Soldat
Un crayon de glace
Grâce auquel on
écrit
Les textes sacrés
Il neige des
cigales
Un seul flocon
Fait la taille de
ma main
J’ai si peur qu’il
fonde
Avant que je ne le
cueille
L’arbre autour
duquel il voltige
Est un tilleul empereur
au tronc noueux
Qui parle la même
langue que moi
Plusieurs missions
dans le ciel
Mais je remplis les
critères d’une seule d’entre elles
Disciple du mage
muet
En me rendant au
château - vision fulgurante
Je traverse une
steppe immense
Une prairie aveugle
et blanche
Où se tiennent des
centaines d’hommes malheureux
Ce sont les gueules
cassées de la
Grande guerre
Défigurées
La tête recouverte
d’un pansement
Criblée de balles
Les bras tendus
vers moi – oui, des damnés
Mais l’un d’eux
sort du rang
Il a su guérir son
propre visage
Première, deuxième,
troisième tentative
Perfection
accomplie
Je caresse sa joue
gauche
C’est comme s’il
n’avait jamais été blessé
Ange gardien, ô toi
qui peux
Toujours changer de
forme
Je sais léviter à ma
guise grâce au feu
Une vieille tzigane
me dit que je suis faite
Pour chanter,
guérir et danser
Je plane au-dessus
de la mer
Mais la légèreté me
tient captive des airs
J’apprendrai à lire
Les feuilles
animées par le vent
La braise et les
mains rugueuses
J’apprendrai
l’image
Du mouvement pur
Le démon de l’évier
Un démon est apparu
C’est le démon de
l’évier
Placé là afin que
Personne
Ne s’échappe du
rêve
Il a pris la forme
d’un petit bouledogue
Mais refusait de
devenir l’esclave
De celui qui le
contrôlait
Alors il a léché
les détritus
Dans le cercle
magique
Il s’est sacrifié –
enfin
Libre
Locus Solus
Au fond de la mer
Un jeune homme
avance dans une barque
Qui ne flotte pas
On peut y respirer
Il n’y a que lui et
moi dans cet océan
Les carcasses
animales
Défilent devant
nous
Lorsque nous
dépassons le squelette d’un requin
L’étrange passeur
dit :
« Ah, si nous
étions lundi, il serait vivant
Et je pourrais le
dévorer ! »
Puis, devant les
restes d’une pieuvre :
« Si nous étions
mardi, comme je pourrais
Encore la manger !
»
Et ainsi de suite
avec autant
De charognes qu’il
est de jours
Dans une semaine
Ce jeune homme a
l’air heureux
Seul à la fin du
monde
Sed Lex
Les roues du
chariot
Sont brisées
Un oiseau s'est
posé
Sur le bois
Comme une branche
La montagne n'a pas
De sommet
Les tables de la
loi
Écrites en lettres
de feu
Sont couvertes de
lierre
La vigne du désert
Étrangle la maison
Dont le toit
S'est écroulé
Ézéchiel a tué
l'aigle divin
Pour lui prendre
ses ailes
Et les teindre en
noir
|