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Chaque mois, comme à la grande époque du roman-feuilleton,
     nous vous présenterons un court conte ou nouvelle : 


NOUVELLE :  UNE AMITIE

par Éliette Vialle

Partie I

Mémoire… souvenirs… un écheveau de silhouettes, de visages ou de paysages entremêlés.

Si imbriqués les uns dans les autres, ternis par la poussière du temps que seul en subsiste un magma terne et grisailleux. Mais, parfois surgit un fil plus clair ou plus sombre, l’esprit s’en saisit, le tire et dévide la pellicule où s’accrochent des lambeaux de vie à demi-effacés, et là, soudain, surgissent une image, un évènement qui ont marqué notre passé. Les souvenirs affluent, et le passé reprend corps.

Je me vois, moi, à l’âge de onze ans environ, hissée sur un amas de rochers gris qui dominaient la rivière limpide et chantante. Et toute cette lumière irradie le souvenir amer de cette amitié perdue, négligée par la vie, oubliée par ma mémoire…

J’escaladais souplement les rochers pour atteindre la source où je puisais, chaque jour, dans de grandes bouteilles,  la boisson quotidienne.

Le ciel de fin d’été était comme en Provence, d’un bleu limpide et soutenu, dénué de nuages. Les eaux transparentes de la cascade, le reflétaient et en réfractaient et en multipliaient la lumière.

A contre-jour, les silhouettes des touristes n’étaient plus que des graffitis noirs et mouvants. Au-dessus de moi, j’aperçus une forme juvénile : short et cheveux courts : fille ou garçon ? Mais les petits pieds qui s’accrochaient maladroitement aux rochers offraient des ongles joliment peints en rouge vif. Je relevais la tête, et la vis, forme sombre et tanagra menu comme finement sculptée dans un bois exotique. Elle avait de jolies jambes ; mollets et cuisses ronds et fermes, des petits seins pointaient sous le maillot clair qui enserrait son buste. En l’observant, je songeais à "Sylvie" la sylphide de Nerval.

Fascinée, je lui souris, elle entrouvrit timidement ses lèvres enfantines. Elle avait jeté de côté ses sabots de bois verni, pour mieux prendre pied sur la surface glissante et cahotique de la roche.

- Veux-tu, lui dis-je, me donner ta gourde et je la remplirai.
- Merci, me répondit-elle , je "vous" en serais reconnaissante, j’ai peur de ne pas être chaussée pour cette escalade.

Sa politesse me fit grande impression. J’étais subjuguée… Oh ! Comme je me sentais pataude avec mes vêtements mal arrangés, mes grosses chaussures de sport, mes cheveux tirés en queue de cheval, d’où s’échappaient des mèches frisottées… Moi, le garçon manqué et elle, face à moi, l’incarnation de la féminité pré-adolescente. J’ignorais alors l’expression "Lolita".

Elle me tendit sa gourde, je la remplis sans oser la regarder en face, elle était la créature du soleil, la nymphe de la fin de saison… Mon cœur battait plus vite… Je  la lui  rendis , et avec une hardiesse qui m’étonna moi-même, je lui offris :

- Voulez-"vous" m’attendre, je remplis mes bouteilles et je vous conduirai au village en passant par les prés : le chemin sera plus facile…

Elle acquiesça : « je m’appelle D……., je suis en vacances chez ma grand-mère ».
Je remontai sur la roche en essayant d’être gracieuse, je lui tendis la main.

Nous avions la même taille, même âge, et ce que je n’imaginais pas : la même corpulence.
J’étais éblouie, séduite… Le soleil au zénith nous enveloppait d’une lumière que la fin de l’été adoucissait.

Tandis que des colchiques mauves tachetaient l’herbe drue, nous allâmes à travers champs jusqu’au petit pont de bois qui enjambait la rivière plus calme et plus étale.

La conversation fut aisée ; arrivées au village, nous nous séparâmes en promettant de nous revoir…

à suivre... Partie 2

Francopolis avril 2015
Éliette Vialle
 

Créé le 1 mars 2002

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