Vos textes publiés ici après soumission au comité de poésie de francopolis.







 


 
 

 





Crépuscule une infographie de Laurence de sainte Maréville

Présentation de la sélection de textes de novembre

 

Par Juliette Schweisguth


« novembre.....
une sélection qui claque, frôle vibre ou caresse
avec ou sans rimes
un soleil des brumes et du sable
l'or des feuilles
l'art des mots
aux amours ouvertes
......à vos amours ....
.............enfin, je l'espère ...... »

Ce poème est l'invitation de bienvenue de Jean-Pierre Clémençon (membre de notre comité) dans les rives de cet arc-en-ciel de novembre.

*

C'est avec plaisir que nous retrouvons notre plus jeune auteure, Sarah Godfroid, belge au talent déjà confirmé.
Elle vous offre aujourd'hui deux nouveaux-nés, "Déjà" et "Perdre connaissance" qui « donnent une impression d'une grande maturité débarrassée de toute rhétorique. » (Yves Heurté)

Stéphane Méliade renchérit (en deux versions !) : « J'aime le parti pris d'une certaine "originalité oblique", dans le sens où c'est par l'assemblage et la respiration d'éléments ordinaires que l'auteur parvient à créer un univers extra-ordinaire. Débarrassé de tout ornement, chaque vers prend alors l'étrange éclat de la nudité. Version plus courte : au lieu d'en foutre plein la vue, l'auteur en fout plein la vie. Deux textes coeurs qui causent à l'oreille en y posant un baiser au passage ».

Dans "Déjà" Yves Heurté évoque une « allégorie traditionnelle des trains, images de la vie, du temps et du destin. L'arrêt en gare symbolisant la mort... Ici, l'usage de l'allégorie est plus qu'heureuse avec de surprenants "pour y dénombrer des oiseaux" ».

Hélène Soris se recueille devant ce passage :
"A peine ai-je
le temps
de clore les yeux
qu'une nouvelle
saison s'annonce,
qu'un nouveau
cheveu blanc
me pousse dans la tête."

Et Juliette Schweisguth rêve : "un nouveau cheveu blanc me pousse dans la tête" « On a la sensation que ce cheveu pousse en elle, dans une tête-herbe, que ce blanc est un hiver plein de printemps... il me fait rêver ce cheveu blanc et ensuite il est dit : "admirer l'herbe qui pousse". Comme si une transparence se faisait entre le dedans et le dehors, paysages intérieur et extérieur se trouvent en harmonie, dans un printemps qui prend son temps, dans un hiver qui se vêt de vert. Je rêve ce poème qui prend le temps de "dénombrer des oiseaux". »

Dans "Perdre connaissance" Karl Létourneau y sent un ton « très singulier, une atmosphère qui vous prend, léger encore ici. "mains d'arbre", chevaux qui ruent....ménage à deux.": belle façon de quasi-dérouter. »

Hélène Soris caresse ce moment :
"mains d'arbre
à l'écorce douce
balancelle pour deux
une histoire simple de bonheur.
"



*

Philippe Bray est de retour au rendez-vous de novembre avec un poème-ritournelle "image de Marguerite Duras" que j'ai envie de rebaptiser "et patati et patata". Ce n'est pas Hélène Soris qui démentira ce nom dont elle se fait l'écho : « J'aime bien ce et patati et patata, il y a une respiration vivante. Je pense à la chanson de Piaf "la caissière au fond du café". Et la fin m'enchante. Peut être parce que certains jours j'ai l'impression que c'est ma vie ça. On me dirait que cet auteur vient juste de trouver sa liberté et que quoiqu'il arrive ça le rend heureux je ne serais pas très étonnée. Un poème que je qualifie de sincère. »

Gertrude Millaire ajoute : « Oui j'aime bien cette façon nonchalante de dire le monde... Puis c'est court et frais. »
 « Un poème court que je trouve remarquable. Je l'aime pour ses ruptures et ses ellipses, qui induisent plusieurs dimensions, c'est vraiment très bien fait, et à la fin une émotion grandissante, un concentré d'émotion. » nous confie Isabelle Servant.

Juliette Schweisguth entend « ce rythme de répétition brisée brisant la ritournelle "à l'âge où (...) je travaillais déjà (...) c'était il y a deux heures déjà" et dire que l'on commence à vouloir écrire et que les mots brisent cette vie toute faite d'avance. »
Quand Jean-Pierre Clémençon s'enthousiasme : « Je crois que ce petit texte sans manques met de bonne humeur. Il est difficile de faire simple et de dire beaucoup, cet auteur l'a fait en plus ça s'avale comme du petit lait;-)) »

Ecoutez le début :

"À l'âge où l'on n'a pas le droit de travailler, je travaillais déjà,
Je servais des verres de liquides et des cafés noirs,
C'était les prémisses de ma saga et patati et patata "


*


Nous accueillons avec joie un tout nouvel arrivant, Guillaume dit "Minimal Alien" qui se présente ainsi « Minimal Alien est mon pseudonyme de grapheur et de metteur en ville comme on dit metteur en scène. ». Ses trois poèmes "Couloir de la mer", "Frôleur" et "Banc d'ombrelles" firent un effet renversant sur les berges de Francopolis. L'entrée en scène est réussie ;-)

Petit dialogue de voix :

Yves Heurté, voix en la : « Et on ne retombe pas lourdement ! La poésie est tout en surprise originale, de l'humour et des images qui tiennent seules en "tige bleue" ou en ombrelle. On est encore dans la demeure d'un poète. »

Juliette Schweisguth, voix en sol : « Il y a une légèreté dans l'écriture qui pourtant est pleine, ouverte et l'on a envie de rester parcourir ces brèches ouvertes... »

Stéphane Méliade, voix en ré : « Très structurés dans leur progression, ces textes peuvent se permettre d'avoir des prolongements très poussés et d'emmener loin, en raison de cette structure. »

Gertrude Millaire, voix en do : « Voilà de quoi me réconcilier avec la poésie... si peu de mot et pourtant toute une vie...une souffrance sans gémissement...une force incroyable. »

Le "Couloir de la mer" a cette « sonorité choc qui ne se décolle intacte que pour la chute presque douce » scande Jean-Pierre Clémençon. Hélène Soris souffle : « seul le couloir de la mer lui permet de respirer. Je sens un enfermement dans un monde tourmenté, blessé. Je ne sais si je ressens juste mais éveiller une réflexion en si peu de mots ! Bravo ! »

Goûtez ces quelques vers pêchés par Gertrude Millaire

"seul reste
intacte
fichée en moi
la tige bleue qui me tient debout
le couloir de la mer"


"Frôleur" « invite à la réflexion mais on y pénètre sans effort. » nous glisse Hélène Soris qui éclaire ce vers : "naître d'une marque au cou" et « pense à celle d'une corde de pendu comme s'il voulait être parfois un autre. » Stéphane Méliade avance « On croirait une sorte de "sur-texte", qui mènerait à un autre texte, interne. »

"Banc d'ombrelles" est « plus "classique" dans son monde et plus "accessible" dans ses évocations, ce texte-ci est illuminé par cette image enfantine du banc d'ombrelles. Cela me fait penser à ce pianiste qui n'a jamais quitté, de sa naissance à sa mort, le bateau qui joignait l'Europe et les États-Unis, dans le film de Tornatore et qui dit, dans la scène du piano de Dieu : "moi aussi, j'ai des rêves, ils allaient de la poupe à la proue. Et la terre est un bateau trop grand pour moi" » imagine Stéphane Méliade. Karl Létourneau résume « poésie réfléchie, une leçon d'écriture, plein de double-sens. »


Jean-Pierre Clémençon, dans le silence, « laisse la magie agir » :

"pourtant
le long de ses côtes
vit bel et bien
un banc d'ombrelles
peuple au corps ouvert
qui scintille du désir
d'être raconté"

*

Patrick Joquel, auteur confirmé et déjà publié en recueils ouvre à nouveau le son du silence. Savourez la simplicité et la douceur de sa présentation « J'aime autant la mer que la montagne, le soleil que la neige, les raviolis que les abricots et beaucoup d'autres choses de la vie» Son poème "Un soir de harpe" est un battement de coquillage, une marée au coeur.

Les voix se livrent en vague :

« En général, je n'aime pas les artifices de mise en page. Ici, c'est tout différent. Les décalages sont la main du harpiste qui court d'accord en accord. Les intervalles entre certains vers laissent la main revenir pour d'autres notes. Retour musical des doigts. La grande force du poème vient de ce qu'on l'entend, ce poème-harpe. Il serait à dire comme chez les anciens grecs le poème s'accompagnait justement avec des genres de harpes. Aucune faiblesse, aucune longueur. Le ton est majeur et sans faute. Parfait. » (Yves Heurté)


« ....sur fond noir, je me rends compte que ces lignes de petits point ajoutent quelque chose aux mots, que chaque lecteur y voit la proéminence des cordes , y cherche un rythme ..........Ce texte en suspend en suspension frêle est magnifique. » (Jean-Pierre Clémençon)


*


"Le parti des libellules" d'Alain Freixe (souvenez-vous d "Arbres par le travers") a fait bondir le coeur de tout Francopolis :
Gertrude Millaire s'exalte : « Tout simplement génial, un délice à lire et relire... ça coule... et ça se tient...une vision qui me fascine, L'art de dire simplement ce qui n'est pas si simple. Une construction qui se tient et qui donne une force incroyable. ». Yves Heurté raconte « Ici, c'est l'allégorie d'un paysage mental et spirituel transposé sous la forme d'une campagne infernale. Un libellule légère ne nous sauve pas des monstres mais protège nos esprits par espérance. »

Nombre d'entre nous ont été sensibles à ce passage souligné par Hélène Soris :

"de vieux pendus écrivent
langue sur langue
sur la poussière d'un ciel de carton pâte"

Quand Jean-Pierre Clémençon marche dans ces empreintes :

"C'est noir partout
Un noir de cave humide
de vendange ratée
par trop de pluie
de brumes
de boue autour des fontaines"

*

Jean-Marc la Frenière vous partage sa "Prière athée" et un bleu de mémoire dans "Hôtel du Nord". Suivez la leçon de poésie d'Yves Heurté : « Ici réunis ce qui me semble le fondement de la poésie : justesse et évidence. Le rythme ne se force pas à épouser l'idée. Le plus souvent sautillant sur des vers pairs six et huit. Parfois un semblant maladroit, un vers impair qui n'est qu'une respiration dans ce qui pourrait passer pour découpage psalmodique lassant. L'imaginaire est beau, léger et juste, inattendu. Si la poésie est dans le détail, elle est ici.

"Prière athée" « un poil plus resserré » (Stéphane Méliade) atteindrait la perfection, mais on entre en communion avec cette prière d'oiseau.» « Ce poème a une respiration régulière que j'aime bien. "Avec des mots rescapés de l'enfance" oui cet auteur retrouve l'émerveillement d'un enfant, j'aime sa façon de "prier la nature", je ressens avec lui la si douce angoisse des jours où une aurore belle et transparente nous la fait redécouvrir. Et cette conclusion :

"Chaque matin d'un mot
Je nettoie le silence
Comme un oiseau qui prie
Dans l'église des feuilles."

est pour moi le véritable sens de la prière l'oiseau chante le bonheur de vivre je crois. L'oiseau n'a sans doute jamais parlé d'une supposée existence d'un dieu et sa chanson est pourtant un hymne. A la vie simple. » (Hélène Soris)

"Hôtel du Nord" est « une vraie belle manière, exacte, pure, j'aime les descriptions/inscriptions dans la nature. » (Isabelle Servant). Quand Hélène Soris entre dans un devenir-oiseau :

"L'oiseau ne retient pas
La chute des nuages."

« J'aime imaginer cet oiseau qui écarterait les ailes pour tenter d'empêcher de pleuvoir. Ca me fait penser à Brel et sa chanson, ce passage "avec un ciel si bas".... »

*

Ile Eniger accoste pour la première fois sur le sable de notre île. Elle « vit dans un minuscule village de l'arrière-pays Niçois, entre le feu et la glace. » Son poème "Du feu dans les herbes" séduit par la tenue de sa plume, par son rythme surprenant et semble trouver son unité, son cycle dans ces sauts de saisons.

Gertrude Millaire part « pour ce voyage à travers l'univers... on passe d'une neige au désert... on suit les saisons de ses émotions. "Alors, il neige bleu au centre du soleil." ». Avec cette « phrase émouvante » "les pauvres de Noël désossent leur misère" ce poème emmène Hélène Soris « dans un pays étranger très pauvre. Je suis déconcertée car le décor du second paragraphe est très différent. Mais il est magnifique aussi. (...) Et dans le quatrième cette vérité que je ressens profondément : "vieille avec celui qui part, jeune de celui qui vient". Pas poète !!? En tous cas d'une extrême sensibilité. »

Karl Létourneau, concis, note « Strophes-chocs, des épisodes bien construits : drame, retour, magnificence, conclusion. Enfin je le lis comme ça. »

Jean-Pierre Clémençon inscrit :"T'ai-je ouvert ? Comment m'as-tu trouvée dans ce perdu d'arêtes" « Très très belle entrée en surprise !!!! »

Juliette Schweisguth est transportée et note des « extraits de braise » avant de commenter

"Brutale, la mer prie en une plainte hostile"

"Des mains
dans les poubelles ont perdu leurs anneaux"

"tu cueilles le monde pour ma main"

On aurait envie de relever tous les mots du début à la fin tant l'écrit danse en harmonie avec les éléments, le jeu des sonorités qui en plus apporte un réel sens, une musique vous vient dans le coeur. "je ne suis pas poète" me surprend mais peut-être est-ce le cri de cette femme élément. Elle peut bien le crier ce "je ne suis pas poète", je le comprends, comprends que son corps résonne avec la nature, le rythme des marées, du désir... Il y a du feu, de la glace, du vent, de la terre et de la mer et des arbres et du désert et de la tendresse il y a de tout dans ces mots qui prennent vie. Ca vibre !!


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Arnaud Delcorte, jeune auteur belge, fait lui aussi son premier atterrissage dans notre port et vous embarque dans sa croisière de mots avec quatre poèmes "Saisons", "Animal", "Le corps du rêve" et "Suite américaine" qui ont déclenché des réactions très diverses.

Dans "Saisons" Karl Létourneau y voit « Une parenté certaine avec certains jeunes poètes québécois, notamment Bertrand Laverdure cf. "Audioguide": dans la force du discours, aussi avec le langage très particulier, nouveau, téméraire évocateur et éloquent. Images fortes et sans demi-mesure. » Stéphane Méliade rajoute « C'est inventif et précis, étonnant et remplace Pathos par Porthos/Aramis/Athos/D'artagnan. Ça s'escrime bien, et à la fin de l'envoi, ça touche. »

Juliette Schweisguth se questionne « J'ai un rapport ambigu à ce texte, cette écriture c'est très travaillé, parfois trop précieux, mais je ne sais pas, il y a quelque chose qui m'emporte et me retient. Ce petit passage surtout :

"Et imprimons l'encre nue des contes
Sur le front des fidèles
On nous dit révoltés"

Parfois aussi j'ai l'impression que ça pourrait devenir un poème oral, même autant travaillé dans l'écriture, je sens quelque chose dans le ton, dans le rythme qui m'emporte. »

"Animal" retient Jean-Pierre Clémençon « peut être pas par sa poésie, mais par la constatation "Notre amour incendiaire souligne la difficulté d'être" .....qui me semble tellement juste! »

"D'une manière moins bénigne
J'accepte le rôle du chien
Je refuse la nourriture et le vin"


"Corps du rêve" replonge Yves Heurté « dans le réel et un lyrisme de rue qui sonnent vrai et juste. L'ambiance, le découpage et l'imagerie sont cinématographiques. »

Hélène Soris retient "la métaphore de l'orchidée. Vrai cette fleur donne l'impression de dissimuler des secrets. Et l'auteur a envie de "disséquer" la vie simple dirait-on. Mais le jeune arabe lui reste simple. Ca me plaît cette idée.»

"Suite américaine" a pas mal étonné par sa rupture et sa singularité. Voici quelques commentaires : « Bingo, j'ai bronzé en le lisant, mon âme s'est burinée et j'ai de drôles de signes partout sur moi. » (Stéphane Méliade).« C'est celui que je préfère. Il nous invite à l'accompagner dans son voyage puis nous présente un personnage que je vois facilement. Le personnage resté présent et il me plaît c'est un artiste qui aime faire rêver. J'aime bien ceci un peu initiatique :

"Quelques temps à vivre
Et sa contemplation immobile de la nature
Deviendrait chose sacrée"

Et les tableaux emportés existent-ils vraiment ou seulement dans l'imagination de l'auteur? Oui, belle promenade. J'ai été dépaysée quelques instants. » (Hélène Soris)

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Denis Moreau se découvre à vous avec deux poèmes, "L'homme du septentrion" et "Maha Moho", aux formes étranges, au rythme envoûtant. « Il me manque sans doute pour être saisi un appoint culturel avec la force que je ressens dans ce qui est dit. Je pense à l'art de ces masques, grands négociateurs avec la mort. » dit Yves Heurté.

"L'homme du septentrion"dont l'écriture séduit malgré un manque apparent d'unité:

« Quand je lis j'imagine un décor de théâtre je vois très bien ce personnage un peu extra-terrestre. Les longs membres surtout à la fois fascinants et effrayants. Drôle de sensation.» (Hélène Soris)

"Non loin de là le ventre froid d' une mère
maintient à grand-peine la foudre distante de la
couche nuptiale"

Pour Hélène Soris "Maha Moho" est « une sorte de danse rituelle." "Maha Moho m'attire, renchérit Isabelle Servant, je suis fascinée par la répétition lancinante du nom, comme un rituel, il me semble voir des divinités indiennes se dérouler dans des temples » « On dirait un esprit polynésien. Doué, en tout cas, il va exactement où il veut. » (Stéphane Méliade)

"Maha Moho est la parole prononcée par une bouche de peaux mortes à travers
le masque lacéré d'un silence sans âge
Maha Moho
Devant l'homme apeuré qui sort de son rêve comme on s'enfonce avec lenteur
et pour jamais dans une terre vierge insatiable de pourriture"

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Bing, bang et badaboum, notre ami Thierry Roquet fait un retour tonitruant ce mois-ci encore avec "Drôle de couple" et "Roulette russe", deux nouvelles originales, détonantes et un brin insolentes ! Attention aux éclats !
Soit on adore, soit on passe son chemin ! Nous, on adore ! Même Karl Létourneau entre en délit de langue !
"Cet auteur a compris qu'en poésie on pouvait aussi parler autrement, inventer triturer un langage. Il traite les ellipses avec une habileté souveraine . "(Isabelle.Servant)

"Drôle de couple" « Je trouve cela sain d'explorer des avenues comme celle-ci, ce genre littéraire : dialogue avec quelques passages bruts, sans polissage. Je ne saisis pas tout dans ce texte, mais l'atmosphère me plaît. » (Karl Létourneau). « Mais c'est génial ce dialogue, une sorte de poème pièce de théâtre un humour, et cette fin à vous glacer votre homme ;-) Mais vraiment y'a ce côté décalé, ces phrases tranchantes, ces "pourquoi" et cette atmosphère qui font que ce dialogue théâtral est aussi un poème, je sais pas, je suis soufflée !! » (Juliette Schweisguth)

Et pour aiguiser vos dents, voici une petite reprise incisive de Jean-Pierre Clémençon :

« drôle de couple
pourquoi?
c'est plus commode
lui s'assoupit
elle non
pourquoi?
etc.......
pardon
pourquoi?
etc....
pourquoi?

parce que la lame est bien aiguisée dit-elle!!!!!!!!!!!!!
J'adore et ne me demandez pas pourquoi!!!!!!!!!!!!!!! »

Dans "Roulette russe" il est « Habile à jouer avec l'exagération, la schizophrénie. » (Karl Létourneau)

Oui cette "Roulette russe" a une certaine force !! C'est bien écrit, c'est rondement bien mené. Le talent est bel et bien visible !! De plus il y a une vraie réflexion dans cette roulette russe, le titre est très à propos et éclaire le texte mais le texte nous laisse la surprise aussi, il ne colle pas au titre, ils sont l'ombre et la lumière l'un de l'autre.
Le titre amène d'ailleurs la pensée qui se lit dans les lignes et trajectoires du hasard.

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Jean Agoupiets, encore un nouvel auteur, est une de nos plus belles surprises. Son poème "Les enfants résistent à presque tout" a un discours très « trempé dans l'humour noir » (Florence Noël) et nous a complètement renversé.


"moi le corps fait de plaques métalliques
prêtes à se disjoindre tant il était enflé
enceint d'un jardin noir
où poussaient d'ignobles monstres
mon corps était une plaisanterie
qu'on s'échangeait seulement bout par bout
rire d'un seul coup m'aurait reconstitué"

Voici quelques échos de nos voix :

« C'est délirant mais l'auteur nous accroche au trapèze de cet enfer. La famille de Bosch portée au cirque. L'auteur va jusqu'au bout de ses idées et moi jusqu'au bout de son texte. » (Yves Heurté)
« Ce genre de narration me plaît. J'aime le mysticisme, voire le délire et l'hallucination qui en ressortent, menés jusqu'au bout. » (Karl Létourneau)
« Jouissif, ce texte, ton pas gratuit, tant d'amour se devine sous la lame, couteau luisant comme un miroir d'Alice. Un ange passe ? Qu'on le découpe !" dit Jean Cocteau» (Stéphane Méliade)
« J'ai lu, lu et relu, parce qu'interpellée par l'écriture. Après le premier choc, le sujet complètement baroque et cruel,. je sens un incomparable sens de l'architecture, une construction parfaite par le mouvement d'approche des bouchers leur leitmotiv de plus en plus pressant" (Isabelle Servant)

 

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Michèle Metni Gharios, auteure libanaise, notre dernière invitée de novembre, vous présente Prise surprise, un témoignage photographique et Un refuge dans les yeux, une nouvelle très prenante.

Dans "Prise surprise" Gertrude Millaire garde cette réflexion :

"que les petits s'étaient donné le mot, décidés à détourner le regard, comme si, en voulant se fixer sur du papier au lieu de fixer du papier, ils contournaient délibérément la réalité en lui faisant le plus effronté des pieds de nez. "

"Un refuge dans les yeux" touche beaucoup Yves Heurté « par son universalité et son tragique journalier. On se venge sur celui qui est sans défense de ses propres échecs. C'est l'éternel bouc émissaire, et c'est aussi l'évasion dans un monde rêvé où on n'est pas celui qu'on sacrifie mais celui qui vit pour lui-même. ». Stéphane Méliade devient bien gourmand « C'est savoureux et ça sent bon. Un texte-fruit. »

Quand Juliette Schweisguth est conquise « "Vite, de l'air dans ma tête, du soleil dans mes poumons" : J'aime. J'aime cette écriture, et l'on a l'impression d'assister à une sorte de danse, il y a du mouvement dans les êtres, et comme un moment de respiration à plusieurs. Ces mouvements extérieurs des êtres et de leur corps, et le mouvement interne de l'adolescent et de l'arbre ami qui le permet d'être libre en lui. Danse entre la mère et l'adolescent, danse entre l'adolescent et l'arbre : deux danses différentes. J'aime beaucoup ce moment :

"Oui, je ne suis pas fait comme elle en a rêvé.
Mais m'a-t-elle au moins rêvé ? Ah ! Je rêve !"

Il y a de l'humour dans cette nouvelle poétique, et une grande qualité d'écriture. Pour moi c'est une excellente prose poétique. »

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Exceptionnellement, en hommage aux auteurs pour ces merveilleux moments en leur compagnie, et parce que leurs poèmes semblaient se répondre l'un à l'autre, semblaient poursuivre un même horizon, Stéphane Méliade, a eu l'idée de composer un poème mélangé. Je lui laisse la parole.

Enfin, l'invitation au voyage aurait un goût de trop peu sans une visite dans la page consacrée à Karl Létourneau et ses fraîcheurs gaspésiennes dans notre salon de lecture. Vous y découvrirez ses mots simples pour des vérités indécises et pourtant touchant d'amples territoires d'émotion, remuant de ci de là ses mots "dans un mauvais rangement des saisons".


En souhaitant que la promenade sera aussi vivifiante pour vous qu'elle l'a été pour nous, merci auteurs et lecteurs, et rendez-vous en décembre !

 

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Juliette Schweisguth pour le comité de Francopolis - novembre 2003




 

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Créé le 1 mars 2002

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