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    poèmes inédits pour Francopolis   
      
     "  
    Chantal Atelin,
    Boîte n° 1 (ardoise, plomb, bois, 1996 ; 40 x 25
    cm) 
      
      
    Avant la nuit
    son silence 
    le
    bonheur de quelques mots 
    –
    juste ainsi pas autrement – 
      
    mis
    ensemble
      
    inactuels
    et neufs une 
    fenêtre
    ouverte aux anges équivoques 
    de
    l’inachevé 
    leurs
    ailes 
    rongées
    de lumière et d’ellipses 
    à
    l’horizon de la parole
      
    (octobre 2016)
      
    * 
      
     
     
    Quels que soient
    
    la
    route
    le passage 
    le nombre même des sceaux brisés 
      
    sans fin oui ce cheminement 
    à travers l’obscur 
      
    À l’écoute À l’écoute 
    Quels mots  
    dans le vent quel 
    souffle 
    pour  des
    choses à se lever 
    violentes 
    comme on broncherait sur une  
    pierre 
    et  
    masqués d’ombre et d’énigme 
    des hommes 
    dans un grand mouvement de sable 
    armés de lenteur et d’étoiles  
      
    À travers l’obscur  
    jusqu’à l’éclair peut-être 
      
    Mais après ? 
      
      
    * 
      
      
      
    Avant
    de franchir les portes 
    de la nuit 
    mère 
    maman ma mère il faut à présent – 
    après 
    sans mémoire ou brouillée 
    de tous les nuages 
    blessures 
    la vie ses flots cette 
    mer et houle 
    de sable ou douleur  – il faut 
    te reposer 
    dans le souffle tranquille 
    la musique 
    d’une (au hasard des dés jetés) berceuse 
    la tendresse 
    du tout petit enfant nouveau-né 
    qui scintille  
    étoile 
    bien plus haute 
    que l’oubli l’ombre  
    inconcevables 
    de la mort 
      
    15 juin 2016, en sympathie avec Eva-Maria B… 
      
    * 
     
      
    Chantal Atelin, Pli 22 (bois, résine, 2005, 27x 37x 8
    cm) 
     
     
    Une bête 
    et quelle autre  
    sinon un chien 
    dehors dans le noir la nuit qui  
    se met tout à coup à se plaindre  
    gémir hurler long  
    très fort 
      
    avec ce chien cette bête ou sinon  
    qui me dira  
    quoi ou qui 
      
    et puis ça  
    s’arrête et puis d’autres  
    hurlements comme ça 
    jusqu’au petit matin encore Encore 
    Et c’est enfin 
    plus  
    espacés plus  
    faibles  
    comme autant de 
    sanglots qui s’étouffent  
    peu à peu Et puis  
    soudain le vacarme  
    de la ville vacarme  
    du jour  
    sans l’effacer voilant 
    le secret de la nuit 
      
    * 
      
     
     
    On 
    a
    peur
     
    Des
    cris coups contre
    la porte  
    Même pas fermée non soudain je me dis  
    Ou mal (on  
    a peur on 
    – comme on peut – raccommode après  
    les coups toutes  
    ces brèches) 
    Secouée la porte  
    Jusqu’à ce  
    n’est pas possible  
    qu’elle 
    cède  
    Pas possible Et puis  
    rien 
      
    Même plus de porte  
    Aucune  
      
    On  
    marche   
    ou maintenant plutôt dans la solitude 
    moi ou l’autre seulement je 
    à travers 
    l’ombre à travers 
    des chambres une 
    demeure  
    de pierre 
    - elles sont à moi  je le sais oui les reconnais  
      
    ne les 
    connais pas les 
    découvre au fil de 
    la marche 
    une à une 
    – innombrables  
    on dirait 
      
    On  
    je  
    l’une après l’autre 
    pousse à présent des portes  
    et des portes Il n’y a plus personne Et puis 
    sans fin d’autres portes  
    Encore  
    Sculptées très belles À ouvrir sur  
    une 
      
    lumière tranquille  
    de cloître et d’oiseaux 
      
    Il n’y aura  
    – non – 
    plus de peur  
    mais ce 
    trésor enfin peut-être 
      
    à trouver 
      
      
    * 
      
      
    Chantal Atelin, Page 8 (marbre de Carrare, 1994 ; 50 x 46 x 41 cm) 
      
      
    Pleine lune 
    et blanche elle 
    parcheminée zébrée toute en 
    squelettes 
    calcinés  
    de branches  
    noires 
    Sur le chemin du bois  
    rides grises un pas crisse 
    qui s’éloigne 
    aux neiges roses  
    de l’aurore 
      
    Juste pour ceci  
    qu’on se rappellera 
    dans le soleil froid l’hiver vide 
    de midi 
    Sans univers ni vie  
    cette pure  
    lumière  
      
    Seulement 
      
    De quel choc
    quelle 
    guerre issue
    tramée
    Filaments premiers de la toile 
    cosmique 
     
    * 
      
     
      
    Comme un couteau
    
    lentement
    oui la nuit 
    s’aiguise
    
    dans la chambre 
    à
    l’insomnie clairvoyante 
    des
    choses
     
    Lumineux
    verts défilent 
    en
    chiffres 
    nombres
    les 
    minutes 
    les
    heures
    
    d’un
    
    cauchemar
    cadran
    sans
    miséricorde
      
    Une
    voiture
    
    qui
    tourne dans la rue
    passe
    
    ne
    s’arrête pas
     
    L’image
    
    même
    en fermant plus fort les yeux
    dans
    le noir l’image 
    la
    mémoire 
    de
    ton regard 
    ce
    jour-là
      
    ne
    s’efface pas
      
    * 
      
    
    
     
      
      
      Martine MORILLON-CARREAU 
        
      Née
      à Nantes le 27 mars 1948, elle a travaillé huit ans à la Martinique après
      une maîtrise de Droit. Revenue dans sa ville natale, elle y a enseigné en
      tant qu’agrégée de Lettres, en lycée puis à la Faculté de Droit.   
      Présidente
      de la revue Poésie/première,
      conférencière, primée à différents concours de nouvelles  (en particulier pour Le Voyageur du Wallraf , France-Loisirs, 1990 et
      pour  Les Papillons, L’Encrier
      renversé n° 18, 1992, elle a été l’ invitée du Mercredi du Poète en octobre 2010 à Paris puis, en 2015, du
      Festival International  de
      Camps-La-Source,  Le Mitan du Chemin, ainsi que des Polypoésies de Limoges. Elle a publié des
      poèmes et des articles sur la poésie dans de nombreuses revues et
      anthologies, françaises comme étrangères. 
      Depuis
      1998 elle a fait paraître neuf livres de poésie : 
      –     
      Dire (1998,
      Petit Véhicule, Nantes),  
      –     
      Midis sans ombre (2002, Librairie-Galerie Racine, Paris), Prix
      Jean-Claude Renard  2003, Grand
      Prix de la Ville de La Baule), (épuisé) 
       
      –     
      Monstres (2004,
      Exposition Fantasiarque de Bouin),
      (épuisé)   
      –     
      Le Jardin du porte-plume (2005, Sac à mots) poèmes accompagnés de 8
      dessins de Chantal Atelin (épuisé),  
      –     
      Mais c’est ailleurs toujours (2008, Sac à mots) 
      –     
      De l’autre côté ce miroir (2011, Sac à mots), 14 poèmes, dont un
      manuscrit, accompagnant douze photos d’œuvres de Chantal Atelin. 
      –     
      Poésie l’éclair l’éternité (Sac à mots ,
      2012)  
      –     
      Pierres d’attente (Petit Pavé, 2013) 
      –     
      Poéclats,
      Caprice avec des ruines (Éditinter, 2015) 
        
      Pour
      en savoir plus : 
       http://m.morillon.carreau.free.fr 
        
       
      
      * 
        
      Chantal ATELIN 
      Les trois œuvres reproduites ci-dessus ont fait
      l'objet de poèmes dans  De l'autre côté ce
      miroir :   
      –     
      la première est
      constituée d'une ardoise scarifiée et peinte, enfermée dans une feuille
      de plomb brûlée, fondue, le tout étant encadré dans du bois noir ; 
      –     
      la deuxième
      sculpture est un marbre de Carrare ; 
      –     
      la troisième
      une résine peinte. 
        
      La sculpture
      reproduite ci-dessous témoigne des récentes recherches de
      l’artiste : 
        
        
      Trait
      47, acier, 2013. 68 x 60 x 52 cm 
      Pour faire connaissance avec cette œuvre
      foisonnante : http://atelin-chantal.fr/ 
        
       
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    Salon
    de lecture   
    Martine
    MORILLON-CARREAU  
    recherche Dana Shishmanian   
    décembre 2016  
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