D'une langue à l'autre...
et textes
incidemment, sciemment
ou comme prétexte. Traduction.

 

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Archives : D'une langue à L'autre

 


D’une langue à l’autre…

MAI-JUIN 2021

 

 

Atsuko Ogane

 

 

Poèmes inédits du printemps et de l’été

dans la traduction de l’auteure

 

Photo du désert tunisien offerte pour cette publication par le photographe Mohamed Njah, que nous remercions (sa page: https://www.facebook.com/mohamed.njah.photographer), ainsi que le professeur Arselène Ben Farhat pour la mise en contact.

 

 

箜篌の夢

 

昼下がりの午睡

広大な砂漠に

生暖かい風に

ひとり奏でられる

螺鈿の箜篌

二十三本の弦の響き

 

いつか見果てぬ国の

生い茂る緑の園に

倦み疲れた戦いの地に

誘い行く調べは何も求めない

 

ただ懐かしさだけが

たおやかに人を包むこの未踏の渓谷の

約束の地を求める我ら

その疼いた問いかけに

灼熱の太陽は語ることをしない

 

 

Rêve du Kugo

 

Sommeil de l’après-midi

Sur le désert torride et vaste.

Dans le vent tiède

s’entend le timbre des vingt-trois cordes

du Kugo laqué, incrusté de nacre.

 

Un jour

Dans le jardin luxuriant

Du pays tellement rêvé

Sur la terre, où les gens se lassent des luttes et des combats

La mélodie qui invite ne nous demande rien.

 

Seule la nostalgie nous enveloppe

Doucement dans cette vallée sauvage,

Nous qui cherchions la terre promise,

À cette question lancinante,

Le soleil ardent ne nous répond pas.

 

* « Kugo » est une antique harpe transmise de l’Asie occidentale au Japon à l’époque de Nara au VIIIe siècle, par l’entremise de la Chine.

 

 

夏の日

 

穏やかな凪

灼熱の日の大地にも

真白に輝く雪原にも

その声は止むことがない

 

森の深層では

白い護符から立ち上る神々

妄想の糾弾が

雨のように降り注ぐ

 

思惑のまどろみを

時の審判を

ただ待つのみの生の重みに

さっくりと開いた

淡い石榴は

待つことを許されず

熟すことを急いで

甘美な華を

孤独な夜に開くだろう

 

 

Un jour d’été

 

Bonace plate et douce

sur la terre d’un jour torride,

sur la plaine lumineuse de la neige

la voix ne s’arrête pas.

 

Au tréfonds des couches antiques de la Forêt

se lèvent les Dieux des talismans blancs.

Les fantasmes nous accablent,

et tombent sur nous comme une averse.

 

Sous le poids de la vie d’une seule attente

pour des désirs en sommeil et le jugement du Temps,

une grenade claire, grande ouverte,

s’apprête à mûrir,

s’ouvrira une fleur suave dans la nuit solitaire.

 

 

ネミの森

 

染み拡がる

透き通った朱橙の暁

緑獣は大空に咆哮し

立ち上がる 森の王

 

一切の感情を浄化し

何者をも寄せ付けず

火と水を共存させる

ロゴスが支配する前の

生成だけが循環する世界

 

暁は

森の生物に始まりの静けさを

畏怖の慄きを

与え続ける

 

 

La forêt de Némi

 

Le crépuscule incandescent, transparent

S’infiltre et se répand dans le ciel

Le Monstre vert hurle dans l’air,

Quand se lève le Roi de la Forêt.

 

C’est le monde où prolifèrent les genèses,

Le monde d’avant que le logos domine,

Qui purifie tous les sentiments humains,

Qui n’accueille personne,

Le lieu où cohabitent le feu et l’eau.

 

Le crépuscule

apporte à tous les êtres de la Forêt

le silence du commencement et

le frisson de la révération.

 

 

時の大扉

 

夏から秋に風が移り変わるころ

良き人の手に美しい実が落ちる

 

時が来ればただどこからともなく

あつまりまた去って行く

この清らかな丘の神殿に

集いたる人々

その目は微笑み

はるかな文明を超えて

イオニアの海に輝きわたる

 

いつの時代だったか

白いチュニカを身に纏い

木々の葉を拾いながら

遠くを見渡す大扉を磨く

 

それは太陽の光に溢れ

満たされた日

来る日を待つ幸せの巨大な扉を

時と戯れながら力を合わせて

開いていく日

 

Vue du Cap Sounion, depuis les vestiges au sol du labyrinthe. Photo de Jean-Marie Privat, professeur émérite de l’Université de Lorraine, offerte pour cette publication par l’auteur, que nous remercions (voir son site sur l’ethnocritique)

 

 

Le portail du Temps

 

Quand le vent change de l’été à l’automne,

un beau fruit tombe dans la main d’une bonne personne.

 

C’est l’heure de rassemblement,

on ne sait d’où viennent ces gens,

on se rassemble, on s’en va,

à ce temple pur sur la colline.

Leurs yeux souriants

s’illuminent au-delà de la mer Ionie

en traversant les civilisations.

 

Je ne sais à quelle époque,

En mettant la tunique blanche,

Nous avons ramassé des feuilles mortes,

Nous avons poli un grand portail de verre

Qui dominait jusqu’au lointain.

 

C’est le jour où nous sommes comblés,

remplis de la lumière du soleil.

Le jour où l’on ouvre ensemble

ce portail colossal, heureux,

en attendant le jour suprême.

 

 

南端

 

エレソスに生まれ

レフカダに沈む

哀れなファオンも

いつかはその愛に

気づいて

深淵を覗き込み

彼女の痕跡を探すだろう

 

愛を存分に味わいつくした

魂が形をなくすまでに

無くてはいられない半神

どこまでも求めて

美の極致がこの海の透明な碧さに

溶け込んで

今は人気ないこの島の岬で

あの婚礼の日の絢爛さと香しさが

そこはかとなく風に漂っている

 

 

L’extrémité Sud

 

Née à Eresos,

Engloutie et submergée à Lefkada.

Un jour s’en apercevra le pauvre Phaon

De la profondeur de son amour,

Se penchera sur son gouffre

À la quête de sa trace.

 

Rassasiée de son amour,

Au point que son âme s’anéantisse

À la recherche de son demi-dieu inséparable

Jusqu’à l’infini

Le sublime de sa beauté se dissout

En bleu topaze transparent de la mer

 

Au promontoire désert de cet ilot,

Le souvenir et le parfum de sa noce somptueuse

Flottent encore dans le vent qui se lève.

 

 

サッフォー

 

祈りましょう

 

再生し、またいつの日か

この存在の記憶にめぐりあえるように

 

美の極みの調べが

やわらかく無限に肌に沁み込む

未知の性

肉体の闇に潜り、言葉の神秘を探り

生の秘密に触れる夢

 

異質の熱さにはかなわなかった

 

唯一の輝石の限りない重みが

定められた終着点を教えてくれる

イタカの岬に導かれて

 

 

 

Sapho

 

Prions.

 

Pour me ressusciter,

Pour rencontrer un jour le souvenir de cette existence,

 

La mélodie du beau sublime

S’infiltre dans ma peau, doucement à l’infini.

Le genre m’était inconnu.

Se plonger dans la nuit du corps,

À la quête du mystère de la parole,

Le rêve de toucher le secret de la vie !

 

L’ardeur de l’hétérogène était plus forte que moi.

 

Le poids infini d’un cristal de pyroxène

me dirige par ce cap d’Ithaque,

m’apprend le terminal fixe.

 

 

白い迷宮

 

母に連れられて行った

大理石のバジリカの扉

透き通る歌声が洩れる

 

白いヴェールが透けて

揺れるある日の昼下り

 

信仰もないまま何かに

跪く 蝋燭の火は揺れ

 

生誕劇に見入る白い手

どこまでも地下に続く

 

旋律に導かれるままに

一人歩み出す薄明の窟

 

案内人と離れたままに

どこ迄も続く白い迷宮

 

方向も均衡も失くした

その先にいつか見える

あの海を 広い視界を

私はずっと探していた

 

Vue du Cap Sounion, plan rapproché sur quelques colonnes du temple de Poséidon. Photo de Jean-Marie Privat (voir légende précédente)

 

 

Labyrinthe blanc

 

Le portail d’une basilique en marbre

Ma mère m’y a emmenée. J’entends

Les chants transparents et retentissants.

 

Par le voile blanc qui tremble,

Traverse la lumière d’un après-midi.

 

Sans la foi je m’agenouille

devant les bougies ondoyantes

 

La main blanche et un regard fixe

Sur la scène de la nativité,

Le chemin sous-terrain continue sans fin.

 

Dirigée par une mélodie, à l’aube,

Je sors d’un pas hors de cette grotte à stalactites.

 

Séparée du guide inconnu

Dans ce labyrinthe blanc qui continue éternellement.

 

Ayant perdu le sens et l’équilibre,

Je continuais la quête de

la Mer et l’horizon vaste

qu’on découvrira au loin un jour.

 

 

Antoine-Jean Gros, Sapho se précipitant du rocher de Leucade, 1801, Bayeux (reproduction d’après l’article homonyme du psychanalyste Serge-Henri Saint-Michel, sur son site, 23-05-2020)

 

Atsuko Ogane, universitaire nippone, éditrice des manuscrits de Flaubert, poète, est désormais bien connue de nos lecteurs (voir ses précédentes présences à Francopolis, dans cette même rubrique, en juin 2017 et mai-juin 2020, avec une notice biobibliographique).

 


Atsuko Ogane

 

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