D'une langue à l'autre...
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Archives : D'une langue à L'autre

 

Mars-avril 2023

 

 

Trois poètes italiens contemporains

Présentés et traduits par Giuliano Ladolfi :

 

Annamaria Ferramosca

Gianni Priano

Marco Beck

*** 

 

 

Annamaria Ferramosca

(*)

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Extraits de Per segni accesi, Borgomanero, Ladolfi, 2021

 

qui c’era una casa e una cisterna

cigolava di vita la carrucola

intorno s’affaccendavano le api 

nelle ritmiche estati

di spighe e d’ossa

 

poi fu davvero arduo

veder levarsi il muro inesorabile

scegliere con chi stare   con chi decidere

di attraversare un mare assurdo

lasciarsi estinguere o cercare

varchi nel miraggio

del grande accordo

 

tutto fu davvero molto arduo   

visto che

umani e pietre per muri

continuavano a confondersi a confondere

 

ici il y avait une maison et une citerne

la poulie grinçait de vie

autour s’agitaient les abeilles 

dans les étés rythmés

d’os et d’épis

 

puis c’était vraiment dur

de voir le mur inexorable s’élever

de choisir avec qui se tenir    avec qui choisir

de traverser une mer absurde

de se laisser éteindre ou chercher

des brèches dans le mirage

du grand accord

 

tout en effet était très difficile

puisque

les humains et les pierres pour les murs

ne cessaient de s’embrouiller à embrouiller

 

fare tabula rasa dei pensieri

affidarsi al buio

con la sicurezza dei ciechi

 

sostare ad ogni angolo della notte

afferrare i lumi al baluginare dell’alba

sulla bocca delle sorgenti  

nel luccichio delle nascite

 

verrà l’oceano

verranno le sue vele

saremo nuovi per nuovi continenti

 

faire table rase des pensées

se fier à l’obscurité

avec la sécurité des aveugles

 

s’arrêter à chaque coin de la nuit

saisir les lumières à la lueur de l’aube

sur la bouche des sources  

dans le scintillement des naissances

 

viendra l’océan

viendront ses voiles

nous serons nouveaux pour de nouveaux continents

 

ho trecce che sciolgo a sera prima del sonno

si piegano in onde profetiche   scene

dal sogno che la notte

già sospinge nel mattino e trasmuta

in gesti quotidiani

 

ancora quell’addio   quel nodo stretto

che ti ho fatto per mai dimenticare

il nostro barcollare sulla grondaia  

il prenderci per mano

e i déjà-vu a ricordare 

siamo fatti della stessa materia dei sogni

 

J’ai des tresses que je détache le soir avant de dormir

se plient en vagues prophétiques       scènes

du rêve que la nuit

pousse déjà dans le matin et transmue

en gestes quotidiens

 

encore cet adieu    ce nœud serré

que je t’ai fait pour que tu n’oublies jamais

notre titubation sur le caniveau  

notre prise de mains

et les déjà-vu pour se souvenir 

que nous sommes faits de la même matière que les rêves

 

(*)

Annamaria Ferramosca vit à Rome, où elle a travaillé en tant que professeur de biologie, tout en occupant pendant plusieurs années le poste de professeur de littérature italienne à l'université RomaTre. Elle a à son actif des collaborations créatives et critiques avec revues nationales et internationales et avec des sites de poésie italienne.

 

Gianni Priano

(*)

 

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Extraits de Luce che passi sotto, Borgomanero, Ladolfi, 2022

 

Andavo (perché andare è il mio mestiere)

Andavo (perché andare è il mio mestiere)

per la salita con le mani dietro

come mio nonno e con le suole al vento.

Non ero né infelice né contento

(come mio nonno). Provavo a ricordare

cosa era stato tutto quel brillare

come se avesse preso fuoco il mare.

Avevo quella faccia che hanno i vecchi

come per dire forse è stato un sogno

o la memoria che mi fa i tranelli.

Sentivo con l’orecchio buono aprirsi

e poi (di nuovo) chiudersi cancelli.

 

J’allais (parce qu’aller est mon travail)

J’allais (parce qu’aller est mon travail)

le long de la montée, mes mains derrière

comme mon grand-père, et mes semelles au vent.

Je n’étais ni heureux ni malheureux

(comme mon grand-père). J’essayais de me rappeler

ce qui avait été tout ce briller

comme si la mer avait pris feu.

J’avais ce visage qu’ont les personnes âgées

comme pour dire que c’était peut-être un rêve

ou que la mémoire des pièges me peut jouer.

J’entendais avec ma bonne oreille s’ouvrir

et puis (encore) les portes se refermer.

 

Muoiono gli amici dentro facebook

Muoiono gli amici dentro facebook

come correndo e via che d’improvviso

non se ne sa più niente. Hanno la nebbia

addosso e pioggia e tanta neve intorno:

muoiono esattamente come muore

senza spiegarsi la luce del giorno.

E non li vedrai più ma mai li hai visti

ti mancherà la voce sconosciuta

fatta di segni e punti a capo e muta

e sarai triste e soprattutto al fianco

ferito, perso. E invecchiato. E stanco.

 

Meurent les amis dans Facebook

Meurent les amis dans Facebook

comme en courant et soudainement

d’eux on ne sait plus rien. Ils ont la brume

sur eux et de la pluie et beaucoup de neige autour:

ils meurent exactement comme meurt

sans s’expliquer la lumière du jour.

Et tu ne les verras plus, mais jamais tu les as vus,

te manquera la voix inconnue

faite de signes et de points et suspendue

et tu seras triste et surtout au côté

blessé, perdu. Et vieilli. Et fatigué.

 

Luce che passi sotto

Luce che passi sotto

un’altra porta chiusa

sguardo da sotto in su

che quasi chiede scusa.

Fuori dai cerchi magici

con mezza ala voli

non hai un pensiero unico

solo pensieri soli.

Vento che arriva e apre

la porta, le finestre

lava che esce, bolle

devasta le ginestre.

In piedi sulla torre

con la bandiera in pugno

il cielo ti ha ingaggiato

dai tetti gridi il sogno.

Luce che passi sotto

tu che proteggi gli angoli

non voglio lo splendore

quello lo lascio agli angeli.

Voglio tu che mi ascolti

voglio ascoltare te

l’olio sul pane, un gotto

di vino e sono un re.

Non occupare il tempo

il tempo va da sé

e poi neanche il tempo

si occupa di me.

Fuori dai cerchi tragici

dall’ansia del contare

dalla ragione inutile

perfino a ragionare.

Non voglio dare lustro

a scuole, aziende, mense

voglio guardare piovere

gocce sottili o dense.

Non voglio spiagge candide

sdraio, noci di cocco

vieni con me, accompagnami

luce che passi sotto.

 

Lumière, qui passes dessous

Lumière, qui passes dessous

une autre porte fermée

regardant de bas en haut

avec des excuses présentées.

Hors des cercles magiques

tu voles avec une demi-aile

tu n’as pas une pensée unique

seulement des pensées solitaires.

Vent qui vient et ouvre

la porte et les fenêtres

lave qui sort, bouillit,

ravage les genêts.

Debout sur la tour

en main la bannière

le ciel t’a engagé

des toits tu cries ton rêve.

Lumière, qui passes dessous,

protège les angles

je ne veux pas de splendeur

je laisse cela aux anges.

Je veux que tu m’écoutes

je veux t’écouter toi

l'huile sur mon pain, un verre

de vin et je suis un roi.

N’occupe pas le temps

le temps va de soi

et puis même le temps

ne prend pas soin de moi.

Hors des cercles tragiques

de l’anxiété de compter

de la raison inutile

même à raisonner.

Je ne veux pas donner du lustre

aux écoles, entreprises, cantines,

je veux regarder pleuvoir

des gouttes denses ou fines.

Je ne veux pas de plages blanches

chaises longues, noix de coco

viens, accompagne-moi,

lumière qui passe dessous.

 

(*)

Gianni Priano est né en 1962 à Gênes où il vit. Il a publié plusieurs livres de poésie, dont Nel raggio della catena et Luce che passi sotto.

 

Marco Beck

(*)

 

Extraits de Il sorriso di Lalage, Borgomanero, Ladolfi, 2021

 

Maternità

Composta sulla sedia, neppure

t’accorgevi di come

– da solo pochi metri di distanza –

ti fissassi attonito, incantato.

Tutta ti porgevi ad un ascolto interno:

attenta a un ovattato

frullo d’impalpabili manine nel tuo grembo,

ad un frusciante lieve trepestio;

protesa al movimento musicale

(fosse un larghetto, un andantino

ovvero un affettuoso andante)

che il Signore veniva in te suonando

per mezzo d’una nuova creatura

nostra e Sua.

E mentre il quasi doloroso

(per la sua pienezza)

maturare dell’ormai seconda tua maternità

versava sulle palpebre socchiuse

una perlacea spossatezza,

talmente eri lontana

da qualunque sensazione di bellezza

tua, che certo

non potevi immaginare quanto fossi,

in quel preciso istante

in cui non ci pensavi affatto, bella.

 

Maternité

Bien assise sur ta chaise, pas même

tu voyais comment

– à quelques mètres seulement –

je te regardais, ébahi, enchanté.

Tu te donnais toute à une écoute intérieure:

attentive à un frémissement assourdi

d’impalpables petites mains sur ton sein,

à un léger froufroutant piétiner;

tendue vers le mouvement musical

(un larghetto, un andantino

ou bien un andante affectueux)

que le Seigneur jouait en toi

par l’intermédiaire d’une nouvelle créature

la nôtre et la Sienne.

Et tandis que le presque douloureux

(pour sa plénitude)

mûrir de ta désormais deuxième maternité

versait sur tes paupières mi-closes

une fatigue nacrée,

tu étais si loin

de toute sensation de ta beauté,

ta beauté que, certes,

tu ne pouvais imaginer à quel point tu étais,

à cet instant précis

où tu n’y pensais pas du tout, belle.

 

La ragazza della Plaka

«Kalispéra». La ragazza (disse loro di chiamarsi Eleni),

         una ventina d’anni,

non bella ma flessuosa, glauchi gli occhi come quelli

         di Pallade, una vena

di sensualità cordiale nel suo modo di concedersi

         al colloquio con i due turisti,

se ne stava affacciata sulla soglia d’una botteguccia

         di vario abbigliamento.

Poca gente in giro per le strette odói tortuose.

         Come, non sapevano? Sorrise.

Era un pomeriggio di mercoledì, spiegò: gran parte

         dei negozi rimaneva chiusa.

Che cosa cercavano? una maglia da basket per il figlio,

         un giovane cestista?

Panathinaikós, Olympiakós, Paniónios, Peristéri?

         No, purtroppo non ne aveva.

Suggeriva che provassero più avanti, lungo l’Adriánou.

         S’avviarono. Ma lei li richiamò.

Al ragazzo di Milano (quanti anni? ventidue?)

         portassero il suo bacio.

 

La fille de la Plaka

« Kalispéra ». La fille (elle leur dit s’appeler Eleni),

         d'environ vingt ans,

pas belle mais souple, les yeux glauques comme ceux

         de Pallas, une veine

de sensualité cordiale dans sa façon de s’offrir

         à l’entretien avec les deux touristes,

elle se tenait sur le seuil d’un joli magasin

         de vêtements variés.

Peu de monde dans les odói étroites et sinueuses. 

         Comment, ils ne savaient pas ? Il a souri.

C’était un après-midi de mercredi, a-t-il expliqué : une grande partie

         des magasins étaient fermés.

Qu’est-ce qu’ils cherchaient ? un maillot de basket pour leur fils,

         un jeune joueur de basket ?

Panathinaikós, Olympiakós, Paniónios, Peristéri ?

         Non, elle n’en avait pas.

Elle suggérait qu’ils essayent plus loin, le long de l’Adriánou.

         Ils sont partis. Mais elle les a rappelés.

Au garçon de Milan (combien d’années ? vingt-deux ?)

         qu’ils lui apportaient son bisou.

 

La Vergine di Chartres

La bambina con un campo di frumento

dell’Eure-et-Loir o della vicina Normandia

dipinto da un impressionista tra i capelli,

e con due gocce d’Atlantico negli occhi,

così dal punto di vista somatico diversa

dalle figlie di mio figlio, e nondimeno

nello sboccio della grazia femminile

somigliante in qualche modo a tutt’e tre,

la bambina rimasta per ben più di un’ora,

durante la solenne Messa per l’Assunta,

seduta con francese, silenziosa compostezza

(solo brevemente, a tratti, ritta in piedi)

su una sedia distante appena due o tre file

dalle nostre, al centro dell’immensa cattedrale,

sopra il bordo del rotondo labirinto

che avvolge del suo enigma il pavimento,

tra l’elevazione dei pilastri, delle arcate,

delle aeree volte e, delle vetrate e dei rosoni,

il mistico, sublime gioco di luce iridescente,

quando si formò la coda per l’eucaristia

e lei, girata indietro sulla spalla destra

di suo padre, venne a trovarsi proprio lì

davanti a me, sorrise al mio sorriso.

E fu quello il sacro segno assolutorio

con il quale la Vergine di Chartres

mi fece, cancellando in un istante tutti

i miei peccati, più bianco della neve, degno

di poter gustare, con il cuore quasi incapace

di reggere l’assalto dirompente della gioia,

il pane diventato, per la transustanziazione,

sull’altare, il corpo di suo Figlio, di Jésus.

 

La Vierge de Chartres

La petite fille avec un champ de blé

de l’Eure-et-Loir ou de la Normandie voisine

peint par un impressionniste dans ses cheveux,

et avec deux gouttes d’Atlantique dans les yeux,

si différente du point de vue somatique

des filles de mon fils, et pourtant

dans l’épanouissement de la grâce féminine

ressemblante d’une certaine manière aux trois,

l’enfant restée bien plus d’une heure

pendant la messe solennelle de l’Assomption,

assise avec un calme français et silencieux

(seulement brièvement, parfois, debout)

sur une chaise, à deux ou trois rangées de là

de la nôtre, au centre de l’immense cathédrale,

au-dessus du bord du labyrinthe rond

qui enveloppe le sol de son énigme,

entre l’élévation des piliers, des arcades,

des voûtes aérées et, des vitraux et des rosaces,

le jeu mystique et sublime de la lumière iridescente,

quand la queue s’est formée pour l’Eucharistie

et elle, retournée par-dessus son épaule droite

de son père, est venue se placer juste là

en face de moi, elle a souri à mon sourire.

Et c’était le signe sacré d'absolution

avec laquelle la Vierge de Chartres

m’a fait, effaçant en un instant tous

mes péchés, plus blanc que la neige, digne

d’être capable de goûter, avec un cœur presque incapable

de résister à l’assaut éclatant de la joie,

le pain devenu, par transsubstantiation,

sur l’autel, le corps de son Fils, de Jésus.

 

(*)

Marco Beck (1949) vit à Milan. Il a été pendant vingt ans (1976-1995) éditeur puis coordinateur de la série classique de Mondadori. Il a ensuite été, jusqu'au début de 2005, directeur littéraire des Edizioni San Paolo.

***

Giuliano Ladolfi, poète, essayiste et éditeur, est bien connu de nos lecteurs, par ses poèmes en version bilingue et par ses traductions (voir à cette rubrique même) ; il a publié un essai sur la poésie contemporaine au numéro de novembre-décembre 2022. Les poètes qu’il traduit ici ont été publiés chez Giuliano Ladolfi Editore dont nous recommandons vivement le catalogue de poésie !

 


Giuliano Ladolfi - Traductions

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