Printemps 2025
Trois poètes italiennes
contemporaines
Présentées et traduites
par Giuliano Ladolfi :
Gioiella Barontini
Keti
Nizharadze
Sara Ferraglia
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Gioiella
Barontini
Gioiella
Barontini est née à Gozzano (Novara) en 1956. En 2024, elle a publié avec
Giuliano Ladolfi Editore Aspettando
l'alba.
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Non si può fermare il vento
Quando la
primavera
avrà un canto
unitario
che tutti
udranno
e un colore
nuovo
che tutti
vedranno,
ciascuno potrà
deporre
il greve
fardello
nel baule di
un passato angusto
ormai
spodestato.
Ma ora che
ancora non sappiamo
quanto lungo
si protrarrà
questo inverno
che ci fa muti,
non
dimentichiamoci
che non si può
fermare il vento
né il furore
dei cieli
quando è tempo
e che la
pazienza
di chi non si
spezza
prepara la
calma tenacia
di un nuovo
inizio.
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On ne peut pas
arrêter le vent
Quand le
printemps
aura un chant
unitaire
que tout le
monde entendra
et une
nouvelle couleur
que tout le
monde verra,
chacun pourra
déposer
le lourd
fardeau
dans le coffre
d’un passé étroit
désormais
déchu.
Mais
maintenant que nous ne savons pas encore
combien de
temps va durer
cet hiver qui
nous rend muets,
n’oublions pas
que l’on ne
peut pas arrêter le vent
ni la fureur
des cieux
quand il est
temps
et que la
patience
de celui qui
ne se brise pas
prépare le
calme tenace
d’un nouveau
départ.
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Quando si placa la tempesta
Quando
l’interiore tempesta
porta altrove
il suo affanno,
appare un
silenzioso mattino
e si staglia
nitido il gaio canto
dell’uccello
che non teme l’inverno
e si accendono
le primule ammiccanti
dallo strame
secco
come prova che
l’impossibile
vince col suo
cuore di sole
e con la
tenerezza fragile
delle cose
belle e vere
che non
chiedono il permesso
per schiudersi
come sorrisi.
Allora si
placa
ogni suono di
tempesta
e si comprende
quanto
benedetta sia anch’essa
con le sue
mani feroci
che frugano
tutto
strappando e
svuotando
per far posto
a questa quiete
che nulla
cerca e nulla vuole per sé.
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Quand la tempête se calme
Quand la tempête
intérieure
emporte son
souffle ailleurs,
un matin
silencieux apparaît
et se détache
clair le chant gai
de l’oiseau
qui ne craint pas l’hiver
et s’allument
les primevères brillantes
de la litière
sèche
comme preuve
que l’impossible
gagne avec son
cœur
de soleil
et avec la
tendresse fragile
des choses
belles et vraies
qui ne
demandent pas la permission
pour s’ouvrir
comme des sourires.
Alors s’apaise
chaque bruit
de tempête
et l’on
comprend
comme elle
aussi est bénie
avec ses mains
féroces
qui fouillent
tout
déchirant et
vidant
pour faire
place à cette quiétude
qui rien ne
cherche et rien ne veut pour soi.
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Il cuore del mondo
Uno spicchio
di sole
torna a
indorare il mondo,
uno spicchio
di buio trattiene la notte.
Solo gli occhi
dell’amore
si accostano
al mistero.
Chi non lo
custodisce
lo svilisce.
Le mani dell’amore
sono carezze
che sfiorano
senza strappare.
Batte il cuore
del mondo
in chi lo
ascolta.
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Le cœur du monde
Une tranche de
soleil
revient pour
dorer le monde,
une gousse
d’obscurité retient la nuit.
Seulement les
yeux de l’amour
approchent du
mystère.
Qui ne le
garde pas
le déprécie.
Les mains de
l’amour
sont des
caresses
qui frôlent
sans déchirer.
Le cœur du
monde bat
en celui qui
l’écoute.
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Keti Nizharadze
Keti
Nizharadze, poète, traductrice, docteur en
philologie classique, est née en 1977 à Tbilissi (Géorgie). Avec Giuliano
Ladolfi Editore, elle a publié en 2023 le recueil de poèmes Vacanze a Roma (traduction en italien de Nunu Geladze).
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Periculum in mora
Pericolo nell’indugio
Certo, siamo sopravvissuti,
ma abbiamo i tempi crudeli –
sono aperti i nostri deboli polsi
e aspettiamo il salvatore,
pur sapendo che dobbiamo essere noi
artefici di gloria e i vincitori.
Se non vinciamo, almeno
combattiamo contro l’estinzione,
non saremo mai giudici degli altri.
Se non riusciamo,
ci incamminiamo contro impetuose correnti,
non saremo mai in veste dei vincenti.
Ci mettiamo la museruola,
ci applichiamo il silenzio,
le maschere dell’ignoranza
e, forse, mai riusciremo
a fare la scelta
se non ci ergiamo come bandiera
sulla torre delle mura
e se rimarremo nel futuro
le vittime miserabili.
Abbiamo la terra sotto i piedi,
ma viviamo in tempi crudeli,
dobbiamo fasciare i nostri polsi tagliati.
Non dobbiamo indugiare
nella speranza degli eroi inventati
perché noi dobbiamo essere
gli artefici di questa vittoria.
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Periculum
in mora
Danger dans le délai
Bien
sûr, nous avons survécu,
mais
nous avons des temps cruels –
nos
poignets faibles sont ouverts
et
nous attendons le sauveur,
même
si nous savons que nous devons être
les
artisans de gloire et les vainqueurs.
Si
nous ne gagnons pas, au moins
nous
luttons contre l’extinction,
nous
ne serons jamais juges des autres.
Si
nous ne pouvons pas,
nous
marchons contre des courants impétueux,
nous
ne serons jamais en costume de vainqueur.
Nous
mettons la muselière,
nous
y appliquons le silence,
les
masques de l’ignorance
et,
peut-être, jamais nous ne réussirons
à
faire un choix
si
nous ne nous élévons pas comme drapeau
sur
la tour des murs
et
si nous resterons dans le futur
les
victimes misérables.
Nous
avons la terre sous nos pieds,
mais
nous vivons en temps cruels,
nous
devons bander nos poignets coupés.
Nous
ne devons pas tarder
dans
l’espoir des héros inventés
parce
que nous devons être
les
artisans de cette victoire.
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Veni vidi vici
Venni, vidi, vinsi
Giulio
Cesare
Dopo aver passato la notte in bianco,
catturo meglio i primi raggi del sole.
Apro la finestra e osservo l’inizio.
E questo non è una passeggiata
lungo la riva,
è il ritorno
contro la corrente del fiume.
Avanza la nave a fatica, impercettibilmente,
pare che la luce e il vuoto di quelli anni
come il dolore, l’invecchiamento o la compassione
siano posati a strati al fondo
come pietre levigate.
Andrò, vedrò, darò uno sguardo
ai giorni da cui mi allontanavano sempre
la terra e l’acqua.
Dirò: “venni, aprii gli occhi,
ma combattere e vincere
in tempo non riuscii”.
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Veni vidi vici
Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu
Jules
César
Après
avoir passé la nuit à l’état blanc,
je
capture mieux les premiers rayons du soleil.
J’ouvre
la fenêtre et regarde le début.
Et
ce n’est pas une promenade
le
long de la rive,
c’est
le retour
contre
le courant de la rivière.
Le
navire avance à peine, imperceptiblement,
il
semble que la lumière et le vide de ces années
comme
la douleur, le vieillissement ou la compassion
soient
posés en couches au fond
comme
des pierres polies.
Je
vais aller, voir, jeter un coup d’œil
aux
jours d’où m’éloignaient toujours
la
terre et l’eau.
Je
dirai : "Je suis venu, j’ai ouvert les yeux,
mais
combattre et gagner
je
n’ai pas pu".
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Non sum qualis eram
Non sono quello che ero
Se tutti i sentieri che fino a te conducono
si copriranno di muschio
e non troverò un’altra strada;
se le ombre lasceranno i loro corpi
e impareranno a svegliarsi ogni mattina;
se cento volte accadrà l’eclissi di sole
assieme alla luna e i neon si trasformeranno
in sole giorno e notte;
se di seguito
diverranno reali tutti i sogni;
se si avverranno in preciso ordine
tutti i desideri,
allora ti dirò, che non sono più
quella che ero, ora sono un’altra
e le mie ferite sono rimarginate.
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Non
sum qualis eram
Je ne suis pas ce que j’étais
Si
tous les chemins qui mènent à toi
sont
couverts de mousse
et
je ne trouve pas d’autre voie;
si
les ombres laissent leurs corps
et
apprennent à se réveiller chaque matin;
si
cent fois l’éclipse de soleil se produit
avec
la lune et les néons se transforment
en
soleil, jour et nuit,
si
ensuite
tous
les rêves deviennent réalité;
si
se réalisent dans l’ordre précis
tous
les désirs,
alors
je te dirai que je ne suis plus
ce
qui j’étais, maintenant je suis une autre
et
mes blessures sont refermées.
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Sara Ferraglia
Sara Ferraglia
vit dans la ville de Parme. Avec Giuliano Ladolfi Editore a publié Voglio una danza (2023).
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E vennero i muri
E se potessero innalzerebbero
muri anche in mare,
fatti di onde immense e respingenti
che non puoi scavalcare.
E se potessero costruirebbero
muri anche in cielo,
muri di nuvole finte,
dure e compatte che non puoi bucare.
E arcobaleni d’acciaio
come lame colorate e taglienti.
Muri ovunque, muri d’occidente,
per lasciare fuori chi non conta niente.
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Et les murs sont venus
Et
s’ils pouvaient, ils élèveraient
aussi
dans la mer des murs,
faits
de vagues immenses et repoussantes
que
l’on ne peux pas passer.
Et
s’ils pouvaient, il construiraient
des
murs en ciel aussi,
des
murs de faux nuages,
durs
et compacts que l’on ne peux pas percer.
Et
des arcs-en-ciel d’acier
comme
des lames colorées et tranchantes.
Des
murs partout, des murs de l’ouest,
pour
laisser dehors les gens qui ne comptent pas.
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Il Presepe dal mare
S’infrangono sul molo come onda
brandelli di stanchezza e di speranza.
Già diafana è la luna e l’alba avanza
illuminando ombre sulla sponda.
Siete approdati qui, occhi stranieri,
che v’insinuate oltre il mio orizzonte,
nei solchi delle rughe sulla fronte
celando il mare mosso dei pensieri.
S’accende una lampara fra i marosi,
stella cometa per viandanti persi,
traccia che unisce mille e più universi,
luce che parla a volti silenziosi.
Parole ignote su labbra di sale
or sfumano nel grido dei gabbiani.
Sorride un bimbo a un battito di mani
ed è un messaggio dolce e universale.
Sei giunta fino a me, anima in viaggio,
attraversando la tua oscura notte.
Uomini uguali sulle stesse rotte,
orme noi siamo in strade di passaggio.
(Lampedusa, uno sbarco a Natale)
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La crèche venue de la mer
Des
lambeaux de fatigue et d’espoir
se
brisent sur le quai comme une vague.
La
lune est déjà diaphane et l’aube avance
illuminant
les ombres sur le bord.
Vous
êtes arrivés ici, yeux étrangers,
qui
vous insinuez au-delà de mon horizon,
dans
les sillons des rides sur le front
cachant
la mer agitée des pensées.
Une
lampe s’allume parmi les flots,
étoile
comète pour les voyageurs perdus,
trace
qui unit plus de mille univers,
lumière
qui parle à des visages silencieux.
Des
mots inconnus sur lèvres de sel
se
fondent dans le cri des mouettes.
Un
enfant sourit à un claquement de mains
et
c’est un message doux et universel.
Tu
es venue à moi, âme en voyage,
traversant
ta nuit noire.
Des
hommes égaux sur les mêmes routes,
empreintes
nous sommes dans les rues de passage.
(Lampedusa,
un débarquement à Noël)
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Le ragazze nate in primavera
Le ragazze nate in primavera
hanno nuvole in testa
e vento nei capelli.
Le mani come nidi
da riempire di sogni
e di mari in tempesta.
Ostinate guerriere
ispirate da Marte
hanno frecce di sole
e faretre di luna
sulle spalle leggere.
Le ragazze nate in primavera
non invecchiano mai
e si vestono a festa,
con mazzetti di viole
fra ingrigiti capelli
per il tempo che resta.
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Les filles nées au printemps
Les
filles nées au printemps
ont
des nuages dans leur tête
et
du vent dans leurs cheveux.
Leurs
mains comme des nids
à
remplir de rêves
et
de mers en tempête.
Guerrières
têtues
inspirées
par Mars
ont
des flèches de soleil
et
des carquois de lune
sur
leurs épaules légères.
Les
filles nées au printemps
ne
vieillissent jamais
et
s’habillent à neuf,
avec
des bouquets de violettes
entre
leurs cheveux bouclés
pour
le temps qui reste.
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Giuliano Ladolfi,
poète, essayiste et éditeur, est bien connu de nos lecteurs, par ses poèmes
en version bilingue et par ses traductions
(voir à cette rubrique même) ; il a publié un essai sur la poésie
contemporaine au numéro de novembre-décembre
2022.
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Giuliano
Ladolfi - Traductions
Francopolis Printemps 2025
Recherche
Dana Shishmanian
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