Le Salon de lecture

Des textes des membres de l'équipe ou invités
surgis aux hasard de nos rencontres


Angèle Paoli - Damien Gabriels - Emmanuel Rastouil... et plus

ACCUEIL  -  SALON DE LECTURE  -  FRANCO-SEMAILLES  -  CRÉAPHONIE

APHORISMES & BILLETS HUMOUR -
CONTES & CHANSONS  -  LANGUE EN WEB  -  UNE VIE, UN POÈTE

LECTURES CHRONIQUES  -  VUES DE FRANCOPHONIE  -  GUEULE DE MOTS  & LES PIEDS DE MOTS

SUIVRE UN AUTEUR -
PUBLICATIONS SPÉCIALES  -  LIENS &TROUVAILLES  - ANNONCES

LISTES DES AUTEURS PUBLIÉS & COMMENTAIRES  -  LES FRANCOPOLISTESPOÈMES DU FORUM


CHRISTIANE LOUBIER


POUR COMMENCER

Pour commencer
Si je pouvais toucher au vent
Je pourrais croire
À ces oiseaux qui volent ensemble
Sans jamais tomber










NOS CORDES A LINGE

Seize petits oiseaux
Blanc et beige
Sur un fil avec du linge

Le bonheur en pointillé
Pour nous qui vivons
Bien plus bas
Que nos cordes à linge



Photo Jean Provencher


PASSE L'OISEAU

Pois en fleurs au jardin
Il fait les cent pas
Sur la galerie étroite

Elle est morte ce matin
Pourtant sa pioche est là
Encore avec les roses

Immobiles pas plus qu’elle
Mes yeux las de soleil
S’en vont dormir
Dans leurs nids d’ombre

Ma main fatiguée de tenir le livre
Cherche les seins qui nagent
Dans un chandail trop large

Coule la lumière
Jappe le chien
Passe l’oiseau















LA BOITE A PAPILLONS

Il y eut un soir d’hiver
Un saccage de fleurs
Sur un divan vert

Le papillon offert
Restera plié
Dans son étui
Et moi épinglée
Dans ma boîte à chagrin
Les deux bras ouverts
Sur presque rien

Rien que trop de soleil
Comme une brûlure
Et tant–tant de vitre



À LA LISIÈRE

Comme une peine immense
Roulée dans un poing

L'arbre à pluie

Au-dessus des fleurs

Peut-être le goût du vent sur ma bouche
À la lisière où l'ombre sans couture se tait


               Photo Jean Provencher(détail)


SES MAINS COMME DES FRAMBOISIERS

Ses mains sèches
Comme des framboisiers
À cause de la vie
Ses mains vivantes
Qu’elles gantent souvent
Ne sont pas pour l’écriture au crayon noir

Dehors il y a l’automne
Ses rêves  ne roulent pas
Dans les rues encombrées
Avec les personnes

Dehors il y a le vent
Ses désirs acajou
Ne s’envolent pas avec les feuilles
Mais s’endorment sous son tablier
Avec leur part de nuit
Dans la maison fidèle



Il a beaucoup plu sur nos vies
J’ai longtemps joué sous la galerie
Beaucoup lu dans les penderies
Mourir est un pays sur les épaules
La peur commence dans les genoux

Vivre est une brèche
Dans la douleur du monde
Le tumulte de l’orage
Au cœur de la forêt
Craquante du mois d’août
Une parole chauve
Accrochée tête en bas
Aux ailes de la nuit





LES CARRIOLES HORS DU TEMPS


Vous n’avez plus connu
Ni vous ni moi
Cette vie jetée sur tout un peuple
Condamné d’avance à mourir de froid

Vous n’avez plus connu
Ces marcheurs bottés
Ces coureurs fatigués
Dormant dans les sapinages
Guettant les grands oiseaux
Et le pelage doux

Vous n’avez plus connu
L’hiver à chaque pas
Ces maisons calées jusqu’aux lucarnes
Cette neige tombant en peaux de lièvres
Vous n’avez plus connu
Ni vous ni moi
Ces constructeurs de traîneaux
Et de carrioles hors du temps

Vous n’avez plus connu
Le fusil au champ
Les arbres percés de chalumeau
Ces laboureurs et ces faucheurs
Dépendant du pis et des épis
Vous n’avez plus connu
Ces brodeuses et ces fileuses
Penchées sur la roue disparue

Vous n’avez plus connu
Cette patience à longueur d’année
Ni vous ni moi


Mêlant et démêlant
Le foin et les fils d’or
Avec la fourche de maintenant

Vous n’avez plus connu
Les boîtes de conserves
Changées en pots de géraniums
Les pruniers d’habitant
Les pommes surettes dans l’arbre
Les oiseaux avec le linge
Sous les larmiers des galeries

Vous n’avez plus connu
Le lin pour rouler la pâte
Les épluchures dans le tablier
Les bassines de l’accouchement
Le ber et la berçante

Vous n’avez plus connu
Le chant de l’harmonium
La peine s’égrenant aux chapelets
La solitude de bancs de quêteux
Et de bancs d’église

Surtout vous n’avez plus connu
Ni vous ni moi
Cette langue féconde
Débordant les granges et les étables
Ce fleuve ce patrimoine bleu
Qu’on range maintenant
Dans des coffres de cèdres
Comme on plie la courtepointe
Des velours anciens




TEMPS DE CHASSE


Au Nord
En Abitibi
La neige est tombée sur les fusils
Les chevreuils ont bramé
La mort commence en automne

Se gonfle la levure du doute
Le pays dont nous rêvions
Est une meute blessée
Un dieu timide
Derrière des paupières de vent
Un très haut chagrin
Sans le panache du refus



Photo Jean Provencher



Textes  : CHRISTIANE LOUBIER
Photos : C.Loubier et  Jean Provencher

ses écrits et présentation sur Francopolis


Salon de lecture
Francopolis mai 2010
recherche Lilas

Créé le 1 mars 2002

A visionner avec Internet Explorer