dans des
revues, mais pas la gloire pour autant. Vingt
ans ont passé. Avec la crise économique dans les
entreprises, la mise en
chômage ne put être évitée. Quelques
années avant la date habituelle de la retraite,
je me retrouvais libre de ma vie. Libre d’écouter en moi cette
frénésie de
faire tout ce que je n’avais pu mener auparavant. Peinture et aussi
reprise des
études dans des disciplines que je
voulais à tout prix approfondir : sociologie par une
maîtrise et surtout
un DEA d’histoire des techniques préparé conjointement
à Je
m’étais mis à la peinture. Je dévorais tout les
livres parus sur les grands
peintres contemporains. Je peignais avec force et volonté de
réussir. Ma
peinture fut appréciée et couronnée par une belle
exposition au Ministère de
l’Économie à Bercy. Je vendis même quelques toiles
qui me payèrent toiles et
tubes. J’étais immergé dans ce flot de couleurs. Les murs
de mon appartement se
couvraient de mes œuvres. Une autre expo suivit à la Mairie de
Vincennes, puis
d’autres encore. Je fis la connaissance d’autres peintres, sculpteurs,
un autre
monde étrange et particulier. Ma
vie se démultiplia le jour où j’achetais mon premier
ordinateur, un Amstrad. Je
pus enfin taper mes textes, les imprimer. Ma vie changeait. Puis
je découvris le Net avec toutes ses immenses
possibilités. Le Club des poètes de
J-P Rosnay accepta mes poèmes, les publia. Ensuite ce fut la
découverte du site www.ecrits-vains.net La
révélation.
Une équipe invisible, certes, mais présente. Je m’y suis
investi
totalement : poèmes, récits, nouvelles, compte-rendu
d’exposition, de
livres sortis récemment. Historien
de Paris depuis mon adolescence, j’imaginais une série de
balades parisiennes
où un oncle et son neveu, de rue en rue, raconteraient
l’histoire de Paris.
Trente-deux balades furent publiées (qu’on peut toujours lire sur le site), ce
qui m’offrit le plaisir de recevoir des mails du monde entier
d’étrangers
amoureux de la capitale qui m’écrivaient en me demandant des
détails sur tel ou
tel point de mon récit. Un Néo-Zélandais,
professeur de français venant avec
ses élèves à Paris, me demanda de venir les
rejoindre pour une balade de mon
choix avec eux tous. Ce fut De
mon côté, je fus lauréat du Centre Froissart avec
un recueil Loin du silence des étoiles. Puis,
aux Éditions
Poiêtês de Laurent Fels, ce fut Jalons,
suivi Brisures chez Michel Cosem. Plus
de dix ans, je fus actif au sein de ce site avec assiduité et
bonheur. On en célébra
les dix ans par une magnifique et imposante Anthologie (toujours
présente sur
le site, d’ailleurs) Ensuite,
une lassitude des dirigeants se fit jour : le
rythme était devenu difficile à garder, le
site perdit de sa vivacité. Je n’avais plus l’accueil que
j’avais connu
jusqu’alors. À cette même époque, je
découvrais le site francophile : www.francopolis.net
dirigé
magistralement par Gert Millaire de son Québec natal avec des
membres actifs disséminés
un peu partout dans le monde. Une belle équipe. Avec une
publication mensuelle
jamais démentie, ce qui est rare. Membre du Comité de
lecture, je vois avec
bonheur la belle santé de la poésie à travers une
production importante
d’ouvrages (souvent à compte d’éditeur) : des
équipes éditoriales motivées
chez un grand nombre de petites structures d’édition ; un
Marché de la poésie, place Saint-Sulpice
qui rassemble le monde de l’édition. Que du bonheur ! De
plus, la poésie a
porte ouverte en permanence au sein des Réseaux sociaux comme
Facebook, devenu
un support efficace pour la promotion et la vente d’ouvrages
poétiques. Sortie
d’un milieu restreint, il y a plusieurs décennies, voici la
poésie qui a pris
l’ampleur qu’elle mérite, qui s’entend se montre et c’est tant
mieux. Des
formes nouvelles d’expression se font jour, des noms sortent du lot, je
pense à
André Chenet, Eric Dubois, Laurence Bouvet : ils drainent
des lecteurs
assidus, ils vivifient cette terre fertile qu’est la poésie. Je
suis heureux de
voir tout cela et de prendre ma place
autour
d’eux autant qu’il est possible. Michel
Ostertag
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