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Archives : Vues de Francophonie

Hiver 2025

 

 

Salah Al Hamdani :

Je vous appelle !

 

Poème inédit.

 

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©Yousif Naser (encres)

 

(*)

 

 

 

Je vous appelle !

 

1

Dans la tranchée

je courais sans me retourner

trimbalant mon corps au milieu d’un déluge de rats

à la lisière tranchante de la nuit

et d’une route sans issue

au bord de la langue

dans la chute interminable du poème

où gît ma blessure

 

2

La paix ne s’impose pas

comme on décréterait un couvre-feu

et la mort d’autrui ne se décide pas

 

Qui me prêtera un salut pour espérer ?

Le rêve me quitte...

Parce que la mémoire des calamités de l’humanité ne mérite pas

le sacrifice d’aucune vie en Palestine

 

3

Les faiseurs de guerre s’entasseront

toujours dans des cercueils

quant à moi

je resterai seul dans les ténèbres à écrire sur l’exil

à nommer les assassins

à faire l’inventaire des victimes

et à couvrir les blessures des orphelins

avec mon corps d’ancien rescapé de la dictature

 

Malgré la douceur des nuages de l’été

le monde gronde en moi

et mon âme parfume les défunts et les soldats inconnus

 

Dans ma chambre au plus profond de la nuit

je ramasse les étoiles ébouriffées et tristes

ainsi que les péchés de ma jeunesse commis dans l’obscurité

 

Je suis le sacrifié des croyances malfaisantes

et de la fraternité mensongère

 

4

Aujourd’hui je suis comme un vieux carrosse

tiré par des mules aveugles

méfiant envers ceux qui menacent l’unité de l’horizon

 

Je rame entre nuages, mirages et averses

comme un bateau chargé de migrants sous un ciel clandestin

où Sisyphe de Camus ne vient que rarement

 

Plus loin encore

la tempête et le sable me reconnaissent

alors que je dessine discrètement une steppe

afin de me sentir moins seul dans la résurrection de l’aube

 

Du haut de mon exil

je suis devenu le témoin oculaire

de ceux qui cambriolent le reflet de la lune

dans les paupières des petites filles

et arrachent le cœur des orphelins

 

5

Ceux qui saccagent le printemps

et profanent les sanctuaires où se recueille toute l’humanité

qui ravagent aussi les champs de mots

la douce voix des mères et le cri du poète

j’aimerais tant qu’ils périssent !

 

6

Ceux qui ruinent la lumière matinale des tourterelles

Répandent le néant

Et brisent les bras de l’horizon

Pour les gamins

 

Et ces mêmes individus qui répandent le sang

rompant le pacte tacite de l’humanité de préserver les siens

non par pauvreté d’esprit

non par erreur ni accident

juste pour se venger de cette humanité

dont ils n’ont jamais voulu faire partie

Qu’ils périssent !

 

7

Cela fait longtemps que je peins des colombes

sur les murs de mon exil

Que j’arrose ces lys qui poussent dans la peste

et que je pleure seul la mort de mes frères exécutés

Les ailes des papillons suffiront-elles

à contenir la haine des sanguinaires ?

 

Qui peut m’expliquer

comment faire la paix avec des génocidaires ?

Avec ceux dont nous ne partageons plus rien

ni langue, ni mémoire, ni deuil

Pas de sacré ni de croyance en commun

et même pas de discorde

Et l’éphémère, et l’anecdote ?

 

Tout ce qui se passe là-bas en Palestine

m’habite

 

Ceux qui ont bavé sur le sacré

car ils assassinent l’humanité

Qu’ils périssent !

 

 

©Salah Al Hamdani

Savigny/Orge, 14 juillet 2025

 

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©Yousif Naser (encre)

 

 

(*)

 

Aucun Livre Saint

ne mérite une guerre.

Seuls les hommes révoltés contre la misère

sont des prophètes.

Salah Al Hamdani in "La sève et les mots",

Editions : Voix d’Encre, 2018

(reproduit de son site)

 

Nous accueillons avec joie le poète Salah Al Hamdani, dont il convient de citer l’introduction de sa présentation sur son site :

« Poète, écrivain et homme de théâtre français d’origine irakienne, est né en 1951 à Bagdad. Ancien opposant au parti baath en Irak puis à la dictature de Saddam Hussein et à ses guerres. Il commence à écrire des poèmes en prison politique vers l’âge de 20 ans. Il se nourrit de l’œuvre d’Albert Camus en arabe dans les cafés de Bagdad, puis choisit la France comme terre d’asile en 1975. C’est en France qu’il devient ensuite l’auteur d’une œuvre poétique en arabe ou en français (poésies, nouvelles et récits) dont plusieurs ouvrages sont traduits de l’arabe avec Isabelle Lagny. Sa poésie et ses récits ont été traduits en plusieurs langues. »

Ses derniers recueils :

·       On m’appelle l’étranger, préface par Carole Carcillo Mesrobian (L’Étranger est le poète), éditons La Kainfristanaise, juin 2025.

·       Palestine je te chéris, avec des illustrations de Yousif Naser, éditions Al Manar, février 2025.

·       J’ai vu (bilingue français-arabe, traduction de l’arabe par l’auteur et Isabelle Lagny), éditons La Kainfristanaise, 2023.

Voir ses publications aux éditions Bruno Doucey. ; aux éditions Al Manar ; aux éditions La Kainfristanaise ; aux éditions L’Harmattan.

Son site : https://www.salahalhamdanipoet.com/ ; y lire entre autres son portrait biographique et littéraire par Isabelle Lagny.

Entretien avec Carole Mesrobian, et liste des publications : Recours au poème, 30 août 2024.

Entretien avec Bruno Doucey, sur youtube (25 mars 2014).

Présence à Francopolis : coup de cœur de Dana Shishmanian (décembre 2013) ; signalement de ses recueils à la rubrique Annonces 2025.

 

Collègue de génération et d’exil du poète, Yousif Naser (né à Bagdad en 1952) est artiste peintre ; voir son auto-présentation sur artification.org.

 

(D.S.)

 

 

Salah Al Hamdani

Francopolis, Hiver 2025

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