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connus et inconnus, venus des cinq continents.

SÉLECTION SEPTEMBRE 2011


création  Zuza Zielinska, artiste polonaise



La
SÉLECTION

des

AUTEURS






SEPTEMBRE

2011





préparée

par



Laurent

Philibert Caillat

 
Présentation

L’été se retire comme la marée. C’est généralement cette vilaine période patraque où l’on contemple le retour des écoliers sur les bancs (à regarder obliquement ceux qui sont nés pour les opprimer, aurait dit Lautréamont), et le retour de beaucoup d’autres au bagne, qui à l’usine, qui au bureau ou à la rue, avec des relents de soleils pressés, de temps libre frénétiquement gaspillé ou au contraire précieusement savouré. Mais la fournée de septembre marque également, pour Francopolis, une première sélection sans Juliette et ses lumières, ni de près, ni de loin. Aurait-elle aimé ce qui suit ? Rien n’est moins sûr, mais elle n’aurait pas manqué de le faire savoir !


Ainsi, est-ce une simple coïncidence, ou un signe de l’air du temps si certains des auteurs de ce mois-ci n’hésitent pas à user d’une encre souvent froide et noire ? La plupart des poèmes retenus sont peut-être un peu plus sombres que ce que la moyenne laisse habituellement filtrer. Certains lecteurs apprécieront, d’autres non. Mais si la poésie a pour vocation d’aider celui qui s’y adonne à trouver sa place/voie dans l’univers, elle ne doit rien négliger de cet univers ; elle doit laisser tomber ses œillères et, parfois, « regarder l’abîme en face », au risque de laisser « l’abîme ancrer son regard » en elle. Et il en va de même pour l’autre côté de la médaille : au moins l’un des auteurs de ce mois a su ne pas négliger son soleil.


Sans plus attendre, voici les textes qui ont été retenus par le comité.


Laurent


LES AUTEURS SÉLECTIONNÉS DE SEPTEMBRE 2011

Thomas Laforest
« Ut pictura poesis » est une bonne introduction aux textes de Thomas Laforest, qui est avant tout artiste peintre et graphiste. Si la tablette graphique et les pinceaux restent son support de choix, il est conscient que les mots peuvent également laisser des images fortes et durables, comme en témoignent ses textes. Leur style particulier, syncopé, grouillant, oral et grandiloquent, alternant le cynisme le plus cru et l’innocence, ont dérouté la plupart des membres du comité, mais ravi d’autres. Ainsi, seulement deux textes sur les cinq proposés ont été retenus, et un a obtenu une égalité de voix.

1. Aujourd’hui du Rose - 2. Au port - 3. Condoléances

Commentaires pour l’ensemble de ses textes :

André ne s’est pas laissé prendre au chaos proposé par l’auteur :
Écriture par trop superficielle, tentatives d'images psychédéliques, factices, noyées par un verbiage excessif, probablement voulu… Des effets rythmiques pesants bloquent le fier élan de ces poèmes. La liberté du ton se fige dans des ambiances creuses. L'aplomb quelque peu forcé, la légèreté ironique, la spontanéité apparente du discours me laissent plutôt perplexe.
Il lui reconnaît toutefois une certaine force :
Si cette critique semble impitoyable, c'est parce que j'estime que cet auteur est encore bien en dessous de sa valeur créatrice, et je l'encourage vivement à s'aventurer plus avant, à "cultiver des verrues sur son visage" selon l'expression de Rimbaud et surtout à se relire à haute voix jusqu'à ce que le chant surgisse. Je dis non à l'ensemble pour que "cet auteur saute le pas".
Éliette lui reproche peu ou prou la même chose :
Il y a dans l’ensemble des textes de ce premier auteur une sorte de violence qui n’arrive pas à s’exprimer, un cri de révolte, mais aussi à la fois espoir et amère désillusion. C’est décevant parce que le rythme ne soutient ni le vocabulaire pourtant violent ni les idées, un rythme mou.
Gerty, au contraire, s’est laissée emportée par le flot :
Un ensemble de textes qui se ressemblent par le style slam et le contenu, si bien qu’à la longue on pourrait décrocher mais l’auteur ne nous laisse pas assez de corde, il nous tient par la rapidité de ses images, nous en donne trop dans un laps de temps court. On est pris à son piège.
Et Lilas a foncièrement adhéré au magma désordonné des vers syncopés, qui font de leur auteur son coup de cœur pour cette fournée.
Dans ce journal intime de ses fureurs, l'auteur semble à la fois se défouler et entraîner ses forces pour convaincre et exhorter : la violence des sentiments s'exprime librement dans les apostrophes et le choix d'un rythme chaotique, à l'image même de ce qu'il évoque.


**
Commentaires : texte 1

1.
Aujourd’hui du Rose

L’auteur semble se forcer au bonheur, comme par lassitude de la noirceur. Éliette dit oui pour ce noir et blanc enrobé de rose. Gerty et Michel ajoutent un petit oui, de même qu’Aurore, qui aime bien le "tutoiement" et la familiarité évoquée.
Lilas aime beaucoup ce texte qui flirte délicieusement avec le sens, quant à elle.

« Mes oreillers
La neige pourra s’en occuper.
……..
Je ne laisse rien
T’en souviens-tu ?
Un filet d’eau
Le cadre de ta fenêtre
s’habille selon le temps
Du rose
Permettez »
 

**


Commentaires: texte 2
 

 2. Au port

Au port semble être un peu plus fédérateur ; l’auteur s’est emparé d’un tableau qu’on ne traite généralement que par le pittoresque, pour en souligner la cruauté et l’absurdité.
Pour Éliette, le rythme et l’idée sont en harmonie. Gerty vote oui également, car on y retrouve toujours ce genre de simplicité déguisée. Il donne du souffle à ses mots sans fioritures.
Michel et Aurore ajoutent un petit oui, particulièrement pour le rythme et le souffle du récit.
Lilas, adhère une fois encore au tableau proposé : des pêcheurs bien inquiétants, à la profession emblématique ! Beau jeu de mots sur les aigrefins !

« Méfie- toi de ces ogres fins      
De leurs fascinantes façons
De rire »

**

Commentaires: texte 3

3. Condoléances (texte en ballotage) - aux lecteurs de trancher.
Ce poème sombre, qui relève plus du « courant de la conscience » que d’une quelconque construction artisanale, Éliette et Aurore l’estiment précisément trop long, trop incohérent. Trop d'images qui ne m'émeuvent pas, indique-t'elle.
Michel, s’il a voté oui, concède que les longueurs empiètent sur le plaisir de lecture. Gerty, au contraire, continue de se laisser prendre au jeu de la logorrhée : Toujours le même style accrocheur, son essoufflement à raconter.
Lilas reste fidèle à sa première impression, même s’il ne s’agit pas de son texte préféré.


***
Corinne Le Lepvrier
Corinne nous a proposé cinq textes introspectifs imbus d’une touche féminine unique,
dont quatre ont été retenus, la plupart à l’unanimité.


1. (Elle) - 2. (Ou (inclusif) bien elle)
- 3. (La femme est accroupie sur le seuil) 4. (Elles savent)

Commentaires sur l’ensemble de ses textes :

Pour Éliette, ces poèmes sont à lire en bloc pour trouver toute leur force. Elle y a vu une évocation de l’écriture, allégorie, sous forme féminine. Gerty précise : cet auteur gagnerait à donner des titres à ses poèmes… un style ouvert qui coule différemment, ce qui lui donne une certaine puissance, un regroupement de poèmes axés sur la femme.
***

Commentaires: texte 1

1 (Elle)

Éliette a voté non, puisqu’il s’agit pour elle d’une sorte d’introduction sans valeur en soi.
André a apprécié l’art de l’auteur, sans adhérer suffisamment pour voter oui : belle facture, une sensibilité vive parcourt la chair mais à chaque fois des brouillages, des accrocs m'ôtent le plaisir que je prenais à lire.

« une dent contre le ciel
les interstices »

injurie le magnifique vers suivant : « effeuille le jour jusqu’à la prose »
Gerty, si elle a voté oui, estime également que certaines images manquent d’originalité :

« un œil contre la terre, une dent contre le ciel »

Aurore et Lilas émettent moins de réserve ; Aurore dit : on est curieux de lire les autres textes, car le rythme est prenant, et Lilas a aimé la sobriété qui rassemble en une seule et brève phrase deux des thèmes littéraires majeurs : l’inspiration de l'écrivain et des interstices qu'il explore.

« Elle inspire les interstices. »

Le verbe connotant le côté vital de cette attitude, et les interstices (l'entrevoyure de Ferré, L'embrasure de Dupin, et autres fissures et brèches)… renvoyant à l'un des rôles premiers de l'écrivain, du poète en particulier : se glisser « entre » pour se nourrir d'inconnu.
Et, comme André, elle note particulièrement la belle richesse de cette image :

« elle effeuille le jour jusqu'à la prose ».


**
                                                
Commentaires: texte 2

(Ou (inclusif) bien elle)

Pour André, ce poème est parasité par des rajouts inutiles (qui) infirment la fantaisie des images (ce « pourquoi » après falaise dans le deuxième poème) rompt la dimension fantastique du géant, la raison flétrit l'image.
Gerty, quant à elle, estime que l’auteur joue avec les mots, joue avec les métaphores. L’auteur décrit bien les différentes situations, rien d’explosif mais on le suit… dans ses descriptions bien imagées :

« la femme échange les enivrements et les brumes avec le ciel
 … pour former une ligne entre le paysage et le ciel et faire le tour du monde »

Aurore a été rebutée par la longueur du texte et la ponctuation des "ou bien" qui alourdit le sens.
Lilas se contente d’un petit oui après hésitation : dans ce poème, les choix (ordre des strophes, choix des scènes et détails) me semblent plus aléatoires. Mais l'auteur a peut-être voulu marquer ainsi l'imprévisible diversité féminine?
En revanche, elle reconnaît que la fin du poème - dernière strophe - peut être lue comme un élément qui "équilibre" l'ensemble : la femme, finalement, en dépit de ses multiples visages, n’aspire qu'à un foyer (mais elle y garderait la fantaisie de cet escalier, tout de même !)

**

Commentaires: texte 3

(La femme est accroupie sur le seuil)

Ce texte et celui qui suit sont, pour Éliette, les plus beaux et les plus fluides. André renchérit sur ce troisième poème : nous avons affaire à une belle performance scripturale à travers laquelle une voix déliée s'entend clairement. On trouve aussi dans ce long poème de multiples petits poèmes qui pourraient se suffire à eux-mêmes et cela m'enchante. Les raccourcis descriptifs « si... si... » font en quelque sorte des croche-pieds à l'enfant longiligne et aussi ce vers vraiment moche :

« contre les arbres-mots pas plus beaux là-bas »

Gerty, Aurore et Lilas ont apprécié la force des images, notamment, pour Gerty, la boucle décrite par la première et la dernière image :

« La femme est accroupie sur le seuil »

Lilas retient :

« Elle écrirait l'enfant longiligne qui courait en sandales »
et encore « les bras levés amassant les miettes du ciel »

**

Commentaires: texte 4

(Elles savent)

À propos du texte 4, André avoue : j'ai enfin pu me laisser porter par le mouvement alerte et flexible et la facilité formelle du poème.
Gerty, au contraire, reproche au texte un goût d’inachevé qui l’a fait hésiter, mais finit par voter oui pour :

« et le vent qui remonte le long des nuques »

Comme André, Aurore s’est laissée facilement entraîner par le rythme vif et très mélodieux de ce bref et touchant poème: toujours le rappel à l'écriture et les femmes... Une poésie fluide qui peut nous emporter rapidement.
Pour Lilas, c’est toutefois un petit oui : j'ai aimé les tableaux du début, pas la fin. Peu poétique.



***
Blandine Lavocat
Blandine, jeune poétesse de 24 ans nous a fait parvenir quatre textes, trois acceptés et un à égalité de voix,
dont deux jolis poèmes d’inspiration enfantine, comptines douces-amères ramenant à Lewis Carroll.


1. Poème du chat émancipé - 2. Enfance -
3. Rengaine - Texte 4. Vieille connaissance


Commentaires sur l’ensemble de ses textes :

Pour Gerty, cet auteur fait plus dans le conte que la poésie. Conte d’un enfant… ce regard de l’enfance qu’elle veut à tout prix préserver. Michel se laisse lui aussi prendre au charme acidulé de l’ensemble : parler des chats avec ces yeux de l’enfance, comme des contes écrits pour eux. Comment ne pas adhérer ! Le dernier texte est particulièrement réussi, à mes yeux.
André, en revanche, s’il n’est pas insensible à l’atmosphère qui s’en dégage, n’a retenu aucun des textes tout en restant encourageant : touchant, joli, plein de naïveté (comme des dessins d'enfant) mais il me semble être devant le début d'un processus d'écriture qui a besoin de s'approfondir, d'éprouver ses possibilités, de se trouver.

**
Commentaires: texte 1

Poème du chat émancipé

Pour Éliette, textes 1 et 2 forment un tout agréable, du même style faussement naïf. Mais cela peut ne pas plaire pour la même raison.
Gerty et Lilas disent oui à ce regard d’enfant parfois cruel, émouvant en tout cas. Gerty retient :

« fondant en pluie »

Aurore n’adhère toutefois pas au parti-pris de l’auteur : trop de simplicité, de phrases déjà un peu « cliché ». La naïveté et la reprise des images, des thèmes chers aux contes sont assez irritantes.


**
Commentaires: texte 2

3. Enfance

Gerty se laisse toujours porter par cette légèreté, ce jeune souffle sous l’emprise de son enfance qu’elle ne veut pas perdre.
Lilas également : certes je préfère le premier, qui me semble plus suggestif, mais je garderai les vers suivants, pour la fêlure :

« Prends garde à l'inoubliable
car parfois il s'en va parfois on oublie
parfois on s'en va
l'enfance endormie
s'enfonce dans la nuit »

**
Commentaires: texte 3

3. Rengaine (texte en ballotage) aux lecteurs de trancher.

Pour Éliette, le charme n’a cette fois pas opéré, malgré, un poème pas désagréable, vaguement mélancolique.
Lilas, estime quant à elle que ce texte et le suivant, font plutôt penser à des paroles de chansonnettes sans prétention.
Gerty continue d’apprécier cette simplicité : comme le titre le dit, une rengaine… quoi !
Aurore, cette fois, s’est abandonnée à la mélodie efficace des mots : simple mais les images sont parlantes, universelles. Le rythme est enlevé, le style est clair, ce qui donne une netteté appréciable dans la lecture.

**
Commentaires: texte 4

4. Vieille connaissance

L’auteur nous apprend que ce poème lui a été inspiré par la nostalgie éprouvée à la lecture de certains textes de Prévert. Mais trop de simplicité tue la simplicité pour Aurore : le style est toujours simple mais beaucoup trop. Les sous entendus ne sont pas émouvants.
Éliette et Gerty restent « clientes » de cette fraîcheur, et André souligne ce texte où s'impose une réflexion pertinente sur la poésie.



***

Rosemay Nivard
Rosemay est une poétesse réunionnaise qui a publié dans maintes revues.
Elle nous offre ici cinq poèmes, tous reçus à l’unanimité. Son habileté consiste à nous parler
de son environnement quotidien sans tomber dans le cliché de la littérature de voyage
et de l’exotisme bon marché ; ici, le contexte et le fond sont étroitement mêlés
et se nourrissent l’un l’autre, appuyés par des images puissantes, reprises et soulignées par les votants.


1. Dans la fresque d’enfant - 2. Tags captation  - 3. (Les pans du jambrosade) -
4. Scherzo d’azalées - 5. Vue imprenable


Commentaires sur l'ensemble de ses textes :

Michel et Gerty saluent la force de la voix de l’auteur, l’habileté avec laquelle il nous aspire dans son quotidien : Quel talent pour parler de son ile ! s’exclame Michel. De la belle poésie, simple avec ses mots à lui qui donnent une vérité forte à son discours.
Éliette s’est particulièrement laissé porter par ce dépaysement : cet auteur colore sa poésie, l’épice et nous fait sentir les fragrances de son Ile.
Pour Aurore, la fraîcheur des propos tenus, le style très doux et parfumé font de ces textes un monde "enchanté". Tout est bien imagé, les descriptions se font légères sous fond de gravité mais le tout subtilement enrobé de couleurs chaudes dépaysantes. J'aime bien ce « monde » là, et Lilas salue l’authenticité et la richesse de l’ensemble.
André, enfin, aime ce voyage et sa profondeur : la liberté au bout du chemin. J'aime particulièrement les descriptions du quotidien et les sensations vivantes du pays natal de cet auteur qui nous envoûte avec les mots de son dialecte agissant sur l'auditeur comme des chansons d'un temps très ancien dont on se prend à regretter l'absence dans nos contrées biffées de grisaille normative.

**
Commentaires: texte 1

1. Dans la fresque d’enfant 

« Je suis poisson
Dans une fresque » souligne Michel
Cette évocation colorée et nostalgique a fait penser Éliette à Prévert. Lilas voit l’auteur enfant, un très ancien souvenir qui rappellera à beaucoup d'entre nous, probablement, de semblables moments de réflexion. Peut-être est-il « au piquet » devant cette fresque, ou, plus simplement, son bureau en est-il situé à proximité ?  Gerty : Des images associées aux couleurs de son enfance.

**
Commentaires: texte 2

2. Tags captation

Les votants ont apprécié le rythme, la force évocatrice du poème, et chacun en a retenu des vers intenses.
Michel cite :

« Vin de la révolte
d’une jeunesse de nuit »

Lilas souligne le rythme des :

« Cicatrices pendues, suspendues
cachées bâclées sublimées
Acte de guerre
Dans l’exil quotidien
Poèmes dessinés
Cris brefs »

Et le renvoi, le décalage avec le regard d'un insulaire pour une belle fin :

« Photographier
comme photographier le bord de la mer »

Gerty, enfin, retient également la fin, son cri désespérant :

« Ce bord de résistance,
chemin buissonnier
d’invisibles scribes »


**
Commentaires: texte 3

3. (Les pans du jambrosade)

À propos de ce poème/hommage où se mêlent une poésie aux images colorées et uniques, et une réalité concrète, abrupte, André a aimé le fait qu’il fait partager l'expérience réelle de ceux qui observent, apprennent et agissent. Un deuxième oui en réaction du fait qu'une grande part de l'écriture poétique contemporaine à tendance à s'isoler dans des forteresses mentales abstraites.
Éliette y voit un regard féminin entre désir et peur et Michel la qualité des images :

« Pourtant quand tu jettes le galet sur ta proie
Ton geste me semble faire partie de moi
Quand tu portes ton ballot de letchis sur l’épaule
C’est Noël que tu me donnes avec ses nuits douces »

Gerty apprécie une fois encore la force évocatrice de l’atmosphère : l’auteur nous donne les couleurs de son île… on est transporté. Lilas pour le clair l'hommage :

« À écarter les pans du jambrosade* blanc accroché à ta roche
j’ai gardé de tes mains un souvenir de crochets de montagne
…………………………………..
Homme de mon île, cuisinier, chasseur, constructeur, musicien
Je te rends  hommage »



**
Commentaires: texte 4

4. Scherzo d’azalées

« Les azalées se déploient en scherzo
alterné ponctué de rosée »
 

Ces quelques mots ont fait l’unanimité…chez Michel, Eliette, Lilas et Gerty renchérit : sa poésie passe par ses yeux et les couleurs de son île.
Pour Éliette, un texte dense et beau. Lilas adhère également à la profondeur et à la beauté de l’évocation, tout en soulignant cette fin qui ramène à un pan plus rude de la réalité : les toits de tôle…

« Les azalées se déploient en scherzo
alterné ponctué de rosée
La cendre blanche, la cendre grise
au dessous de l’alambic
Volutes volent, comptent les gouttes
de vétiver de géranium
pour aller jusqu’à la fin de l’année
pour aller donner à manger
à toute la marmaille qui saute
de joie devant l’arc-en-ciel au dessus des toits
au dessus des toits
de tôle »

 

**

Commentaires: texte 5

5. Vue imprenable

Pour Lilas ce texte, ainsi que le précédent, sonne comme un témoignage

« … l’homme
Assis au tas de bois
Une taffe, une bulle
libre, l’œil pétillant
Me montre du doigt
à cent- quatre- vint degrés
Sa liberté »

ELiette, moins sensible à ce texte mais donne son accord.
Michel aime :

« Je vois la griffe du chiendent
Parfum de misère »

Gerty continue d’apprécier le dépaysement, et ce cri d’espoir dans sa pauvreté… qui marque la fin surprenante.

« Me montre du doigt
à cent quatre-vingts degrés
Sa liberté »



*****
Bernadette Delage
Bernadette nous avait déjà confié quelques poèmes il y a deux ans. Elle revient ici avec cinq textes introspectifs,
intenses et durs, parfois crus et cyniques, qui ont fait l’unanimité auprès du comité de lecture.


1. Ma maison sous terre - 2. Ces pages seront mon écorce empalée - 3. Décoction -
4. Quelque chose de cette mère où s’entrouvre ton ventre - 5. Voie d’ombre


Commentaires sur l'ensemble de ses textes :

Éliette prévient d’emblée : c’est l’auteur que j’ai préféré, peut-être en raison d’une écriture plus dense et plus rythmée, il y a plus de cohésion entre vocabulaire, idée et rythme.
Aurore la rejoint : Oui à tous ses textes ! Mon coup de cœur de cette fournée !
Des sentiments exaltants, empreints d'une sauvage douceur. Tout est à lire à haute voix tellement le rythme coule... De la légèreté pertinente avec des pointes de noirceur sans équivoque qui approfondissent les thèmes abordés. Une mélopée intense où les émotions fleurent bon. Une écriture "romantique", féminine par moments. Les tourments sont bien présents mais tout passe avec la clarté très simple de certaines images.
Gerty souligne : un auteur sensible aux effets de surconsommation, ce qui donne des textes d’un regard différent et d’un pessimisme à faire crier, ce que semble confirmer Lilas : il en émane une odeur de terre, de profonde tristesse, de douleur qui va jusqu'à la dépression.
(…) Tous ces poèmes viennent « des tripes » et l'accumulation de détails n'a-t-elle pour fonction que de vider le poète de toutes ces scories, cendres, terre, regards d’hiver ? Je ne le crois pas : l'écriture est présente, pour elle-même. Nous sommes face à un véritable auteur.
André,* enfin, se laisse conquérir par l’intégrité de l’auteur, sans oublier de nuancer : cet(te) auteur(e) se lance sans protection dans les espaces des questionnements inhérents à la beauté dévastatrice de la condition humaine. Il y a là de la rage d'écriture, une quête vers le chant profond. Dans l'élan fougueux de ces 5 poésies qui nous sont proposées, je constate cependant un manque de rigueur quant à l'architecture considérée dans son ensemble. Par exemple, certains vers créent une impression de surcharge et de banalité gênante ("ma mémoire a le cafard"). La dernière strophe du 4e poème est une illustration flagrante de déséquilibre. L'impact du dernier vers (trop long) est à mon sens désamorcé par l'arythmie pénible et l'affaissement des trois images précédentes (ma mémoire a le cafard/ mon corps est un désert/ une gare la nuit peuplée de vous). Malgré ces observations critiques d'un lecteur bénévole ne prétendant pas à l'objectivité, l'authenticité de cette poésie me saute à la figure.

Commentaires: texte 1

1. Ma maison sous terre

De ce tableau fort, chaotique, Éliette retient:

« la mer pleine dégueule ses vagues sur le pont »


Et Lilas souligne :

« Il fait froid nu sous l'écorce
tout est noir le bleu au ventre
je n’écrirai plus sans harnais »

Gerty confesse avoir du mal à entrer dans le poème, en raison d’un malaise que je ne sais expliquer, mais elle vote oui, et Michel note la grande désespérance de l’auteur, ainsi qu’un ton particulier sinon nouveau. J’aime :

« je n’écrirai plus sans harnais »

 
**
Commentaires: texte 2

2. Ces pages seront mon écorce empalée

Pour ce texte féroce et violent qui ne peut laisser indifférent, Gerty a l’impression que l’écriture est la bouée de sauvetage de l’auteur, ce que Lilas avait également pressenti...

« …et l’on se blottit entre deux oreillers
enchaînés au pouvoir des mots 

je voudrais toucher le feu de chacune d’elle
jusqu’à la plaie aller à l’ancre de la naissance
une harpe sculptée entre les seins
son chant grimpant jusqu’à l’inflexion de la rage
ces pages seront mon écorce empalée »


et Michel retient ces vers :

« tout est gris quand les yeux refusent la lumière »  et
« Je vous laisse les pépites d’or comme porte-bonheur dans un chant de glaise. »

 

**
Commentaires: texte 3
3. Décoction

Gerty salue une poésie engagée… un regard discret de nos erreurs de surconsommation qui tue la planète, et Michel précise : triple OUI. Parfait dans la diatribe, le déroulé de l’exposé. Poésie qui va loin ; qui frappe. J’aime ce passage :

« L’horizon est un mur sans altitude

transpercé d’une flèche au curare. »


**
Commentaires: texte 4

4. Quelque chose de cette mère où s’entrouvre ton ventre

Poème-bilan ? Transition ? Peut-être le plus fort de ceux que l’auteur a proposés. Si André a mis le doigt sur quelques défauts (voir plus haut) 1, la puissance des mots demeure, comme le note Gerty : oui… pour l’atmosphère qui s’en dégage… une forte désespérance… un inconfort renversant imprégné même dans le mobilier.

« Blafard est le teint
sur les murs sont écrites vos confidences
sur le canapé aussi des gestes incrustés »

Michel aime une certaine puissance d’évocation, d’images fortes, une hallucination contrôlée, et Lilas
garde :
 
« J’ai peur de me taire
j’ai peur de perdre la voix, amie qui me tient la main »


**

Commentaires: texte 5
5. Voie d’ombre

Ce poème d’où se dégage une impression d’impuissance, voire de résignation, clôt admirablement la sélection de l’auteur. Pour Gerty le texte dans sa totalité mérite d’être mis en avant, elle retient particulièrement ces vers :

« noires les idées – à mordre la chair

Blanc l’os de la mâchoire – à retenir le cri »

De même que Gerty, qui ajoute : oui… pour ce cri de désespérance… un regard trop cru… qu’on voudrait ignorer… une ombre au tableau de nos espérances et qui nous rattrape avec la force de ses images :

« Ailleurs dévastatrice la haine se propage

à terre meurent les enfants innocents
on se demande pourquoi ? 
» et
« noires les idées..../ Blanc l'os de la mâchoire »

Lilas met en avant :

« Sans rempart face au mauvais
suis-je en train de vivre la mort
alors que je flotte

suspendue à l’image »

Enfin, Michel continue d’adhérer, mais précise : oui, avec un peu de réticence toutefois, tant de noirceur finit par lasser.


***

Ainsi se termine cette « fournée ».
Merci aux membres du comité, et surtout aux auteurs qui ont pris la peine de nous faire parvenir leurs mots.

Nous vous invitons à présent au
Salon de lecture
pour un hommage à notre amie et complice Juliette
,
à qui cette sélection est dédiée.

Sa voix et ses commentaires, parfois enthousiastes,
parfois tranchés mais toujours pertinents nous ont manqué, et continueront de nous manquer.





Laurent pour Francopolis, septembre 2011
et les membres de Francopolis.

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Créé le 1 mars 2002

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