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KARIM CORNALI 

Extraits de J’entends rire les djinns, recueil inédit

Présenté par Dana Shishmanian





Dans cette immensité de sable
Je n’ai rien trouvé d’autre
Que moi-même
Et moi-même
Dans cette immensité de sable
Ce n’est pas grand-chose

 

* 

L’écriture est une marche
Intense et profonde
Dans l’immensité du Mystère

*

Je franchis des milliers
De portes invisibles
Mon âme passe au tamis des ombres
Ne demeure
Que cette lumière furtive
D’un ange dans le lointain qui caresse les dunes


*

On ne tolère pas
Le silence des hommes
Mais on loue celui du déser

*

On parle trop
– Même les poètes parlent trop
Allons faire un tour dans les dunes !

*

J’ai ramassé une pierre-poème
Dans le reg
Je l’ai posée dans ma bibliothèqu

*

Je croise un enfant qui me dit :
« Je veux être écrivain »
– Ricoche
Sur la paroi des dunes
Jusque sur l’horizon
La pureté des mots
De l’enfant rêveur 

*

Les hommes libres
Vivent leurs rêves
En réalisant le livre
Qu’ils ont écrit avant de naître

 

*

Les poèmes qui vous viennent comme ça
Sans que vous les notiez tout de suite quelque part
Disparaissent aussi vite
Qu’une trace de pas dans un vent de sable 

*

Les poèmes que vous gravez dans la roche
Disparaîtront un jour
Par érosion

*

Tout finit par disparaître
Même ce que l’on croyait éterne 

– J’entends rire les Djinns…




Extraits de Transe Légère, recueil inédit


je m’assois à la terrasse d’un café
sous les nuages gris
il fait beau dans mon cœur
 

*

écouter des histoires drôles
rire de bon cœur
entendre mon rire
se mêler à la mélodie
des autres rires

 

*

un homme est un être
féerique
quand il aime

 

*
 

tendre les bras
au plus profond de soi
pour attraper la fleur
indestructible

 

*
 

m’asseoir sous les arbres
en bas de ma résidence
regarder leur feuillage
voir le monde autrement

 

*
 

le temps passe
plusieurs feuilles tombent
quelques personnes passent
sans regarder –
un enfant
se roule dans les feuilles

 

*

marcher dans les rues de la ville
pendant des heures
pour admirer les nuages


*

marcher dans la rue
regarder sous les nuages
pour voir si les gens
sont heureux
 

*
 

quand j'étais enfant
je n'étais pas dans les nuages
j'étais le nuage
de toutes les métamorphoses


*
 

quand j'étais enfant
je n'étais pas poète
j'étais apprenti magicien
ce qui est presque la même chose
 

*
 

j’ai pris le métro
j’ai regardé les gens
qui ne se regardaient pas

 

*

j’ai vu une femme
qui parlait toute seule
riant presque aux éclats
dans un micro miniature

 

*
 

je suis sorti du métro
glissant comme un poisson
dans la lumière d’automne
– les gens ne glissaient pas
 

*
 

j’ai vu une vieille dame
réciter des poèmes
dans les allées d’un salon du livre
– j’ai vu des regards méprisants
 

*
 

j’ai rencontré de grands poètes
qui rêvent qu’on lise leurs livres
et une légion de cafards
circuler dans les médias

 

*

rentrer dans une parfumerie
sentir plusieurs parfums
en imaginer un renversant
 

*

sortir d’une parfumerie
croiser une jolie femme
glisser sur une peau de banane


*

faire un tour de manège
au milieu des enfants
se téléporter
dans un monde sans guerre
 

* 

les soldes...
tout le monde veut acheter quelque chose
les gens se bousculent
sans un mot aimable


*
 

au rayon meilleures ventes
j’ai aperçu une pancarte
un oiseau y avait écrit FUI !
 

*
 

se promener sous la lune
la regarder
observer comment
respirent
les choses alentours

     


Né le 21 octobre 1979 à Saint-Lô (Normandie) d’un père breton-basque et d’une mère berbère-sahraouie, Karim Cornali est professeur des écoles à Nanterre.

Il a vécu les dix premières années de sa vie au Sénégal où son père travaillait en tant que professeur de lettres dans la coopération française. Il partage son adolescence entre la France, le Congo (en pleine guerre civile) et la Mauritanie. Il étudie la philosophie à Montpellier, et prend la fuite.

A vingt ans, il obtient deux prix de poésie aux 59èmes Jeux Littéraires de la Compagnie des Écrivains Méditerranéens.

En 2008 il part à l’aventure en Afrique (Mali et Sénégal) pour longer le fleuve Sénégal à vélo. Il publie le récit de son voyage initiatique, Les génies du fleuve Sénégal, aux éditions Artisans-Voyageurs (voir Entretien avec Karim Cornali) ainsi que des poèmes dans plusieurs revues littéraires. En 2011, il part avec sa compagne en Guyane remonter le fleuve Maroni en stop. En juin 2013, il créé et anime la revue de littérature de voyage Kahel.
On trouve ses textes dans des revues : Souffles, Libelle, Inédit Nouveau, Pyro, Le Capital des mots, Le Grognard, Traversées, Comme en poésie, Art'en-Ciel, Les tas de mots, Traction-Brabant, Les Cahiers du sens, Microbe, Spered Gouez, Neiges, Verso.


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Salon de lecture :
Karim Cornali
présenté par Dana Shishmanian
octobre 2013




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Créé le 1 mars 2002

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