Vos textes publiés ici après soumission
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Vous y trouverez des poètes, des nouvellistes et romanciers, des auteurs de pièces de théâtre, hommes et femmes, connus et inconnus, venus des cinq continents.


photo Juliette Clochelune
 

Présentation
de la SÉLECTION
des auteurs

Mars
2011

préparée

Juliette Clochelune


LES AUTEURS SÉLECTIONNÉS DE MARS 2011

Mars arrive avec ses premières giboulées et le printemps qui approche! Notre équipe est en pleine effervescence elle aussi!  Sur les 21 textes présentés, 20 sont acceptés! Une première! Un seul fut refusé (à une voix près!).

Merci à  Aurore, Éliette, Gerty, André, Laurent,  Michel, Phil et XMatinaux!
Vos truffes savent dénicher l’humus de la poésie sous toutes ses formes.       
     
Cinq auteurs semblables et différents comme les cinq doigts de la main!  Venant du Maroc, d’Algérie et de France pour faire vivre toutes les couleurs de la francophonie.  Avec tous dans le coeur, la voix de la poésie qui les porte et nous emporte.... Tchin!

Ali Khadaoui
est un fervent défenseur de la culture amazigh,
il revient nous partager 3 de ses poèmes, ses combats. L’équipe a été enthousiaste!

1. Sous le regard  des roses - 2. La bougie qui éclaire la vie - 3. Sous la tente

Commentaires pour l’ensemble de ses textes :

André : Un Oui inconditionnel aux trois textes de ce poète véritable qui est, je pense, un homme à la conscience majestueuse et douloureuse (« Que dit le temps à tout ce qui veut grandir ?/  Que dit l'homme au temps quand il aime ? »)  un poète d'une dignité impressionnante fortement engagé dans le sens de la vie et de la fraternité humaine (« Seules demeurent des gouttes de vie/ dans les yeux de ceux qui ont aimé »). Un homme éprouvé par les luttes et les combats (« Que la vérité est fragile ») La méditation et l'action s'équilibrent (« Ce  « je » si familier autrefois est devenu étranger pour moi ») dans ces poèmes qui allient l'esprit d'une longue tradition de poésie traditionnelle (amazigh) à la recherche innovante et mesurée sur la langue, sans les exagérations abusives et les déstructurations systématiques caractérisant une certaine poésie se réclamant de l'avant-garde. Le poème se fait tour à tour récit, souffle, chanson, vision, élégie, ne se privant au passage d'un vers au suivant pas d'une pensée philosophique ou politique (« L'impasse moderniste a atteint ses limites/Le tout marchand / mensonge de tous les temps/ a vomi toutes ses perversions nourries par une expérience souvent douloureuse »), se donne à lire aussi bien qu'à écouter. Il condamne sans haine la folie humaine, lui qui a vu le regard de la femme éteint qui a perdu son enfant:
« Une femme pleure / en chantant / Memmi nu a talnin n taskkurt  / (Mon enfant aux  yeux de perdrix) / aux yeux éteints pour jamais … »
L’auteur sait en dépit des abîmes côtoyés toujours s'extasier et n'a pas rompu le chemin qui le relie à l'enfance : « Dans mon cœur /  toutes les fées palpitent / comme les prés verts de la mélancolie »
Lui qui a aussi perdu maints frères, sœurs  et amis : « À  la mémoire du poète assassiné/ j'arrose ces racines à l'agonie/ à coups de mots » ne désespère pas du devenir humain.
Sans s'illusionner, il a éprouvé dans sa chair et son esprit le pouvoir libérateur de la poésie :
«...Alors quand l'attente aura fini de dire le temps
                     Le poète seul continuera
de chevaucher les monts… »

Michel : Superbes textes. Richesse des images, des mots. La poésie déborde à chaque ligne. Trois fois OUI.
Philippe : oui à tous les textes. J’aime ta désinvolte rivière de l'éternité faite actualité. J'accède. Comment croiser le temps du sud. Celui du nord. Le temps du désert et celui d’Internet, celui de l’industrie et du quotidien, la présence artisanale. Des mots inventent à la fois ton regard au passé sur le présent, vient pour nous, du futur en mots. Je chevauche. Et du poète se compose les miettes, les graines tombées de son casse-croûte. Jusqu’au vertige des yeux d’aigle. Pour toi. De toi. Dans l’oubli. Les jours infinis. Aux sables déposent les mélancolies, des mots nous échappent, me rattrapent. Tu apprivoises le vent. Il rode à nouveau, oublie la peur de penser. Et la vie comme une aube, un regard un murmure, le poète écoute le silence.
Gerty : Une poésie engagée  mais non enragée. L’auteur dénonce, assume mais garde son équilibre et sa note optimiste.  Et j’aime la couleur de ses textes, pittoresque, symbolique, un peu comme une signature de sa terre natale qui lui colle aux pieds, à la peau et aux yeux. On voyage à travers ses textes, on prend le pouls de son patelin.
« les yeux humides scrutent la terre  à la recherche d’un papillon  incrusté dans le granit… »

**
1. Sous le regard  des roses a enthousiasmé notre équipe qui lui a offert un oui unanime!  Quelques échos...

Laurent : Très beau texte d'hésitation, de perte de soi, d'égarement, avec de belles images simples et joliment exprimées.
« Que dit la mer du vent d'Ouessant ?
Que dit le temps à tout ce qui veut grandir ?
Que dit l'homme au temps quand il aime ? »

X-Matinaux :  « je » est bien devenu étranger, sauf une fois au pluriel « nos yeux » Aperçus, beaux  dans leur brièveté sur la terre et sur l’air.
Aurore : Une prose simple, directe où les images nous transportent vers un monde ensoleillé.
Éliette : Ce poème exprime un élan : tout indique le désir de départ non concrétisé, mais l’âme est encore sous l’emprise de la terre et de sa beauté. De belles images qui créent des sensations et s’entremêlent au désir de partir, celui-ci est comme «incrusté dans le granit», le poème s’élargit à travers une série de questions au dernier tercet et le prolonge.
Gerty : Il garde toujours l’œil ouvert sur la vie par son questionnement et continue son combat sans amertume. Une belle leçon de sagesse et de patience.
« comme des pigeons sur une ligne électrique
un matin brumeux
    qui projettent le retour vers une terre lointaine.. »



 **
2. La bougie qui éclaire la vie, brille telle une flamme engagée. 

Éliette : Il se dégage un mouvement, et c’est au détriment de la poésie, mais c’est le cas de toute poésie engagée. 
X-Matinaux : opposition rigoureuse entre les démocraties = le mal et les cultures autochtones = le bien : pourquoi pas, ? mais cette dichotomie étouffe la poèsie.
Aurore : Une prose simple, directe où les images nous transportent vers un monde ensoleillé.
Laurent : Malgré un certain élan, je n'ai pas «accroché » au texte, que je trouve gâché par des vers trop prosaïques, trop clairs, trop directs : « Les démocraties s'enfoncent dans la complaisance
                                               et récoltent ainsi les foudres de l'ignorance »
« L'impasse moderniste a atteint ses limites »

C'est dommage, d'autant que l'image de l'abeille est très efficace et a le mérite de rester ouverte à différentes interprétations.
Aurore dit oui mais : une écriture plus «engagée»... même si la fluidité se perd un peu dans certains jeux de mots. Un vocabulaire adapté à la force contenue mais quand on en fait une lecture à haute voix, cela devient assez rébarbatif :
«telles de gigantesques ampoules
les cultures autochtones
illuminent la terre et les coeurs» 

Gerty : Une belle réflexion sur le combat de sa vie, sa flamme vacille parfois mais sa bougie éclaire les coins sombres. Reste attaché à ses racines, ce qui équilibre sa pensée.
  «  Et comme de telles gigantesques ampoules                      
                        les cultures autochtones illuminent le monde et les fleurs. »



3.
Sous la tente

Gerty : Toujours cette grande sagesse du poète.  Face à la souffrance, à la mort, il garde son équilibre.
« À la mémoire du poète assassiné                  
              j’arrose ces racines à l’agonie                               
                           à coups de mots. »

Aurore : Un texte plus long mais avec de très belles images. Une écriture du coeur, des rêves emplis d'espoir. 
XMatinaux : louable exaltation de la vie, l’amour, la paix, mais noyée dans un peu trop long bavardage!
Éliette : Texte trop long mais beau. Il commence comme une  élégie, longue plainte de la mère pour son enfant « aux yeux éteints ». Il possède une grande musicalité, surtout grâce à l’emploi de la langue du pays, mais très vite la violence fait irruption, en apportant une série de questionnements : « il y avait quoi au juste ghudane ? », puis le rêve amène l’espoir :
« le poète seul continuera » « seul le poète a su/ Regarder /A côté ». oui !
Laurent : J'ai beaucoup aimé ce long texte, sa progression, les vers qui se réduisent vers la fin, les accents de prière, l'accumulation de détails simples et évocateurs, le sentiment de décalage qui en ressort, et ces derniers vers, superbe conclusion :

          « Souvenir d'hier /de demain

                      Seul le poète a su /regarder / à côté… »


 

***

Hafsa Saifi
est une jeune poète algérienne qui publie 5 poèmes brefs, mais essentiels.

1. (la nuit se déplie) - 2. (l’arrière-saison) - 3. (l’absente)4. (une araignée) - 5. (brusquement)

Commentaires sur l’ensemble de ses textes :

Laurent : Oui à tous les textes de cet auteur, brefs, sobres, humbles et pleins d'images qui restent… Est-ce une suite ? Ils se succèdent avec fluidité et peignent par petites touches une atmosphère onirique et pourtant très ancrée dans la réalité… avec un soupçon de menace, m'a-t-il semblé, qui n'éclot pleinement que dans le cinquième texte, mais imprègne également les précédents ?
Gerty : Cet auteur y va dans le court… même très court comme une succession de tableaux que l’œil croque sur le vif.
Philippe : oui à tous les textes. Lorsque la nuit se déplie, je lis dans ma mémoire ta plume et je grave ta parole et j’apprends ton regard qui défait, qui dénoue ce qui dort en moi et j'accueille sur ton épaule, mes larmes d’un rire. La paix promet.
Michel : précise pour le texte 1 : Ce début du texte est superbe : «  Lorsque la nuit se déplie/ses ombres/se taisent entre les chiens »  Et cet autre au texte 4 : « une caresse/rempart contre la peur/Trace son arabesque. /Promet la paix/Pour cette nuit seulement » Les autres textes sont de la même qualité poétique, riches en couleurs, en évocations.
André : Oui aux poèmes 1, 2, et 4. parce qu'ils sont empreints de pudeur et de la naïveté si touchante de la jeunesse. Par ailleurs, leur brièveté cerne l'essentiel. Des vers tels que : « Lorsque la nuit se déplie/ Ses ombres/ Se taisent entre les chiens Libérés// Les enfants blessés de silence/ Retrouvent la parole» - « La métamorphose des jours/ Grave la mémoire/ De qui peut s'étonner/ D'un été qui s'enfuit...», m'enchantent littéralement. Par contre les deux autres textes sont trop discursifs et captifs d'expressions malvenues comme par exemple : « Sa présence vague/ aspire mon essence/ Jour et nuit, elle se gave/ De la déroute de la moelle... » ou bien cette « gorge enfermée en elle-même. »



**

1 (…la nuit se déplie)

André : Oui parce qu'ils sont empreints de pudeur et de la naïveté si touchante de la jeunesse. Par ailleurs, leur brièveté cerne l'essentiel.« la nuit se déplie. »
Laurent : Un tableau simple et sobre qui polnte un décor entre réel et rêve.                     
Gerty : texte court qui se dessine sur la rétine à ciel ouvert.                                                               
Éliette : Bref et beau : l’essentiel est dit, le mouvement en éventail souligne l’expression :
« la nuit se déplie »          
XMatinaux : heureuse évocation des rêves enfantins qui triomphent
« des chiens de garde » adultes. Et des vitraux diurnes trop clinquants ! C'est d'être concis et de susciter l'imagination même délirante.                                                                Aurore : court mais d'une précision intense. La clarté des propos peut émouvoir.
« Lorsque la nuit se déplie
Ses ombres
Se taisent entre les chiens
Libérés
Les enfants blessés de silence
Retrouvent la parole » 
  
                                                                                         

**
2 (l’arrière-saison)

Aurore: Des mots faciles et une structure un peu simple mais ça parle.                            
Éliette refuse : Bref, bien rythmé, même si quelques images sont très clichés : « les enfants vont s’asseoir, /Sur les bancs de l’école /Pour apprendre la vie  »
Gerty et Laurent disent oui à l’arrière-saison : un autre tableau concret que l’œil saisit au passage à l’école de la vie. (Gerty)  Là encore, ambiance réussie… (Laurent)
« grave la mémoire
de qui peut s'étonner
d'un été qui s'enfuit… »


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3 (l’absente) - plusieurs avis ont jaillit, discutant autour de cette image :
    « elle se gave de la déroute de la moelle épinière » :

Poème refusé par Éliette et Gerty qui trouvent l’image déroutante et Aurore : Cela me plaît moins. Que ce soit dans le vocabulaire, les images ou bien encore la structure des phrases. Quant à XMatinaux, pour lui, seule cette évocation sauve le poème.
Seul Laurent, reste en dehors de ce débat et résume : « Décalage du soi, dédoublement, toujours cette économie de mots et d'images qui vont à l'essentiel… »

**
4 (une araignée)


Laurent : Texte bref et simple qui évoque une sorte de haïku développé. Intéressant !
Éliette : Très beau texte on sent bien l’écrasement du soleil et le jeu des ombres.         
Aurore : Trop simpliste pour moi.
Gerty : Oui pour l’originalité et la simplicité du tableau… une belle observation que cette : « ombre qui circule anonyme. »


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5 (brusquement)

De ce texte, XMatinaux a tout compris : belle brièveté : le rire comme une forme d’amour.
Laurent : Dans la même veine que les autres, avec cette fois la présence d'un danger, d'un réconfort éphémère, des émotions clandestines.
Éliette : «brusquement» met en scène un vrai sursaut : le rire comme remède contre la peur. On sait qu’elle sera de courte durée : « Pour cette nuit seulement ».
Gerty : Oui… même si le premier coup de pinceau fait ombrage au reste, disons que le coup de crayon  qui suit : « caresse rempart contre la peur » et ce trait de la fin redonne un peu de son éclat à cette fresque. 
Michel retient :
« une caresse                                                                                      
rempart contre la peur                                                                                                 
Trace son arabesque.                                                                                                   
Promet la paix                                                                                                             
Pour cette nuit seulement »



***
Christine Normand (alias Ekimoz)
publie ici pour la première fois et a été ravie d’être accueillie dans notre communauté! Elle nous partage deux écrits :

1. De l’infini troublant
- 2. J’ai des fièvres rugissantes

Commentaires sur l’ensemble de ses textes :

André : Je sens chez cet auteur une grande puissance, une voix forte cherchant à s'extraire des gangues de l'ordinaire où, avec tant d'autres, la mienne y compris, elle se sent condamnée, en exil. Il y a un regard intense sur le monde et sur ses semblables. Cependant à force de procéder par énumérations, en longs phrasés (...), il perd et le rythme et le fil, en alourdissant sa propre démarche. (...) Le vers libre procure un espace salutaire. Trop de clichés cependant. Dans le dernier poème en prose, j'ai retenu:
«...il faut que le mot ordinaire offre une vision délestée du poids de l'habitude...»
Gerty : Cet auteur y va surtout dans le récit, un genre de rétrospection qui lui permet d’avancer. Une étape à passer pour mieux se centrer, je suppose.
Philippe : J’hésite, car ... Venue à la suite de l’auteure deux et de l’auteur un.
Un pas une marche en deçà, un cran ailleurs ... Dans une autre sphère... de ce que j’aime dans l’écriture et des noeuds qui coincent. Ça coince… là… Par exemple et entache le reste quoique je fasse :
« Poésie, impalpable pouls mais dont la puissance gronde »... le  « mais dont » vient se rajouter explicatif comme si moi lecteur je n’étais  pas capable de comprendre dans la simplicité ... D’une poésie, impalpable, pouls dont la puissance gronde... ce qui se dit à l’ombre des mots... il y a là un super flux… une insistance...  Un flux de mots de trop qui voulant dire ce que l’auteur veut dire.  M'oblitère sa pensées d’un cachet... dissimule  le dit des mots choisis une peu comme cacher une vérité de peur que  moi auteur je laisse passé ma pensée profonde... Ma vérité... Je dis oui quand même. C’est l’écart qui met en valeur les premiers textes...


**
1. De l’infini troublant

Éliette : Belle prose à propos d’une  rêverie angoissante face à l’infini, beaucoup d’allitérations : « Poésie impalpable  pouls mais dont la puissance gronde en toi » et  « écris de toute ta terreur d’être mortel ». Beau
Laurent : Après plusieurs lectures, le non l'emporte : ce catalogue est au final trop chargé, trop dense, souvent trop fleuri.
XMatinaux : Angoissante rêverie solitaire, bon retour obsessionnel l’impératif ou ordre strict donné soi même de refuser la mort.  Oui
Gerty : Oui. Même si le style est quelque peu lourd, cette prose nous entraîne dans son questionnement de survie, il nous livre le récit de son journal personnel quoi !
Michel : Oui, sans retenue. Ses questionnements me touchent. Les images abondent : « Chemin faisant, tutoie ta solitude, apprivoise-la en amie des mauvaises aubes. »


**
2. J’ai des fièvres rugissantes

Gerty : Oui pour ce récit. Au début, l’auteur nous étale les chiffons de sa malle, nous fait jouer le rôle de voyeur. Puis le vent tourne, il semble refaire ses bagages, se revêtir et affronter de face ce monde un peu pervers. Une démarche qui ne me fascine pas plus qu’il faut mais une démarche que je respecte.
Aurore : On voit de l'intensité poindre avec certains passages mais cela ne suffit pas à laisser une empreinte inoubliable.
Éliette : La première partie est intéressante, par contre la deuxième partie très lyrique et composée de quatre longues phrases  aussi échevelées que les fantasmagories qu’elles évoquent ; c’est sombre, sauvage, onirique et fantastique.
On peut aimer !  J’eusse aimé autrefois.                                                                                                            
Laurent : Cette fois, après hésitation, c'est un oui, pour cette sorte de confession parfois trop emphatique, mais finalement touchante par le « repentir
» final, cette tentative d'auto-persuasion… vouée à l'échec ou au succès ? L'ensemble gagnerait toutefois à être épuré, élagué…
XMatinaux refuse : Opposition classique entre l’univers macabre  et des « mondes oniriques ». Des images heureuses :
« j’ai des fièvres rugissantes », et d’autres plates.
Michel : Ce texte est inondé  par la variété de ses mondes intérieurs. Un réel poète que nous pouvons être fiers d’accueillir ici.




***

Jacques Laborde
nous sommes heureux d’ouvrir notre porte à 4 de ses poèmes.

1. J’attendrai - 2. Chanson des manèges - 3. Mortel été - 4. Spirale

Commentaires sur l'ensemble de ses textes :

Laurent : les textes de cet auteur m'ont plu «malgré
» moi … en effet, tous ont un petit air de déjà-lu, mais ils sont si bien ficelés, si habilement écris, que je me suis globalement laissé prendre au jeu…
Gerty : Un auteur qui me donne quelques hésitations par son rythme assez variable. J’aime bien qu’il ait eu l’intelligence de nous positionner dès le début par ses titres.
Philippe : Oui à tous les textes. J’attends ton rire éclair. Au cou noué la feuille épaisse, la route bouseuse, j’écoute ton grillon des montagnes sourdes. Je me déshabille des céramiques. Je bois un doigt de punch. Inconsolable. Je suis muet. Non par civilité. Pour entendre sans me recroqueviller les mots retords que tu délies. Et du travail silencieux pour nous accroché à son fil. Ton numéro, j'appelle.


**
1. J'attendrai surprend mais envoûte par son rythme dépaysant.

André
: Ce poème, je l'aurais préféré écrit en prose, peut-être à cause de la cohabitation de vers trop inégaux en longueur par lesquelles la voix achoppe à la lecture. J'avoue m'être laissé envoûté par ses deux vers :
« J'attendrai la montée des degrés dans la nuit scolopendre
Au silence enseveli »

Cette promenade exotique qu'on aurait pu croire pleine  de parfums et d'images «dépaysantes» devient très «inquiétante» à la fin. Comme si le promeneur avait été victime d'un sort... celui que lancent les premiers vers, peut-être.
Aurore : On sent qu'il y a beaucoup de travail dans cette écriture. Le rythme est soutenu. Je suis malgré tout moins sensible mais bravo pour ce travail.                                             
Éliette : Beau rythme,  belles images comme celles d’un rêve :
« viendrez-vous à l’heure du diable
Pour mon repos de bois cloué ? »

X Matinaux : Suite de belles évocations de la mort, parfois même joliment inattendues « compagnie générale transatlantique » « chair à coco » «  coupe –coupe »
Michel : Je reste sur ma faim! Le début est prometteur, mais le déroulement du poème prend ensuite une tournure qui ne me plait pas.                                                                           
Gerty : Hésitation… ça manque quelque peu de fluidité mais je donne mon accord pour cette écriture qui se promène dans un décor différent : à travers la canne et dans une bananeraie.
« Lorsqu’à travers la canne coupante            
Les poumons gonflés de rhum… »

En aurait-il abusé ?  ;-) … il y a des jours comme ça…!
Laurent : Étrangement, l'accumulation des clichés exotiques fonctionne très bien ici…
« Le crissement des chaînes
Et la Compagnie Générale Transatlantique
Rêvassant d'une longue houle
Bombée tel un casque colonial »


**
2. Chanson des manèges emporte par sa musique d’autrefois.

André : une belle, émouvante chanson populaire comme il s'en faisait autrefois, une poésie entraînante, et musicale.
Je retrouve l'enfance et mes longues randonnées dans le Paris de mon adolescence. J'entends les musiques des rues, je sens tous les parfums de ce Paris qui ne subsiste plus guère que dans des quartiers ou la «populace» n'a pas été «foutue à la porte».
Laurent : Là encore, l'habileté de l'auteur permet de lire avec un intérêt cette succession d'images familières, presque éculées. Ça fonctionne !
XMatinaux : Belle chanson! endécasyllabes originaux et rares,  rimes pittoresques : je cite « Dealer et accroche-cœur » 
Gerty : Là aussi hésitation, serait-ce dû à  la rime… ?  Je donne mon accord, non pour ce poème mais pour cette chanson toute légère… sans prétention et surtout parce que l’auteur nous met déjà en terrain dans son titre.                             
Aurore : Cela manque de finesse, un peu trop «lourd». 
Michel : Belle chanson comme les poètes en écrivaient jadis.
Éliette : Beau poème  bien rythmé comme une ronde enfantine, c’est l’oubli dans la fête : Tout évoque la joie :
« ce soir, c’est la fête on fait choux gras » Mais qu’y a-t-il sous cette apparente gaîté : pour «  les amoureux en rade » 
ou « le petit dealer », « aimez –la comme on aime une rose », n’est ce pas une joie factice et fugace en attendant la grande et profonde angoisse ?



**
3. Mortel été
, ce fait divers se déguise en un amusant sonnet.

André : Il y a une atmosphère qui relève tout à la fois de Baudelaire et de Prévert dans ce poème qui prend forme de sonnet. Et puis le mystère : Poupée ou suicidée? L'enquête en cours ne semble pas troubler l'assassin « Qui seul chez lui, interminablement verse de l'eau dans son vin... ».  J'aime beaucoup.
Laurent : Poésie du fait-divers macabre… simple, sombre sans être totalement dénué d'humour.
XMatinaux : Bon sonnet aux rimes souvent riches et parfois amusantes « Ourcq et lourd » « Gendarmerie et brie », alternances de style poétique et prosaïque, que je perçois
humoristique.
Aurore : Mini nouvelle policière mais pas assez d'intensité pour moi. Original, un style particulier cependant.
Michel : n’aime pas ce côté morbide.                                                                                               
Gerty : Récit court, une scène de crime traité en si peu de mots ! Presqu’un exploit.
Éliette : Malaise qui progresse de « l’aube scélérate » à la  « poupée comme une lune absorbée par le jour ».
Et les deux tercets concentrés sur des visions triviales et l’enquête, puis le bouquet final : vision de l’assassin :
« qui seul chez lui, interminablement  verse de l’eau dans son vin » !!!! Texte plein de malice !
« On interroge des voisins, on scrute dans la terre,
Afin de mieux identifier les pas de l’assassin
Qui seul chez lui, interminablement verse de l’eau dans son vin...»


**
4. Spirale

Laurent : là encore, l'intrusion du quotidien dans ce qu'il a de plus bêtement technique est un écueil sur lequel beaucoup de poètes ont échoué, mais pas ici !
Gerty : il me fait sourire par son style… de spirale.
Aurore : une tendresse cachée, des mots fluides et assez intéressants dans la manière de les manipuler.
XMatinaux : Le poème en forme de «spirale» illustre bien le titre… spirale qui rétrécit jusqu’à la fin (mort ?). De riches assonances.
André : oui, pour la malice.    
Éliette : «Spirale» bien enroulée avec des mots et des effets de vocabulaire : « hélicoïdale » ou  « torticolis », des effets de rythme de plus en plus court jusqu’à l’évocation de la mort... par strangulation. Bien vu ! et drôle :
«  entor-
-tillé
A mon
Cou
Lisse  »


***
Émeric Vauchel 
vient chez Francopolis pour la première fois, proposé par notre ami Philippe,
et l’on peut dire que ses écrits ont soulevé ou retenu des souffles et suscité des débats. Il nous présente 5 poèmes :
 
1. Berceaux – 2. Torpeur – 3. Cousu de fils blancs – 4. Il est libre, Masque – 5. Catatonie en pluie mineure

Commentaires sur l’ensemble de ses textes :

Gerty : Un peu déroutée par cet auteur qui nous donne des textes sous un tout autre angle. Peu commun en poésie et qui nous oblige à adapter notre lecture. Son fond de page nous promène dans des paysages étranges, un peu dans le domaine de la psyché, nous nous promenons dans ces moments de  conscience et inconscience de sa personnalité. J’apprécie de cet auteur la qualité de ses titres qui nous donnent dès le départ son orientation.
André : certaines parties m'évoquent des balades comme je les aime dans la musique rock. Je ressens chez cet auteur une grande facilité de production d'écriture (jusqu'à la prolixité) nuisant certainement à son expression en créant une impression de relâchement, de désinvolture. Il manque souvent la tension des sentiments et je ne reçois guère d'émotion en le lisant. Pourtant la magie des images affleure ici et là  des exhortations vigoureuses, des métaphores hallucinantes jaillissent au milieu d'une plaine de descriptions à perte de vue:
« Car il me faut bien nourrir
Ces brasiers qui grandissent
Comme des enfants difformes
Et qui aiment pourtant
Comme l'air aime le vent. »

Oui cette écriture est malheureusement trop plate par manque de rage ou d'intensité. Je reste mitigé malgré le don évident que possède cet auteur. A mon avis, il mérite toute notre attention. L'avenir lui appartient, comme on dit.

**
1. Berceaux, a divisé l’équipe, mais il a eu une majorité de oui! Donc c’est gagné, on se laisse porter !
 
André, Gerty et Laurent retiennent leurs souffles, l’image finale reste en eux :
Oui même si je me sens un peu à la dérive dans sa barque de l’enfance mais la fin me charme. (Gerty)
Laurent : Après un non initial, les images restent, de la nature sauvage, aquatique, aux créations humaines, concrètes, bâties… Oui. Ne serait-ce que pour :
« Au matin un oiseau crie
À travers chaque vitre ouverte
Nous nous levons
Comme un long pain cuit dans la nuit. »

Quand à Éliette, XMatinaux et Michel  ont un autre son de cloche !
Éliette : Poème qui commence harmonieusement : « Flambe, inerte rivage, où  nous jouions enfant. » Ensuite le rythme est détruit par une série d’après qui énoncent chaque fois des banalités : « après le rouge vient le bleu »  Dommage !
XMatinaux : Réveil après une évocation de l’enfance et des rêves plutôt positif : « comme un long pain cuit dans la nuit » mais litanies ennuyeuses le plus souvent avec cette répétition d’après ! 
Michel : Difficile de dire oui. Trop de petites choses me choquent, comme :
« Tandis que durent les flammèches/Nous, dans la barque à fond plat/Attendons gorge sèche. »
Mais le oui l’emporte avec Aurore : J'aime bien la fluidité des mots. On sent de la vie joyeuse, des instantanés très imagés.


**
2. Torpeur

Laurent
: J'aime beaucoup. Un rythme haletant, un paysage onirique de sensations et de souvenirs, une très belle conclusion.
Aurore : Texte très différent, plus long, plus dramatique. C'est assez intéressant dans la structure.
Éliette : Texte en prose, le style un peu lent et lourd rend bien cette torpeur !         
XMatinaux : poème en prose  ennuyeux, même après plusieurs lectures.                         
Gerty : oui pour ce récit, même si rien d’excitant, rien qui soulève vraiment mais un style lent qui donne l’heure juste de sa torpeur « sur le perron de son cadastre. » 


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3. Cousu de fils blancs

oui pour Laurent : « Aujourd'hui tu t'assieds face aux flots
Dont l'eau vient de plus loin que tes pas sur le sable
(…) Et te raconte des désirs venus de plus loin que tes doigts dans le sable »

J'aime le côté prosaïque du texte, rehaussé de discrètes irruptions de poésie, de nostalgie, de réconciliation et de résignation. Peut-être un peu long avec quelques vers superflus :
« Tu demeures là un moment encore
Engourdi par l'étrange vide autour de toi
Et les coups de vent affairés
D'une vieille amertume que tu pensais maîtriser. »

Aurore : Oui. La nostalgie est présente.                                                                          
Pour Éliette et Michel c’est non ! en effet, Michel est : déçu par le changement de ton ou le dérapage comme :
« Et le vent, ce souffle si particulier, qui te fouette/Comme le parfum de cette main qui te reste/En travers du nez »
et Éliette nous dit : Après un premier couplet pas désagréable, la suite est abimée par un changement de rythme et des images malhabiles : « comme le parfum de cette main qui te reste /En travers du nez »
ainsi que pour XMatinaux qui n’y voit : que des banalités sous une fausse simplicité.     
Mais c’est un grand oui qui se déploie dans le coeur de Gerty : pour la sensibilité du sujet traité. Comment écrire une si grande douleur ? On lui tient la main dans sa douleur. Un état de détresse si intense qui le tient dans les faits et non l’émotion.
Oui surtout pour cette forte et belle image de la fin qui nous donne un peu d’oxygène.
« Le vent – une main parmi les autres – Te pousse doucement dans le dos. »


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4. Il est libre, Masque

Gerty : Oui, parce que l’auteur a l’intelligence de nous situer dans son titre.
Même si le récit est un peu long, les masques sont bien définis. Et j’aime bien cette image « cheveux en berne » dans
« Regarde sous tes pieds s’agiter, vaine et fausse,
En livrée de laquais, ta compagne païenne
Hurlant les ongles rouges et les cheveux en berne »

Laurent : Après un oui initial, le non l'emporte… ça ne fonctionne pas. Il reste un certain nombre d'images à sauver, mais…
« _ Enfin, l'ennui des bals
Le dégoût du demain,
L'indifférence totale
_ Enfin se résigner
A n'attendre plus rien
_ Et être enfin biffé
Des nécros du journal !  »
… me laisse froid.
Pour Aurore : Une écriture qui manque d'intensité. L'émotion n'est pas au rendez-vous.
Michel : Force des mots de vengeance envers un amour déçu, (peut-être) pour déboucher vers un moment de liberté. Oui
XMatinaux dit oui : appel  à la liberté un peu long mais plutôt agréable « le rictus plissé  du velours sur les planches »  
Éliette approuve : De belles images : « tu verras racornir les pénombres des chairs. » Les vers amples d’abord, s’accélèrent ensuite, comme un halètement. En une  énumération pas ennuyeuse de faits abolis :
« attendre ceux qui boitent
Supporter ceux qui râlent
Dans les haleines moites
Sortant des puits sans hâte… »

et « Trois vers lancent le cri de victoire : libre ! »


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5. Catatonie en pluie mineur

Laurent
: Superbe poème aux images puissantes.
« Je descends un peu le long de la feuille
Et de sa ligne rouge
Et je sais qu'au bout, tout au bout,
Il faut regarder le vide
Pour passer à l'autre face »

Aurore : un style qui pourrait être un peu plus travaillé.
André : Oui cette écriture est malheureusement trop plate par manque de rage ou d'intensité. Je reste mitigé malgré le don évident que possède cet auteur. A mon avis.
Éliette : Beau texte « des mots comme des pierres » ou « ton sourire de feuille pliée » j’ai beaucoup aimé.
XMatinaux : oui très beau paradoxe : aspirer à ne plus rien écrire au moment où l’on écrit  le mieux !    
« et la lumière, mante muette
 tire avec ses mandibules
un sale film sans fin
qui fait trembler mon souffle
et trouble mon repos » 
 
Michel : Cette façon de s’adresser à sa feuille de papier et de parler de son amour est originale.
Gerty : oui… par respect de ce style peu commun et sa catatonie (bien mentionnée dans le titre) et ces quelques images viennent renforcer son récit dans cette fragilité, ses peurs, et ses doutes difformés.
« Affronter
Ton sourire de feuille pliée
Les doigts de l’âme sur la bordure
Prête à taillader
»  et
« Ces brasiers qui grandissent
Comme des enfants difformes
Et qui aiment pourtant
Comme l’air aime le vent. »


*****

Tu en veux encore ? Ta soif n’est pas éteinte ?
Donne-moi ta main, lecteur, continuons notre promenade! 

Je t’invite à trinquer aux « Gestes du jour » de Daniel Leduc, assis dans notre Salon de lecture.

Viens, il nous attend...


Juliette Clochelune pour Francopolis, mars 2011
et les membres de Francopolis.



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Créé le 1 mars 2002

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